La liberté des enfants de Dieu

La liberté des enfants de Dieu

Le 16 mai devrait sortir en librairie «Lettres à Kateri», roman épistolaire d’un jeune théologien québecois. A vous donner envie de redevenir chrétien.

 

Lettres à Kateri

Je peux bien me risquer ici à une confidence : tenir ce blog n’est pas de tout repos. C’est à dessein que, dès sa création, je m’y suis présenté comme «catholique en liberté», persuadé que le message chrétien pouvait être une «bonne nouvelle» pour nos contemporains, pour peu qu’on accepte de le dépoussiérer un peu, de se risquer ici ou là  à évoquer, simplement, «sa foi» personnelle, au risque assumé de ne pas confesser en permanence  «la foi de l’Eglise». J’ai vite perçu combien cette prétention était insupportable à certains qui y voyaient un danger pour la «vraie foi».

 

Au fil des mois et des articles, combien de lecteurs m’ont-ils «chrétiennement» invité à quitter l’Eglise, si je ne m’y sentais pas à l’aise au point de vouloir la réformer ? Combien m’ont expliqué, non sans mépris, que j’incarnais un catholicisme du passé, ringard et moribond, à l’heure où les jeunes générations se montraient, Dieu merci, fidèles, ouvertes et maléables à l’Esprit ?

 

Pouquoi vous raconter cela ? Parce que je viens de terminer «Lettres à Kateri», roman épistolaire d’un jeune théologien trentenaire, d’origine Québecoise. J’ai trouvé dans ses pages, sur les pas de Iéschoua, la trace frémissante d’un christianisme d’amour, d’espérance et de pardon. Où l’intelligence et le cœur convient à la liberté. En le refermant le désir m’est venu de remercier le Ciel pour l’envoi inespéré de ce jeune frère en catholicité qui, au travers d’une prose grave et légère, semblait me rendre mon honneur perdu !

 

«Xavier et Kateri se sont aimés» nous dit la quatrième de couverture. Puis la foi les a séparés. «Je veux que tu le saches, tout le temps passé ensemble fut pour moi merveilleux. Oui. Nous n’étions peut-être pas le couple parfait mais nous n’en étions pas loin. Et pourtant, l’instinct mystique avait aussi tellement d’emprise au fond de moi : j’avais besoin de me retrouver seul – seul avec le Seul. Comme un moine. C’était plus fort que moi». Cette explication surgit dans la troisième des quinze lettres de Xavier à Kateri qui constituent l’ouvrage.

 

Depuis le monastère «expérimental» où il cherche à tâtons sur quel chemin de vie le conduit le «rabbi de Nazareth», Xavier écrit à celle qui fut son amour pour lui expliquer une foi qui la révolte et l’interroge. De lettre en lettre, avec infiniment de tendresse et d’humanité, il brosse du christianisme un portrait dont seuls, sans doute, sont capables, ceux dont Simone Weil écrivait : «Celui qui met sa vie dans sa foi en Dieu peut perdre sa foi. Mais celui qui met sa vie en Dieu lui-même, celui-là ne la perdra jamais.» (1)

 

Les critiques et objections ne manqueront pas au livre de Xavier Gravend-Tirole, (2) qui sera jugé par certains «politiquement peu correct» même si l’on perçoit le sérieux du travail théologique. J’ai mes propres réserves. Son approche de la question du mal, par exemple, ne me convainc pas où, une fois encore, est convoquées comme seule explication l’éternelle «liberté de l’homme» voulue par Dieu. Et, de mon point de vue, quelques idées demanderaient à être mieux fondées, mieux explicitées.

 

Mais on devine que l’ambition de l’auteur qui achève une thèse de doctorat sur le métissage interreligieux, n’est pas de vulgariser le catéchisme de l’Eglise catholique. Elle serait plutôt, sans tentation aucune de syncrétisme, de donner à comprendre et à aimer le christianisme et son fondateur, comme références possibles pour l’homme de ce troisième millénaire. En soulignant combien le cœur de la foi peut se concilier avec la liberté des enfants de Dieu. Et combien cette liberté, vécue en Eglise dans la vérité de l’échange et la fraternité, peut dessiner pour elle un chemin d’avenir.

 

 

  1. Simone Weil, La pesanteur et la grâce
  2. Xavier Gravend-Tirole, Lettres à Kateri, ed. Le Jour, 230 p.

 

 

4 comments

  •  » A vous donner envie de redevenir chrétien ». Oui, c’est exactement cela. Comme le dit mon commentaire sur Fb, j’ai découvert ce théologien en lisant un de ses articles et une interview, il y a quelque temps. Cette lecture m’avait réchoupillée car ces derniers temps, bien triste fut la portion des catholiques n’étant pas « dans la ligne ».(Si vous voyez ce que je veux dire …)
    Je m’étonne un peu de votre réaction, mais c’est que je vous connais mal…Et tant mieux pour celle-ci.

  • Je viens de finir de relire un vieux bouquin que l’ado que je fus avait rangé dans un coin de sa bibliothèque sans vraiment l’oublier, mais sans envie de le relire: Les nouveaux prêtres de Michel de St Pierre. Ce pamphlet plus que roman a compté dans l’évolution vers la foi, il m’a alerté sur le fait que l’institution fonctionne comme un somnambule en rapport ésotérique avec l’Église qu’elle croit s’être appropriée en s’y auto-identifiant. Il a hélas compté aussi pour l’institution en contribuant à son retour vers un passé idéalisé qu’elle juge magnifique (notabilité, richesse, foules, belles cérémonies, …) et qu’elle refuse de relire avec l’esprit critique indispensable, au moins la période récente du siècle dernier, c’est à dire en faisant deux colonnes. Or l’institution a, dès son commencement, mythifié une colonne et gommé l’autre au point que même les historiens ont failli s’y faire prendre.
    Le rapport avec ces « lettres », dont j’ai lu d’autres recensions et quelques extraits, est que l’un est l’antithèse de l’autre: l’un est certitude et enfermement (mort), l’autre est risque et vie. Pour un chrétien, la vie est éternelle, pas la mort
    Merci René et je note que Xavier Gravend-Tirole est membre du mouvement Suisse « Christianisme social ».

  • je n’ai certes pas encore lu l’auteur que vous citez mais regardé son interview durant laquelle il se montre fort sympathique assurément,mais je me disais aussi:

    quand cessera-t-on d’oublier que nous sommes des serviteurs inutiles.
    Charles de Foucauld écrivait dans une de ses lettres:
    « tu es un serviteur inutile:tu dois faire de toutes tes forces tout ce q’il (le Seigneur)commande…Mais autant il est certain que tu dois obéir ainsi et travailler de toutes tes forces…autant il est certain que tu es un serviteur inutile;que ce que tu fais Dieu pourrait le faire par d’autres,ou sans aucun autre,en tout cas sans toi:tu es un serviteur inutile »

    Dans le même ordre d’idées Bernadette ne disait elle pas qu’elle n’était dans les mains du Seigneur que le balai accroché derrière la porte?

Comments are closed.