Euthanasie, de la compassion au génocide des vieux !

 

En relisant les articles postés sur ce blog depuis bientôt trois ans, je réalise combien j’oscille en permanence, entre la pédagogie du journaliste et les coups de gueule du polémiste. L’une et l’autre forme d’écriture portant une commune exigence de respecter la raison et la vérité.

Ainsi donc François Hollande persiste à vouloir faire d’une forme «d’exception d’euthanasie» l’une des avancées sociétales de sa présidence, si les Français l’élisent le 6 mai prochain. Hier, dans l’émission de France 2 «Des paroles et des actes», le parallèle a été esquissé entre l’engagement de campagne de François Mitterrand, en 1981 – s’il était élu – d’abroger la peine de mort, et celui de Français Hollande de permettre à chacun de rester maître de son destin. De l’abrogation de la peine capitale à l’instauration d’une peine de mort consentie pour soi-même, contre soi-même. Redoutable retournement symbolique qui interpelle l’électeur de gauche que j’ai toujours été. Je peux bien l’écrire ici, n’ayant plus de responsabilité éditoriale dans aucun titre de la presse française.

Je ne reviendrai pas sur les attendus de ma «Lettre ouverte à François Hollande sur le droit de vivre dans la dignité», publiée sur ce blog en date du 11 février dernier. Je m’en tiendrai au constat qui est le sien : la loi Leonetti est une bonne loi, la meilleure sans doute qu’il soit possible d’imaginer, sauf… qu’elle ne règle pas toutes les situations. Et c’est ce «vide» qui justifierait une nouvelle intervention du législateur. Sur ce point, je me contenterai de citer ici, parce que je la fait mienne sans la moindre réserve, la position de Marie de Hennezel exprimée dans le Monde du 17 février.

Ne pas toucher à l’interdit de tuer

« A l’heure où les candidats à l’élection présidentielle devront se positionner vis-à-vis du souhait de certains de légiférer sur l’euthanasie, je voudrais dire ceci : commencez par faire appliquer la loi qui existe ! Ensuite, engagez une réflexion citoyenne autour des rares situations qui ne peuvent être résolues dans ce cadre.

Nous sommes nombreux à souhaiter que ces souffrances extrêmes puissent être soulagées au risque de transgresser la loi. Mais nous sommes conscients aussi de notre responsabilité vis à vis des plus vulnérables, ceux dont on décidera peut-être un jour que leur vie ne vaut pas la peine d’être vécue. Le code pénal, qui interdit au médecin de donner délibérément la mort, les protège. Une solution doit pouvoir être trouvée sans toucher à cet interdit de tuer qui structure notre société.»

Tout est dit. J’entends ici l’argument récurrent de l’hypocrisie à lever pour mettre enfin la loi en conformité avec la pratique. Mais je pose la question : s’il fallait abroger tous les interdits qui ne sont pas scrupuleusement respectés par les citoyens de ce pays, que resterait-il de notre code pénal ?

Qui parle encore de la « grande vieillesse » ?

Dans ce débat de la présidentielle, pas une fois – à ma connaissance – n’a été évoquée la question de la grande vieillesse ni de la création de ce «cinquième risque» dont Nicolas Sarkozy avait fait l’une des priorités de son quinquennat, avant d’en sacrifier l’ambition sur l’autel de la crise économique et financière. Méfions-nous du poids des symboles et de la coïncidence – prémonitoire ? – de l’instauration d’une aide légale à mourir à l’heure de l’abandon d’une aide à vivre.

J’entends d’ici les protestations, justement ou faussement scandalisées, des tenants d’une liberté dont nous assure qu’elle ne saurait déroger, dans le temps, d’un strict encadrement. Dois-je dire que je reçois, à mon tour, cet engagement comme étant de la dernière hypocrisie ?

Il faut relire l’interview de Jacques Attali publiée en 1981 et consultable par tout un chacun sur internet.(1) Je cite quelques extraits :

«Je crois que dans la logique même du système industriel dans lequel nous nous trouvons, l’allongement de la durée de la vie n’est plus un objectif souhaité (…) Pourquoi ? Parce qu’aussi longtemps qu’il s’agissait d’allonger l’espérance de vie afin d’atteindre le seuil maximum de rentabilité de la machine humaine, en termes de travail, c’était parfait. Mais dès qu’on dépasse 60/65 ans, l’homme vit plus longtemps qu’il ne produit et il coûte alors cher à la société (…) Du point de vue de la société, il est bien préférable que la machine humaine s’arrête brutalement plutôt qu’elle se détériore progressivement. (…) On pourrait accepter l’idée d’allongement de l’espérance de vie à condition de rendre les vieux solvables et créer ainsi un marché.

 

L’euthanasie comme mode de gestion de la société marchande.

L’euthanasie sera un des instruments essentiels de nos sociétés futures. Dans une logique socialiste, pour commencer, le problème se pose comme suit : la logique socialiste c’est la liberté et la liberté fondamentale, c’est le suicide ; en conséquence, le droit au suicide direct ou indirect est donc une valeur absolue dans ce type de société. Dans une société capitaliste, des machines à tuer, des prothèses qui permettront d’éliminer la vie lorsqu’elle sera trop insupportable, ou économiquement trop coûteuse, verront le jour et seront de pratique courante. Je pense donc que l’euthanasie, qu’elle soit une valeur de liberté ou de marchandise, sera une des règles de la société future.»

Vous avez dit exception d’euthanasie ? Vous avez dit encadrement strict réservé à des cas extrêmes ? Vous avez argumenté que les riches pourraient donc aller chercher, au-delà de nos frontières, une mort libératrice et tarifée dont les pauvres seraient privés. Et qu’il y aurait-là une criante injustice. Et si la vérité était que les riches auront toujours la possibilité de continuer à vivre, même dans la dépendance, tandis qu’il sera offert aux pauvres l’opportunité légale d’interrompre  – dans la dignité, bien entendu – une vie qu’ils n’auront plus les moyens d’entretenir et que la société marchande leur refusera ?

Je ne voterai pas le génocide des vieux !

Chrétien de gauche, j’ai toujours frémi aux discours sur le caractère «non-négociable» de certains principes éthiques qui semblaient tenir pour secondaires des impératifs de justice sociale, d’accueil de l’étranger, de destination universelle des biens, de droit au développement des peuples du Sud… A quarante jours de la présidentielle me voici renvoyé à ma conscience et à l’éternel dilemme entre éthique de conviction et éthique de responsabilité. Au nom d’une éthique de conviction j’ai toujours été hostile à l’avortement ; au nom d’une éthique de responsabilité j’estime que la loi Veil – aujourd’hui dénaturée – était nécessaire. Au nom d’une éthique de conviction je reste sensible au projet de justice sociale porté par le candidat socialiste ; au nom d’une éthique de responsabilité je n’apporterai pas mon soutien au défenseur d’un projet de loi qui se veut compassionnelle mais qui pose, sans doute en toute innocence, la première pierre d’un futur génocide des vieux et de tous les non-rentables de la société marchande !

——

(1) Michel Salomon, L’avenir de la vie, Seghers 1981. Recueil d’interviews sur l’avenir des questions bioéthiques. Entretien avec Jacques Attali, haut fonctionnaire socialiste, notamment  p.270 à 275.

 

26 comments

  • « s’il fallait abroger tous les interdits qui ne sont pas scrupuleusement respectés par les citoyens de ce pays, que resterait-il de notre code pénal ? »

    Et voilà. Vous soulignez très bien et de façon très claire les contradictions et les incohérences de toute l’argumentation (qui du coup n’en est pas vraiment une) en faveur de l’euthanasie légale, et vous savez pointer où se situe réellement l’hypocrisie. (ou, disons, l’inconséquence, puisque « hypocrisie » suppose une intention mauvaise qui souvent me semble plutôt un aveuglement).

    Concernant la fin de votre article, j’avoue pour ma part n’avoir jamais vraiment saisi l’opposition entre « éthique de conviction » et « éthique de responsabilité », opposition qui me semble artificielle, voire bien commode pour ceux qui voudraient se donner l’impression de justifier de tels débordements (en permettant à la fois d’admettre le côté immoral ou injustifié d’une pratique et à la fois de l’accepter malgré tout en pratique).

    Il me semble qu’une distinction plus claire (que je reprends de Jean Daujat) serait entre réflexion morale d’une part et morale appliquée d’autre part (ce que certains appelleront « éthique ») :
    la réflexion morale est première, et aboutit à découvrir les principes moraux, qu’il s’agit ensuite de savoir appliquer mais en tenant compte des circonstances, chaque fois particulières et singulières – et si l’intelligence abstraite suffit dans la première phase, la seconde nécessite la vertu de prudence, celle qui indique comment mettre en pratique les autres vertus de façon adaptée.

    Plutôt qu’une opposition et un dilemme, on voit alors entre conviction et responsabilité une complémentarité et une progression cohérente. Une mauvaise utilisation de ce concept est toujours possible, mais au moins on comprend mieux qu’il n’y a aucune opposition entre les grands principes moraux et leur adaptation aux diverses situations en pratique.

    Ceci n’étant qu’une remarque ou une précision annexe, qui ne change rien au sens et à la valeur de votre article.

  • Euthanasie, avortement et autres comportements mortifières !!!
    Nous sommes renvoyés, dans notre responsabilité d’électeur, à des dilemnes difficiles à résoudre.
    Nous ne trouverons jamais un candidat avec lequel nous pourrions souscrire à 100% de ses objectifs réels qui ne sont pas nécessairement ceux avancés durant une campagne électorale. Il nous faut opter pour le candidat « le moins pire » !!! puis chercher un « compromis » qui ne soit pas « compromission ».
    Le « respect de la vie » est primordial mais la question sous-jacente est : « quelle qualité de vie ? » et surtout ; « quel accompagnement la société et nous-mêmes sommes capables de fournir envers ces personnes en difficulté de vivre ? »
    Au-delà de notre choix d’élécteur il y a surtout notre conscience d’homme et de chrétien qui doit se laisser interpeller … et sans doute, à notre niveau, trouver une réponse.

  • Ton billet et la réaction de Marie de Hennezel me font penser aux débats récurrents sur la procédure pénale. Elle permettrait de faire sortir des coupables. Oui, peut-être, mais elle protège aussi les innocents. Et c’est au prix de quelques coupables libérés qu’on peut le faire. Même chose ici : oui, même si c’est assez terrible à envisager, certaines personnes souffrantes et souhaitant être euthanasiées ne peuvent pas l’être, mais c’est à ce prix qu’on empêchera que des personnes souffrantes ne souhaitant pas être euthanasiées ne le soient pas.

    Je n’ai aucune confiance dans les prétendus mécanismes d’encadrement, qui ne font que repousser un peu plus loin les limites des dérives.

  • René, je me retrouve pleinement de ce que tu écris, qui rejoins ce que j’ai pu écrire ici ou là dans mes billets. J’en tire les mêmes conclusions que toi; et mon éthique sociale, ma conception de l’accueil de l’autre et de la façon de faire de la politique en peuvent me faire voter pour Nicolas SARKOZY.

  • La mort n’est pas un droit…
    Je considere comme une erreur juridique de légiferer sur le droit à naitre ou le droit à mourir.
    Le fait de legiferer en droit ne devrait pas pouvoir, moralement et juridiquement, s’appliquer à ce qui n’est pas encore venu au monde ou ce qui en sort. C’est seulement dans le cadre de cet entre deux, entre le premier cri et le dernier, qu’on peut parler de droit. Ce n’est bien sur pas la pensée dominante et il va de soi que d’un point de vue politique et économique -#Attali-, des nécessités pourraient s’imposer, en deça de toute considération morale.

    Mais naitre ou mourir, peut-on en faire des actes juridiques et personnels? Ce qui releve de la volonté concerne davantage le rapport à ces deux évenements (je prefere parler d’évenements que d’actes) qui dépassent la sphére decisionnelle de la volonté humaine.

    On voit bien qu’a partir du moment ou on s’empare de ces évenements pour les penser en fonction de ce que veut l’homme fluctuant, on ouvre la porte à des dérives…

    La législation ne devrait, dans cette clarté, pas davantage porter sur l’encadrement de ces évenements que sur une notion moins pénale d’accompagnement -#Koz-.
    Mais là, le débat est ouvert ainsi que le chantier énorme.
    La loi Léonetti a entamé une avancée législative, pourvu que les idéologies (Hollande?) ne fassent pas reculer la société…et ajouter à la crise morale déja existante.

  • @RdeB. Pour l’heure j’en suis à refuser de voter pour François Hollande… pas encore à choisir de voter pour Nicolas Sarkozy !

  • Merci pour ce beau texte qui me recadre moi-même. Il m’était arrivé de commenter le sujet sur d’autres blogs, par le témoignage des soins palliatif qu’a reçu mon épouse et qui lui ont permit d’être jusqu’au dernier jour en relation digne et même parfois souriante avec ses proche, donc d’être elle-même. Bêtement, j’en restais là : je n’avais jamais lu le propos cauchemardesque de J. Attali sur « une des règles de la société future ».

    L’argument hollandien de l’inégalité entre les riches et les pauvres n’est pas nouveau : il a déjà été employé en faveur de la loi Veil en son temps. La façon dont elle a été dénaturée, comme vous le signalez devrait alerter les hésitants !

  • Merci pour cet article. « un projet de loi qui se veut compassionnelle mais qui pose, sans doute en toute innocence, la première pierre d’un futur génocide des vieux et de tous les non-rentables de la société marchande. » Ceci résume bien les intérêts réels en jeu dans ce débat. Qui a intérêt à ce que l’euthanasie se développe? Poser la question, c’est déjà y répondre.
    Je partage également votre trouble intérieur lorsqu’il s’agit de voter. Ici aussi, au Canada, la conscience est troublée lorsqu’elle doit votre sur des programmes et des partis qui font toujours dans le compromis, sacrifiant parfois des valeurs fondamentales.

  • Bravo cher René ! Voici que vous unifiez merveilleusement en un même papier « la pédagogie du journaliste » et le « coup de gueule du polémiste » !
    Je vous rejoins à… disons 80 %.
    Une objection, majeure : j’ai la conviction que la dissociation éthique entre « conviction » et « responsabilité » (Weber je crois) est un poison philosophique et pratique.
    Poison philosophique : la réflexion éthique, ou disons le carrément, morale (l’éthique est la morale en grec !) ne peut qu’être unifiée pour « respecter la raison et à la vérité ». La vraie décision morale est un processus unifié qui prend en compte différents critères : acte en lui-même, intention, finalité, moyens, circonstances (etc.). La méthode intellectuelle de la dissociation des éthiques aboutit le plus souvent à une conclusion captieuse : le mal présenté sous l’apparence du bien, le faux présenté sous l’apparence du vrai.
    Poison pratique : la dissociation conduit concrètement à définir le principe et à organiser son exception. Loi Veil : on affirme fermement (article 1) le droit à la vie au nom de la conviction ; puis on organise le cadre de l’exception au nom de la responsabilité. Mais la loi civile contient en elle-même une puissance normative au plan moral. Résultat pratique, démontrée par l’expérience : ce qui devient normatif dans la conscience collective, c’est que l’on peut légitimement éliminer un bébé dans le ventre de sa maman. Donc, droit à l’avortement, donc avortement de masse.
    Je suis d’avis que les chrétiens (de droite et de gauche) qui ont accepté la loi Veil ont fait une erreur. Et pourtant, quand on voit la situation actuelle, on en viendrait à rêver de revenir au minimum à la loi Veil ! Mais la loi Veil était un poison en soi : elle portait en elle sa propre dérive. Des chrétiens, laïcs et clercs (dont des évêques) ne l’ont pas vu. C’est ma conviction.
    Aujourd’hui : même dispositif intellectuel pour faire passer l’euthanasie (et autres « joyeusetés »). Mais là, vous voyez, René, que le « permis du tuer » sera nécessairement normatif au plan moral ; et trop tentant au plan pratique (les gros sous !). Donc vous vous opposez, et vous avez raison.
    Pour Thomas d’Aquin, la loi civile ne saurait se parer de toutes les perfections de la loi morale, car elle n’est pas faite seulement pour les gens vertueux… et les gens très vertueux sont une minorité. Cependant, il y a quelques principes sur lesquels on ne peut déroger. Sinon, on risque de rendre normative une morale publique gravement dévoyée. Les principes dits « non négociables » servent à baliser cela. Pouvoir dire : « là, non, pas touche, pas d’exception ! ».
    Après, il peut y avoir l’indulgence : tenir compte des circonstances, des intentions et de la finalité pour appliquer une sanction faible, voire symbolique, à une transgression sur une matière grave. Et il peut y avoir la tolérance, qui n’est pas un droit : accepter temporairement une imperfection parce que le désordre à vouloir réprimer serait supérieur au désordre causé par le mal lui-même. Mais le mal reste mal, et on le nomme mal, ce qui change tout dans la conscience collective, dans la culture éthique d’une société. Et ce qui conduit généralement à limiter le mal.
    Conclusion : à mon avis, la raison spéculative et l’expérience pratique doivent nous conduire aujourd’hui, sur les principales questions morales (qu’on appelle « sociétales »), à une grande fermeté, à ne rien céder, à s’opposer. Et ici, comme chrétien, vous ne cédez rien cher René. Donc, une fois encore, bravo René ! Et les chrétiens ne sont pas seuls ! Fausse est l’idée que les catholiques soient les derniers à s’opposer à certaines évolutions. Ils sont en première ligne, mais pas seuls.

  • Mon Cher guillaume, intellectuellement je suis votre logique. Comme vous je vois bien – et je l’écris en toutes lettres dans ma lettre à François Hollande sur le même sujet – comment le légal produit sa propre morale. La loi Veil est un parfait exemple de ces dérives. Mais je ne suis pas sûr de pouvoir vous suivre jusqu’au bout. Lorsque vous écrivez « Après, il peut y avoir l’indulgence… » Je voudrais vous renvoyer tout de même à l’histoire de notre Eglise qui a conduit de pauvres femmes, victimes plus que coupables, (je parle ici d’avortement) à l’exclusion, à la honte, à la souffrance, à la mort parfois, dans l’indifférence et la bonne conscience la plus totale des bonnes âmes. Nous sommes aussi redevenus vertueux et tolérants parce que la société civile, rejetant un pouvoir clérical devenu tyrannique, nous a envoyé quelques bonnes vérités en travers du visage. Faut-il évoquer les affaires de pédophilie dans l’Eglise ? Pour ma part je ne vois pas comment dans une société sécularisée on pourrait échapper à la dialectique des deux éthiques sauf à ce que les cathos se retranchent dans leur forteresse, se positionnent en contre culture, se contentant de « juger » la société, pour en dénoncer les lâchetés, insuffisances ou trahisons… Je sais que Benoît XVI n’aime pas plus l’idée de compromis que le cardinal Ratzinger, et que la notion de « moindre mal » fait hurler certains théologiens. Je ne sais pourquoi, tout cela me fait penser à la phrase – que je cite souvent – de Péguy à propos de la morale Kantienne : « Le kantisme a les mains propres, mais il n’a pas de mains ».

  • Guillaume, un mot encore au risque de m’encourir vos saintes foudres. Concernant l’avortement vous faites tout partir de la loi Veil. Erreur ! Sans doute le législateur ne serait-il pas intervenu si au cours des années précédentes, les tribunaux n’avaient pas relaxé de manière systématiques les femmes poursuivies et traduites pour avortement. Que faire lorsque la loi interdit et que les jurys populaires relaxent de manière systématique ? Aligner la loi sur les tribunaux en essayant de limiter les débats.

    Ce contour pour dire ma crainte que le processus engagé ne soit le même en ce qui concerne l’euthanasie. C’est ce que j’écrivais, dans ce blog, à la date du 25 janvier 2011. Je vous y renvoie.

    Enfin, pour ce qui est de votre appréciation « Ici, comme chrétien (ce qui vous permet d’échapper au distingo cher à Jacques Maritain entre « en » chrétien et « en tant que » chrétiens…) vous ne cédez rien, cher René, Bravo !  » Je ne suis pas si sûr que vous m’ayez bien lu. Je ne cède rien sur la tentation d’une dépénalisation par la loi, sous réserve de ce que j’ai évoqué plus haut. Mais j’adhère à la position de Marie de Hennezel qui évoque la possibilité, dans les cas ultimes, de transgresser la loi… pour n’avoir pas à la modifier. Je ne pense pas que ce soit là votre position personnelle !

  • Merci René. Vous savez qu’avec moi vous ne risquez aucune sainte foudre, mais tout au plus un débat franc, parfois tendu, mais sympathique, comme nous en avons déjà eu !
    Quelques éléments un peu rapides pour poursuivre le débat.
    – Si des tribunaux ont acquitté, ils avaient peut-être de bonnes raisons de le faire. Tout jugement est un cas d’espèce. La jurisprudence, qui est une source de droit, peut être plus douce que la loi sans que cela conduise nécessairement à changer la loi. La loi a une puissance normative supérieure à la jurisprudence.
    – Vous ne cédez rien, non pas en général, mais sur l’exception légale : vous faites bien de le préciser. Ma remarque à cet égard était trop générale.
    – Il n’y a pas de loi qui ne soit transgressée, mais si on part du principe que la transgression est publiquement possible, la loi est de facto détruite.
    – Si les deux éthiques sont une dialectique, elles ne peuvent être reliées à la raison droite et à la vérité. Société sécularisée ou non, la raison droite reste la raison droite, et la vérité reste la vérité. La société est sécularisée aujourd’hui mais personne ne sait ce qu’il en sera demain.
    – Si l’Eglise a commis des erreurs, elle peut en tenir compte pour ne pas les renouveler.
    – Je ne souhaite pas que l’Eglise dirige la société, je souhaite qu’elle s’occupe du salut des âmes, et que, pour le reste, elle donne aux catholiques des éléments de discernement, des repères clairs. Et les fidèles pensent et agissent librement, en conscience.
    – Contre-culture ou non ? Quel dilemme ! Sur ce plan, je dois vous dire que, paradoxalement, mon catholicisme me tempère. La contre-culture est une subversion. C’est à prendre en compte dans la réflexion. Si je veux lutter contre la culture consumériste, j’aurais tendance à être subversif ; si je veux évangéliser, j’aurais tendance à davantage de modération pour m’intéresser davantage à mes semblables tels qu’ils sont, sans me présenter en rupture avec ce qu’ils sont.
    – Un écueil à éviter : que l’opposition aux « dérives sociétales » soit un bunker de derniers « purs catholiques » contre le monde entier. Il faut réfléchir avec les autres, débattre avec les autres et agir avec d’autres (je le répète, il n’y a aucune exclusivité catholique sur ces questions, juste une prédominance, certes forte).
    – Personnellement, je me positionne davantage comme citoyen sur ces questions. Je penserais sans doute la même chose si je n’étais pas catholique. En tout cas, lorsque j’y réfléchis, je ne pense pas spécialement à la religion. La raison peut accéder au « Tu ne tueras point » sans la révélation divine, sans la foi. Mais j’admets que si Dieu l’a rappelé, c’est que c’était nécessaire.
    Merci sincèrement René d’ouvrir ainsi cet espace à un vrai débat.

  • Je suis d’accord avec vous. Étant un futur médecin, je refuse catégoriquement de devoir tuer quelqu’un. Si je vais prêter serment c’est uniquement pour soigner et sauver des gens… Les gens devraient se mettre à notre place. Voudriez vous appuyer sur la seringue qui va arrêter ce cœur qui bat, le cœur de cette personne de chaire, d’os et d’âme ? Merci, ça fait du bien de se sentir soutenu !

  • Je partage la position… mais pas la conclusion: je m’apprête à voter Hollande et, si il est élu, à descendre dans la rue et à faire tout ce que je pourrais pour éviter l’application de ce point. Il serait trop grave de renoncer à changer l’économie. Le PS est loin d’être 100% pro-euthanasie, on peut les faire changer sur ce point (à condition que l’Eglise ne confonde pas les priorités et ne se mettent à lutter contre toutes les réformes familiales mais mettent toute son énergie contre l’euthanasie, à condition que l’on soit pédagogue mais c’est aussi une opportunité de rappeler combien toute vie est bonne pour la société).
    La probabilité de convaincre Sarkozy de ne pas entretenir le système bancaire en l’état s’il était élu, elle est nulle et à mon sens, cela relève aussi d’une éthique de responsabilité.

  • Vincent, je reçois votre argumentation. Ce raisonnement a longtemps été le mien. Peut-être le redeviendra-t-il au moment de voter. Mais faire un peu de chantage à la défection des votes cathos n’est-il pas aussi de bonne guerre ?

  • Ce raisonnement est tout à fait le mien. Je ne peux donc voter pour F.H. non plus , mais pas davantage pour N.S qui heurte aussi ma conscience par ses choix économiques et sociaux.

  • Merci à René Poujol,
    Comme la plupart des lecteurs de son article, cette proposition de FH m’effraie, comme la perspective que rien de change vraiment avec NS en matière économique et sociale.
    Je n’ai pas fait mon choix et comme je ne veux pas m’en laisser conter par les médias qui pronostiquent le second tour, j’attends avec espoir le soir du premier. Tout n’est pas joué.
    S’il fallait choisir FH/NS, j’appliquerai un critère celui de l’irréversibilité de la décision. Quand la porte sera ouverte à l’euthanasie, il sera difficile de la refermer. Il sera plus facile de modifier des taux d’imposition ou des règles à imposer aux banques. Et tant qu’à descendre dans la rue pour forcer une décision il me paraît évident qu’il sera plus facile de mobiliser en faveur de mesures économiques et sociales que contre l’euthanasie.
    C’est une piste de réflexion.
    LfeM

  • Choisir entre N Sarközy et F Hollande est impossible,car si le discours du premier est plus rassurant, on sait ce que valent ses paroles, il a mis a des postes clefs ( sante , famille ) des ministres pas très cathos, et un ministre de la culture pédophile
    Seul l’abstention me semble raisonnable, la droite avec sarko s’est complètement déshonoré

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