Une double urgence pour l’Eglise catholique : se parler et se taire ! 

Une double urgence pour l’Eglise catholique : se parler et se taire ! 

La profondeur de la crise qui ébranle le monde catholique justifie des remises en cause sans doute radicales.

Dans la crise que traverse l’Eglise, peut-être la plus profonde depuis la Réforme protestante, il nous faut aller à l’essentiel. C’est l’exigence qu’expriment les baptisés eux-mêmes et que je perçois depuis des semaines, à travers des rencontres, des confidences, comme à travers la lecture de la presse et des réseaux sociaux. Aujourd’hui l’urgence absolue, si paradoxal ou contradictoire que cela puisse paraître est à la fois de se parler et de se taire. 

Nous parler, parce que nous avons trop désappris à le faire

Nous devons nous parler : prêtres, diacres, religieux et laïcs hommes et femmes. Sur un pied d’égalité. Au nom du sacerdoce commun des baptisés. Ce qui ne signifie  pas se résigner à une quelconque confusion des rôles et des ministères. Paraître exclure, à ce stade, la hiérarchie catholique n’est ni malice ni ostracisme. C’est simplement inviter nos évêques à partager d’abord ce « commun » avec leur peuple. 

Nous devons nous parler parce que nous avons trop désappris à le faire. Par exercice abusif de l’autorité ou par respect servile. Parce que nombre d’entre nous portons encore douloureusement les divisions de 2013 autour de la loi Taubira, faute d’avoir eu le courage de nous expliquer sur nos différences de choix. Et faute d’avoir été invités à le faire par les responsables de notre Eglise, au motif que débattre n’aurait pu qu’exacerber les divisions, alors que le dialogue peut aussi ouvrir à une meilleure compréhension de l’autre et, pourquoi pas, faire émerger de possibles points de convergence. 

Dire notre fraternelle compassion à celles et ceux qui ont eu à souffrir de l’Eglise

Nous devons nous parler comme signe de confiance réciproque. Comme engagement à nous laisser interpeller les uns par les autres et, ensemble, par la société dans laquelle nous vivons et qui n’est plus ouvertement chrétienne, sans être forcément antireligieuse. Comme refus de nous arrêter à des positions – oppositions – irréconciliables. Même si nous devons fuir toute naïveté, tout irénisme. Les Actes des Apôtres sont là pour nous rappeler que les divisions sont aussi vieilles que l’histoire de notre Eglise. 

Nous devons nous parler pour dire ensemble notre fraternelle compassion à celles et ceux qui ont eu à souffrir de l’Eglise et de certains de ceux qui avaient pour mission de servir l’Evangile ; pour témoigner à nos prêtres, blessés par des scandales qui semblent les désigner à la vindicte, de notre estime et notre affection. Mais pour leur dire aussi que ce sacerdoce auquel ils sont attachés n’est pas leur bien propre mais celui de toute l’Eglise et qu’il n’est pas indécent de s’interroger aujourd’hui sur les modalités d’un possible élargissement de son accès. Nous devons nous parler pour essayer, ensemble, de comprendre ce qui nous arrive et faire face, avec humilité et détermination.

Faire silence pour prendre le temps d’écouter 

Et dans le même temps, il me semble que notre Eglise devrait retrouver le sens du silence. La Semaine sainte qui se profile nous y invite. Entre le calvaire du vendredi saint et la Résurrection du dimanche de Pâques, se situe la descente aux enfers et le silence radical du samedi saint. Peut-être est-ce là le moment précis de la vie de notre Eglise. Faire silence parce que la parole de l’institution se trouve contredite, bafouée, dévaluée, inaudible. A trop avoir prêché sur le sexe considéré comme le mal absolu, la voilà prise à son propre piège. Et fort mal placée pour venir faire la leçon. 

Faire silence pour signifier qu’il est des questions sur lesquelles l’Eglise, qui se veut “experte en humanité“, doit sinon reconsidérer, du moins approfondir et revisiter ses propres sources. Parce qu’en bien des domaines qui touchent à la morale son enseignement n’est plus reçu, même parmi ses propres fidèles. Faire silence pour prendre le temps d’écouter ce que nos concitoyens d’autres traditions philosophiques et religieuses peuvent avoir à nous dire, en conscience – car ils en ont également une – sur des sujets où nous prétendons détenir une éternelle vérité. Faire silence pour savoir retrouver les mots qui, demain, pourront exprimer notre vision de l’homme et de sa dignité, en réponse et non en opposition à l’aspiration profonde de notre peuple. Faire silence parce que ce silence marque les trente premières années de la vie du Christ et que nul ne prétendra qu’elles furent perdues pour l’annonce de la Bonne Nouvelle. 

Pour un nouveau Président de la Cef qui sache habiter le silence 

A l’heure où les évêques de France réunis à Lourdes pour leur Assemblée plénière de printemps s’apprêtent à élire leur nouveau Président, la tentation pourrait être forte de vouloir compenser l’affaiblissement du catholicisme en France par une parole épiscopale ferme et assurée. Et si l’urgence était à désigner un homme capable d’habiter le silence ? De faire vivre à notre Eglise ce temps de l’introspection, de l’écoute et du partage ? Comme de retrouver, à frais nouveaux, toute la richesse du sensus  fidei qui n’est pas l’opinion des laïcs contre celle des clercs mais la conscience des baptisés face à leur sacerdoce commun ? 

En préface au document de la Commission théologique internationale sur « Le sensus  fidei dans la vie de l’Eglise » Mgr Eric de Moulins-Beaufort écrit : « Le sensus  fidei ne se traduit pas d’abord dans des affirmations théologiques ou des enseignements moraux, mais avant tout dans le témoignage rendu au Christ par la vie de foi et de charité. (…) La division, si utile ici bas et si évidente surtout, entre ceux qui savent et ceux qui ne savent pas perd de sa pertinence lorsque l’Esprit-Saint est donné à tous… » (1)

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(1) Commission théologique internationale, Le “sensus fidei“ dans la vie de l’Eglise, Ed. du Cerf 2014 p. II et III. 

 

PS. Faut-il préciser, pour ceux qui liraient ce billet postérieurement à l’élection de Mgr Eric de Moulins-Beaufort comme  nouveau Président de la CEF, qu’il a été mis en ligne la veille même de cette élection. La citation qui termine le texte est donc purement fortuite, à moins qu’elle ne procède d’une belle intuition… qu’il puisse y avoir là un programme de gouvernance pour temps de crise !

34 comments

  • Intéressant, comme souvent.
    Une Eglise du samedi saint, je partage ; déjà un peu morte et pas encore ressuscitée. Se tenir dans ce grand silence du samedi saint. Avoir des paroles de témoins de la résurrection mais pas de paroles d’autorité, devenues inaudibles et contre-productives ; elles n’intéressent plus que ceux qui les disent.
    Pourvu que le futur président de la CEF puisse tenir une ligne humble, à l’écoute… pour avoir une parole inspirée par l’Evangile qui propose plutôt que d’imposer : les paroles fortes de Jésus ne venaient-elles pas souvent d’une attention à ceux qui l’entouraient ? Ces paroles étaient parfois rudes mais en même temps incitatives.

  • René, le grand débat auquel vous aspirez dure depuis plus de cinquante ans… Et rassurez-vous, ça va continuer : dans les quinquagénaires évêques qui vont monter en ligne à la Conférence des évêques, nous trouverons certainement des têtes et des cœurs bien faits qui aspirent à un déploiement nouveau des racines, rameaux et fleurs/rejetons issus de Vatican II. Ils auront, je l’espère, à cœur d’engager la féminisation de l’institution, à la suite de Marie, Mère de l’Eglise – et peut-être même de Marie corédemptrice –, ainsi que la montée en ligne des laïcs dans la gouvernance de la catholicité !

    • Je parle moins de débattre que de « se parler » donc de s’écouter par-delà les grilles hiérarchiques… Si c’était fait depuis cinquante ans, en serions-nous là ? Pour ce qui est Marie co-rédemptrice… je sais quelles ont été les « tentations » de certains au moment du Concile. Pour ma part je trouve que Marie a déjà une place unique dans la foi de l’Eglise et qu’il n’est pas besoin d’en rajouter. Un seul médiateur me va très bien !

      • Pendant qu’on y est on pourrait aussi donner le titre de co-rédempteur à Joseh car il fallait bien qu’il l’accepte cet enfant inattendu et puis voilà une urgente démarche qui améliorerait consdérablement l’oecuménisme sans aucun doute possible… »il n’y a qu’un seul médiateur entre Dieu et les hommes »
        Les autres ont un rôle second

      • « Un seul médiateur », René, ça me va aussi ! Il reste que dans la réflexion des quelques dizaines de Pères conciliaires qui avaient soulevé la question de Marie « co-rédemptrice », ce titre ne remettait pas en cause le Christ, vrai Dieu et vrai homme, comme « seul médiateur entre Dieu et les hommes ».
        Comment vous dire… S’il est banal d’attester, à la suite de saint Louis Marie Grignion de Montfort, et avec saint Jean-Paul II, que « Marie est le meilleur chemin pour arriver à Jésus », cela ne m’ôte pas de l’idée que le « Fiat » de notre Mère a un tout petit peu plus d’autorité, pour le salut du monde, que mon « oui » matutinal à ce que le jour ou la semaine qui vient va disposer pour moi, avec la grâce de Dieu… Et donc, que les réponses de cette jeune juive, à Nazareth comme au Cénacle – son adhésion d’esprit, de cœur et de corps aux « opérations » de l’Esprit Saint –, mériteraient sans doute de s’incarner davantage dans le témoignage, la liturgie et la diaconie de l’Eglise. « Incarnation » qui ne peut être offerte que par des femmes – ces fameuses « diaconesses » toujours en débat dans l’Eglise catholique ? ( https://fr.aleteia.org/2016/05/13/pape-francois-des-diaconesses-comme-autrefois-une-possibilite-a-etudier/ ).
        C’est là tout mon pauvre avis, touchant la question de « Marie co-rédemptrice ».

        • Tout cela est intéressant mais pardonnez mon entêtement cartésien : dire qu’il n’y a qu’un médiateur, le Christ, mais qu’il pourrait néanmoins y avoir une co-rédemptrice, Marie est pour moi totalement contradictoire. Et Marie n’en demande sans doute pas autant !

          • René, parce que vous êtes baptisé dans la mort et la résurrection du Christ, seul médiateur entre Dieu et l’homme, vous collaborez au salut du monde… Vous êtes donc co-rédempteur avec Jésus-Christ, qui est l’unique médiateur. De cette vocation co-rédemptrice, à laquelle tout homme et toute femme est appelé(e), la Vierge Marie est la parfaite et sublime incarnation.
            Vous m’opposez Descartes (rebelote et dix de der ?). Je ne marche pas dans la combine.
            Dire que « Marie co-rédemptrice » n’est pas « cartésien » revient à confesser que vous professez le « dogme » de la foi par l’intelligence (la froide action de vos neurones). Or, je pense qu’il existe un meilleur chemin : celui de l’intelligence par la foi (la voie du cœur).
            « Marie co-rédemptrice » appartient, me semble-t-il, à ce second ordre (second pour vous ; pour moi, c’est le premier). Et pourtant, René – pour vous lire régulièrement – je sais que vous avez du cœur… 😉

          • Denis, avec tout le respect que je vous dois, je ne demande pas le titre de co-rédempteur, et je m’étonne de votre naïveté. Il y a un culte marial qui chez certains tente à suppléer, si l’on n’y prend garde, celui qui est du à Dieu seul, fut-il en trois personnes. On retombe là dans les cultes païens. Je suis originaire du Rouergue et je sais qu’une thèse prétend que sa christianisation primitive s’est effectuée d’abord par l’introduction du culte de la vierge, pour ne pas froisser les cultes païens établis dans la région qui portaient sur des divinités féminines, avant que de présenter la figure du Christ. Aucune religion n’est à l’abri des régressions. Cette co-rédemption en serait une.

  • A René ,
    J’adhère pleinement au contenu de votre billet et ne doute pas que de très nombreux catholiques y compris parmi l’épiscopat sont conscients de l’importance des enjeux que vos évoquez .
    Je ne voudrais pas jouer les rabat- joies ou plutôt les rabats- espérance en soulignant cependant qu’il existe toujours de obstacles majeurs au sein de l’église qui obèrent les possibilités de réalisation concrète de ce temps de silence que l’épiscopat pourrait s’imposer à lui même ainsi que de ce nécessaire moment de dialogue entre la hiérarchie cléricale et les fidèles catholiques .

    Le premier et non le moindre est le deuxième paragraphe du point 10 maintenant anachronique de Lumen gentium :
     » le sacerdoce commun des fidèles et le sacerdoce ministériel ou hiérarchique, qui ont entre eux une différence essentielle et non de degré sont cependant ordonnés l’un à l’autre  »
    Ce texte révélateur de la réalité de la culture cléricale justifie pleinement que le magistère puisse avoir à priori une parole incontestable . Il ne favorise pas vraiment une attitude d’écoute et de prise de la parole des fidèles ; alors celle de la société civile , n’en parlons même pas .

    Le deuxième qui est la conséquence du premier est le refus d’admettre que l’expression pleine et entière du  » sensus fidéi « suppose la reconnaissance explicite préalable de la légitimité du « sensus communis fidelium . » Celui ci étant un élément constitutif essentiel du sensus fidéi .

    Je lis le texte de l’évêque Moulins Beaufort comme une affirmation de la persistance de cette césure toujours enracinée dans la mentalité cléricale entre ceux qui savent (les clercs et ceux qui ne savent pas (les fidèles ) qui sont juste bons à témoigner de l’Evangile .
    En matière d’anthropologie et de conception de la sexualité humaine , je ne suis pas sûr que le savoir des fidèles soit véritablement disqualifié au vu des aberrations du discours magistériel en ce domaine .
    je ne doute pas une seconde que ce soit en toute connaissance de cause que Moulins Beaufort n’emploie pas le terme de » sensus communis fidelium « ; sensu fidéi présentant l’immense avantage de ne pas remettre en cause la conception hiérarchique de l’église qui constitue le principal obstacle pour que les souhaits légitimes que vous exprimez ne puissent pas se concrétiser .

    On (Michel , Dominique et alii )pourra et on ne manquera pas de m’objecter que je ne fait pas à priori confiance à l’institution écclésiale et à sa capacité de se réformer elle même . On aura parfaitement raison . C’est comme en amour , seules les preuves comptent . Je n’en discerne pas le début du commencement d’une .

    Passer de la culture de connivence à une culture de communion au sein de notre église demandera beaucoup de temps ;
    Je veux cependant toujours croire que cela reste possible .

    • « on ne fait pas boire un âne qui n’a pas soif » dit le proverbe. Certes , tu n’es pas un âne mais tu es tellement persuadé de la profondeur et de l’exactitude de tes réflexions.,,,
      En bref, tu partages absolument la conception luthéro-Réformée de l’Eglise. C’est bien sûr ton droit absolument,mais pourquoi s’obstiner à se prétendre Catholique dans ces conditions?

      • à Dominique
        Merci de m’expliquer en quoi le fait de vouloir rééquilibrer les rôles respectifs du magistère et des fidèles dans l’église serait un signe d’ allégeance à l’église réformée .
        Je ne méconnais nullement l’apport et rôle fondamental du magistère de l’Eglise dans la construction de l’unité des catholiques à partir de la formulation de la foi .
        Entre questionner sa prééminence absolue dans la gouvernance de l’Eglise et le fait de lui dénier tout rôle ( ce qui n’est pas ma position ) , il y a quand même un grand espace vide qui est celui dans lequel je tente de réfléchir .

        Faut il rappeler à un catholique aussi orthodoxe que toi que le rôle du magistère doit beaucoup plus aux circonstances dans les rapports de l’église et du monde au cours de l’histoire qu’à une quelconque source scripturaire ou à des pratiques avérées aux temps apostoliques .

        Cette paresse intellectuelle et spirituelle, bien oublieuse du vieux principes « ecclesia semper reformanda »et qui consiste à ne rien vouloir changer dans un monde en évolution rapide , prend le risque de rendre le message de l’Evangile de plus en plus inaudible par nos contemporains parce que formulé dans des formes de plus en plus étrangères à leur culture .
        Tout cela pour la seule raison que ceux qui ont reçu pour mission, par leur baptême ,d’en témoigner, préfèrent la forme au fond , subordonnent le fond à la forme et oublient combien la forme doit aux circonstances du moment à toutes les périodes de l’histoire .

        Ane libre à toi d’apprécier , catholique situationniste pas plus ; juste un chrétien catholique pour qui la Tradition de l’Eglise c’est le foi vivante de ceux qui nous ont précédés et non la foi morte des vivants .

        • La différence fondamentale entre toi et me est, me semble-t-il que tu mets tout ce qui concerne la Tradition sul le compte de la volonté humaine laquelle est ,chacun le sait plus ou moins dévoyée,alors que moi j’y vois ou plutôt je crois y voir la main de l’Esprit Saint et il ne me déplait pas du tout que le magistère soit plus que circonspect à l’égard des dispositions retenues par le monde et ,sans doute tu vas me dire que je radote,mais quand je vois la réussite (!) de nos frères réformés lesquels ont infiniment moins de circonspection que nous vis à vis du monde cela me conforte dans l'(idée qu’il n’est nullement établi qu’ils aient choisi « la meilleure part » alors qu’en toute logique humaine ils devraient connaître un franc succès surtout vis à vis de nous.;
          Oui , l’Rglise Catholique Romaine est en piteux état, pour autant je ne puis croire que des réfomes finalement d’ordre administratif y changeront grand chose
          Bien sûr que l’Eglise est »semper reformanda » et il n’est pas question pour moi d’en revenir à L’Eglise de l’époque de la Reforme,bien sûr que non,mais la Révolution dans l’Eglise, pour moi; çà jamais!

      • C’est pourtant l’argument utilisé par P d’Ornellas pour « remotiver  » les fidèles . Ce n’est pas parce qu’ils sont qualifiés de  » princes de l’église » que nos Excellences doivent pour autant s’identifier au prince Salina (personnage du roman « Le Guépard »)

        • « Il faut que tout change pour que rien ne change »… oui, on a parfois l’impression que c’est la logique dominante de l’institution ecclésiale.

  • Je ne voudrais pas être, ni paraître désobligeant, mais, je me permets de dire que pendant que je lis ces palabres, je note le fait suivant Dans le quotidien du médecin de ce jour….
    « Grève des IVG: l’Ordre doit-il sanctionner le Syngof ? 03.04.2019
    Le syndicat des gynécologues et obstétriciens de France (Syngof) a-t-il franchi la ligne jaune en menaçant d’arrêter les IVG il y a quelques semaines ? Plusieurs associations de défense du droit des femmes ont réclamé des sanctions à l’encontre du syndicat, poussant le Conseil national de l’Ordre des médecins à examiner cette semaine les conséquences déontologiques de cette annonce. Le Syngof avait pourtant tenté de calmer le jeu en déclarant dans un communiqué que ses adhérents ne cesseraient pas de pratiquer des IVG, mais qu’à travers cette menace il avait tenté d’alerter sur la situation de confrères confrontés à un problème de couverture assurantielle ».

    Je comprends parfaitement que certains de mes confrères répugnent à appliquer la loi. Cependant, il me semble que nous sommes sortis, depuis belles lurettes, d’une période où notre église régnait sur les cœurs et les consciences. Il me semble que ce fait basique soit tout à fait obscur chez certains de nos sachants. La communauté nationale offre à chacun le droit de ne pas croire, et d’avoir une vision de l’homme différente de la nôtre, que cela nous plaise ou non. Je pense même que ce sont nos trahisons répétitives du Message Divin qui est à l’origine de cela. Sinon, comment expliquez-vous cette perte de crédibilité des « élites, politiciens, et autres…. » ?
    Le résultat ne s’est pas fait attendre : outre ce déballage néfaste aussi bien à ceux qui en sont les victimes qu’à ceux qui l’ont initié, une indifférence plus ou moins polie nous est opposée.
    Pour Johny, 1,5 millions de participant, funérailles quasi nationale, messes à la Madeleine….
    Pour un instituteur qui se suicide, suite à une plainte, 3000 personnes dans la rue, en soutiens de la famille.
    Un prêtre se suicide, suite à une plainte …Une église pleine de jeunes, mais indifférence hostile dans la rue…
    Que dire du silence qui accompagne divers dégradations d’église, d’une cathédrale, de cimetières, de harcèlement de fidèles ou condescendance polie devant certains qui essaient encore de vivre selon Humanae vitae !
    Je lis plus haut que «… René, le grand débat auquel vous aspirez dure depuis plus de cinquante ans… ». Oui, mais je pencherais plutôt pour quelques 20 siècles. Devions-nous imposer les rites d’alors aux païens fraichement convertis ? Pierre, Jacques et Paul ont sagement décidé que là n’était pas la question. Tout ce qui n’interpelle pas l’homme de la rue est sans intérêt disait Maurice Zundel.
    Alors, silence ou pas silence ? that is the question…
    En ce qui me concerne, je préfère suivre ceux qui essaient de prendre le taureau par les cornes. Avec Véronique Margron, Mgr Albert Rouet, Mgr Gobilliard et Thérèse Hargot, Père Dominique Colin…et bien d’autres, qui, en silence, font renaitre notre Église de ses cendres. Voyez donc la vie de cette semaine, c’est très instructif, passionnant et pas du tout pleurnichard.

  • Je n’avais eu, bien évidemment, aucune confidence particulière du Ciel avant de citer en chute de mon billet Mgr Eric de Moulins-Beaufort élu mardi nouveau Président de la Cef. Voilà au moins une citation qu’on pourra lui remettre en mémoire, si besoin est !

    • Ah, belle intuition quand même !
      Nous avons en Mgr Eric de Moulins-Beaufort quelqu’un d’intelligent et humble, cette élection me réjouit.

  • Merci de ce nouveau billet auquel j’adhère complètement. Je relève :  » à avoir prêché sur le sexe considéré comme le mal absolu la voilà prise à son propre piège ». En effet c’était un thème favori qui a fait tant de mal aux couples, aux adolescents… La Ste Vierge n’est pas présentée comme une personne humaine qui a accepté de prêter son concours à l’Incarnation mais d’abord comme une femme qui a eu un enfant sans passer par un homme…. Et dire que l’on vient de « fêter » les 50 ans d’Humanae Vitae sans en changer in iota… Il y a encore un immense chemin à parcourir.

    • Si c’est ce que vous avez réellement entendu au catéchisme…mais j’en doute,c’est effectivement déplorable alors que depuis bien longtemps on souligne le fait que sans son’fiat » l’incarnation n’aurait pu se réaliser

      • Sauf que si elle est née sans péché… parce que future mère du Christ, on peut en conclure qu’il y avait prédestination, non ? Tout cela est bien compliqué !

        • Encore une autre chose de bien compliquée . Marie s’est vue gratifiée du titre d’Immaculée Conception , la seule dans l’ histoire de l’humanité . Est -ce à dire que toutes les autre conceptions, la mienne la vôtre, sont maculées et par quoi ? Plus Marie est extraordinaire moins Dieu s’est fait Homme en prenant notre condition humaine , nous qui sommes nés d’une mère « ordinaire »

          • Elle est maculée par le péché originel. Seule Marie, dans la tradition catholique, est née sans être « souillée » du péché originel.

          • A René
            L’ensemble de la théologie latine ,à partir de la notion de péché originel développée par Augustin a longtemps considéré que Marie n’était pas exempte du péché originel .Thomas d’Aquin notamment . Ce n’est qu’au moyen âge tardif qu’un théologien franciscain Duns Scot a développé la notion de rédemption préventive pour considérer que Marie n’était pas née « maculata » ; conception développée dans le dogme de 1854 de l’immaculée conception . Dogme dont on ne trouve aucun fondement ni dans l’Ecriture , ni dans la tradition du premier millénaire .

          • C’est exact, Guy, néanmoins l’Orient chrétien parle de Marie la « bienheureuse et très pure, toute immaculée Mère de Dieu », considérant que Marie n’a pas péché dans sa docilité à l’action de l’Esprit Saint en elle.
            L’Occident s’est cru obligé de dogmatiser à ce sujet, comme vous le rappelez, dans la logique de la notion augustinienne du péché originel, là où l’Orient ignore cette notion.
            Benoît XVI s’était interrogé à ce sujet : « L’existence de ce que l’Eglise appelle le péché originel est, hélas, d’une évidence écrasante. Il suffit de regarder autour de nous et surtout en nous. L’expérience du mal est si concrète qu’elle s’impose d’elle-même et nous amène à nous demander : d’où vient le mal ? Pour un croyant, en particulier, la question va encore plus loin : si Dieu, qui est la Bonté absolue, a tout créé, d’où vient le mal ? (…) Mais nous, aujourd’hui, nous devons nous demander : quel est ce péché originel ? Qu’est-ce que Paul enseigne, qu’est-ce que l’Eglise enseigne ? Est-il possible de soutenir cette doctrine aujourd’hui encore ? Un grand nombre de personnes pensent que, à la lumière de l’histoire de l’évolution, il n’y a plus de place pour la doctrine d’un premier péché, qui ensuite se diffuserait dans toute l’histoire de l’humanité. Et, en conséquence, la question de la Rédemption et du Rédempteur perdrait également son fondement. Le péché originel existe-t-il donc ou non ? »

        • C’est effectivement compliqué et pourtant nos frères orthodoxes chez lesquels l’immaculée Conception n’est pas un dogme appellent Marie : la Toute Pure, ce qui veut bien dire la même chose, non ?
          Enfin je rappelle qu’avant de proclamer comme dogme l’Immaculée Conception, Pie IX avait interrogé tous les évêques pour connaître leur point de vue lesquels s’y sont montrés tout à fait favorables et pour les défensurs absolus du « sensus fiddei  » je rappelle que cette croyance faisait partie de la foi populaire depuis des centaines d’années
          Par ailleurs si l’on en croit Bernadette c’est en bigordan que la Belle Dame lui a révélé qu’elle était l’Immaculée Conception et l’a chargé de le dire à son Curé.
          Croire à cela c’est évidemment illogique à vue humaine mais notre vue humaine n’est-elle pas quelque peu déficiente?

          • Je vais vous dire le fond de ma pensée : j’ai une grande tendresse pour Marie et me moque, personnellement, comme d’une guigne de tous ces dogmes. Qu’en une vie humaine elle n’ait comis aucun péché, qu’elle soit née sans la souillure du péché originel dont la réalité elle-même renvoie à nos premiers parents dont l’existence historique n’est pas assurée… voilà qui effectivement interpelle la raison. Quant à Bernadette, il y a cent autres explications possibles que celle à laquelle il nous plait de plaire. Résumons nous : j’admire Marie dont je reconnais le statut éminent dans l’Eglise, je sais l’existence du mal en chacun de nous, je constate les fruits de Lourdes qui sont de beaux fruits. Pour le reste… je laisse chacun croire ce qu’il veut et même, pourquoi pas, ce que lui dit l’Eglise !

          • Non, Dominique, ce n’est pas la même chose : nos frères orthodoxes considèrent que Marie est la toute pure et immaculée dès sa conception et par toute sa vie, dans le sens où elle n’a pas commis de péché personnel, mais ne lient pas cela à un privilège lors de sa conception par les mérites anticipés de son Fils la préservant du péché originel, notion augustinienne assez étrangère à l’Orient chrétien.

  • Merci, René, pour ce billet qui me touche beaucoup.
    Le silence du Samedi Saint… marqué par la descente aux enfers, « il est descendu aux enfers » répétons-nous mécaniquement dans le Credo sans trop en comprendre le sens, et pourtant si riche !
    Ainsi débute le sermon de Saint Epiphane (que l’on lit à l’Office des Ténèbres du Samedi Saint, vous l’entendrez à Sylvanès) : « Un grand silence règne aujourd’hui sur la terre, un grand silence et une grande solitude. Un grand silence parce que le Roi dort » (Lectionnaire patristique dominicain p.186 à 188).
    Mais ce n’est pas pour autant un jour vide de sens : ce que célèbre dans la nuit du tombeau le Samedi Saint, c’est la descente aux enfers (c’est-à-dire au séjour des morts) de Jésus-Christ, le Sauveur de l’univers, qui vient délivrer les captifs de la mort et relever d’entre les morts ceux qui, depuis Adam, attendent la Lumière et la Vie.
    Et j’aurais tendance à ajouter, puisque Dieu est éternellement dans le présent, que cette visite du Christ aux Justes de l’A.T. pour les relever s’étend aussi à tous les justes qui n’ont pas reçu sur cette terre l’annonce du salut en Jésus Christ.

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