Les retraités catholiques plébiscitent l’intergénérationnel 

Les retraités catholiques plébiscitent l’intergénérationnel 

A Lourdes, 4000 adhérents du Mouvement Chrétien des Retraités ont redit leur volonté d’être acteurs dans la Cité et dans l’Eglise. 

Les 19, 20 et 21 juin, le Mouvement Chrétien des Retraites, (MCR), tenait à Lourdes ses 3e Journées du monde de la retraite. Quatre mille adhérents venus de tous les diocèses de France étaient invités à réfléchir et débattre sur quatre grands défis du monde contemporain : le vivre-ensemble, la famille, la santé, l’écologie. L’encyclique du pape François Laudato si’ tenant lieu de fil rouge.

Dans une Eglise catholique souvent vieillissante et pas au mieux de sa forme, beaucoup semblent courir après les jeunes générations comme ultime planche de salut. L’image des aînés s’en trouve dévalorisée d’autant. Même si, objectivement, nombre d’entre eux contribuent largement à faire « tourner la boutique.» Bref, les « vieux » n’auraient pas pas démérité mais l’avenir s’écrirait ailleurs… Plus encore ils incarneraient une forme de frilosité, consubstantielle à l’âge, là où la jeunesse aurait toutes les audaces. Et se situeraient en marge des évolutions de notre société. Voire ! 

Des applaudissements qu’il faut savoir décrypter

L’image donnée à Lourdes par ces retraités, souvent grands-parents, grands-oncles ou tantes était tout autre. Rien de tel pour se faire une idée, qu’observer quels propos étaient applaudis et lesquels éventuellement sifflés ou contestés. Or, ici, point de sifflet ni de bronca. Mais des salves d’applaudissements, oui, lorsqu’à propos du vivre-ensemble l’imam de Bordeaux, Tarek Oubrou affirme que « l’altérité suppose d’accepter de renoncer à une partie de ce qu’on est pour s’enrichir de l’apport de l’autre » ; de même lorsque le rabbin Yann Boissière du Mouvement Juif Libéral de France affirme que « le dialogue avance par ceux qui ont envie de le faire avancer » ; ou encore lorsque le père Christian Delorme dénonce le « recul sérieux de l’Eglise catholique en France » et le repli identitaire de nombre de jeunes.

Applaudissements lorsque le sociologue Michel Billé que l’on sent interrogatif sur le bien fondé de certaines réformes sociétales, ne s’en interroge pas moins : « Mais si cette société advient, je fais quoi pour ne pas renoncer à la relation avec ceux qui vivent ces réalités ? » ou lorsqu’il évoque des parents de sa connaissance se disant « rassurés par le témoignage de fidélité du couple homosexuel de leur fils ». 

Applaudissements encore, en une longue ovation, debout, mardi soir, pour le comédien et le metteur en scène de Pierre et Mohamed, la pièce du frère Adrien Candiard qui relate l’amitié, jusqu’à la mort, le 1e août 1996, de Pierre Claverie l’évêque d’Oran assassiné en même temps que son jeune chauffeur musulman Mohamed Bouchikhi. Chacun avait entendu dans la pièce ces paroles de l’évêque martyr : « On ne possède pas Dieu, on ne possède pas la vérité et j’ai besoin de la vérité des autres.»

Un désir d’ouverture à la jeunesse et à l’universel

Applaudissements nourris enfin lorsque le jeune co-fondateur du mouvement Cœxister, Samuel Grzybowski évoque cette confidence du pape François lors d’une audience au Vatican : « C’est l’alliance entre la force de la jeunesse et l’expérience de l’âge qui vous permettra d’atteindre la vraie sagesse. »  ce qui le conduit à conclure à l’adresse des participants : « Vous êtes les racines de vos petits-enfants. Notre génération a besoin de votre confiance. »

De cela, les retraités paraissent convaincus. Pour preuve également la série de quatre vidéos diffusées en ouverture de chacune des tables rondes. Tournées à Taizé, elles montraient des adhérents du MCR débattant librement avec des jeunes, garçons et filles, venus des quatre coins du monde. Désir manifeste, pour ce mouvement, d’ouverture à la  jeunesse et à l’universel. Bref tout le contraire de l’enfermement supposé de cette génération. 

Il m’avait été demandé par les organisateurs, d’assister en observateur à l’ensemble de la rencontre et d’en présenter une synthèse, le jeudi matin, avant la messe de clôture. Exercice délicat, où l’on peut soit sombrer dans l’anecdote par désir d’être concret, soit s’évader dans l’abstraction au motif d’être profond… Ce texte, j’ai décidé, avec l’accord du MCR, de le publier aussi sur ce blogue, pour ceux qui auront le courage de s’y plonger. (1) Car il dit à sa manière toute la richesse d’une génération désireuse de ne pas vivre sa retraite « en retrait » mais bien au cœur de la vie. Parce qu’on reste citoyens bien au-delà de sa seule vie professionnelle, quel que soit son âge, et qu’en Eglise, comme le rappelait avec humour Mgr Boulanger dans son homélie, « contrairement à une équipe de foot, il n’y a pas de remplaçants ! » 

 

(1) Compte tenu de sa longueur, et de son caractère particulier, il ne m’a pas semblé souhaitable de le mettre dans le fil de ce blogue, où toute nouvelle publication est automatiquement signalée aux abonnés, mais parmi les « autres documents ». Comme d’ailleurs le rapport de synthèse déjà réalisé à l’intention de Vie montante internationale, en 2014, sur la situation des retraités à travers le monde. Encore fallait-il en informer mes abonnés. Ce que permet le présent article.

One comment

  • Il faudra quand même qu’un jour la France laïque – politique, sociale, culturelle – reconnaisse ce que les cathos – en majorité ici de la génération conciliaire, sans être exclusif – apportent à la société française et à la Cité politique.

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