Eglise et homosexualité : la confusion des arguments

Eglise et homosexualité : la confusion des arguments

Qu’un jeune prêtre s’exprime librement – maladroitement – sur le réseau TikTok et voilà le monde catho qui se déchaîne. 

Un jeune prêtre peut-il affirmer, sur les réseaux sociaux, que nulle part, même dans son catéchisme, l’Eglise catholique ne considère les actes homosexuels comme un « péché » ? La question peut sembler quelque peu surréaliste au regard de nos évolutions sociétales et de l’influence réelle qu’y exerce le catholicisme. Et pourtant le fait a soulevé, en cette fin d’été un véritable tsunami dans la cathosphère, justifiant un commentaire désapprobateur de la Conférence des évêques de France. Mais la manière même dont les « amis » du père Matthieu ont pris sa défense illustre à merveille les impasses dans lesquelles les catholiques sont engagés et l’impossibilité, sur cette question comme sur bien d’autres, de nouer un véritable dialogue. 

L’événement ne m’avait pas échappé. Est-ce par lassitude, j’avais choisi de ne pas le commenter.  Car enfin, ce n’est pas d’hier que les cathos s’écharpent sur la question de l’homosexualité. Comme s’il y avait là l’alpha et l’oméga de la foi chrétienne. Sur cette question comme sur d’autres, l’opinion catholique dans notre pays semble évoluer, certes avec un temps de retard qui fait partie de son ADN, dans le même sens que l’opinion publique en général. Je crains que le Magistère, relayé par la Cef, n’y puisse pas grand chose. Je fais partie de ceux qui considèrent, en rupture assumée avec l’enseignement de l’Eglise catholique à laquelle j’appartiens, que les actes homosexuels ont la valeur que leur accordent celles et ceux qui les posent, souvent dans l’amour, la tendresse et la fidélité. Cela dit en ouverture de mon propos pour dissiper au besoin, par avance, quelque malentendu.

Désavoué par son diocèse et la Conférence des évêques de France

Mais venons en aux faits. L‘abbé Matthieu Jasseron, jeune prêtre du diocèse de Sens & Auxerre développe depuis des mois, comme une dizaine d’autres prêtres en France, une présence sur le réseau social TikTok particulièrement prisé des jeunes. Il s’y exprime à titre personnel, répondant dans de courtes vidéos, aux questions qui lui sont posées. Et ça marche puisqu’il a à ce jour 620 000 abonnés ! En début de semaine du 23 août, il consacre son billet à la question homosexuelle : « « Est-ce qu’on peut être gay et chrétien ? » ou une autre question que je vois revenir souvent c’est : « Est-ce qu’être homosexuel ou pratiquer l’homosexualité, c’est péché ? » Eh bien je vais être franc et honnête avec vous les amis : non ! » Tollé dans le Landernau catholique ! Les protestations sont telles que le diocèse de Sens & Auxerre où il exerce se fend d’un communiqué désapprobateur. Le 27 août, c’est le service communication de la Conférence des évêques de France qui monte au créneau : « La CEF désapprouve certaines de ces vidéos qui dénaturent le message de l’Église. Elle alerte sur le fait que leur succès d’audience ne signifie pas qu’elles soient justes ». Et là, le tsunami change de camp. Ce sont désormais les « amis » de l’abbé Matthieu qui prennent sa défense sur les réseaux sociaux.

@perematthieu

Répondre à @nathan_mltn 😉🙏🏼🕊 #gay #chretien #péché❓

♬ Rivers Of Babylon – Irene

Et c’est bien là que je suis gêné aux entournures. Ce qui me conduit aujourd’hui à rédiger et publier ce billet presque « à l’insu de mon plein gré ». Car je compte nombre d’amis parmi ces soutiens à l’abbé Matthieu et, je le leur dis ici en toute amitié, si ce soutien ne me pose aucun problème sur le fond : l’attitude incompréhensible de l’Eglise catholique sur la question homosexuelle (comme sur la sexualité en général) c’est l’argumentation qu’ils déploient et les conditions même de ce soutien qui me paraissent irrecevables car de nature à entretenir la confusion. 

L’affirmation de l’abbé Matthieu : factuellement fausse

Car que dit l’abbé Matthieu dans sa vidéo ? « Il n’est marqué strictement nulle part, ni dans la Bible, ni dans le catéchisme de l’Eglise c’est-à-dire l’ensemble de la tradition, que d’être homosexuel ou de pratiquer l’homosexualité c’est un péché. » Or cette affirmation est factuellement fausse. (1) On peut disserter à loisirs sur le sens réel des interdits bibliques repris par Paul. Là n’est pas pour l’heure la question même si c’est en réalité LA question !  Mais concernant  le catéchisme de l’Eglise catholique dont l’exégèse, elle, est hélas simplissime, la question ne se pose même pas : oui les actes homosexuels (et non les tendances homosexuelles) sont considérés comme péché. (2) « Ils ne sauraient recevoir approbation en aucun cas. » (Article 2357). 

D’où un certain malaise lorsque je lis sur la page Facebook de mon ami Dominique Chivot : « J’avais cru comprendre que l’homosexualité était une orientation, et non pas une maladie ou un pêché. Mais voici que Matthieu Jasseron se fait tancer par les ayatollahs de la Conférence des évêques : ce jeune prêtre a « osé » affirmer sur TikTok que l’homosexualité n’était pas un péché. Je sais bien qu’il faut se méfier de l’usage d’une parole libre sur les réseaux sociaux, mais là, j’hallucine, comme on dit ! L’enjeu est trop grave pour l’image déjà très abimée de cette institution. Est-ce qu’aujourd’hui, en 2021, un clerc osera prétendre et me dire, les yeux dans les yeux, que l’homosexualité est un péché ? J’aimerais que des centaines de milliers de voix s’élèvent pour dire à cette Eglise de France : ça suffit ! » Malaise renforcé par la liste d’autres amis  venus manifester leur accord avec cette prise de position. Car TOUS connaissent parfaitement cet article du CEC et savent la distinction traditionnellement opérée par le magistère entre les tendances et les actes.

Faire évoluer le discours des évêques ou les textes qui le fondent ?

La question posée est donc la suivante : est-il réellement nécessaire, pour soutenir un prêtre qui mène un combat légitime pour une juste reconnaissance des personnes homosexuelles dans l’Eglise, d’argumenter à partir d’un mensonge factuel ? Moi je ne peux pas ! Et cela n’enlève rien à ma détermination. Le communiqué de la Cef est moins critiquable sur le fond – il dit la “lettre“ de l’enseignement actuel de l’Eglise catholique – que sur la question de son opportunité. Mais qu’est-ce qu’il est urgent de faire évoluer : le discours des évêques ou les textes qui le fondent ? Nier l’existence de ces textes me semble être une erreur. Oui, l’Eglise catholique continue d’enseigner que les actes homosexuels sont péché parce que, par nature, « non ouverts à la transmission de la vie » dès lors qu’il y a – pardon de la trivialité du propos – éjaculation. Ce qui suggère d’autres questionnements rarement abordés : la pratique de la fellation par un couple chrétien est-elle plus légitimement « ouverte sur la transmission de la vie » ? On attend, sur ce sujet crucial le regard toujours éclairé des Padreblog ! 

Quelle liberté d’expression pour ceux qui ont un « devoir d’obéissance » ? 

Reste posée la question de la marge de liberté dont peut et doit disposer un prêtre sur les réseaux sociaux. Dans la Croix du 31 août, Mgr Emmanuel Gobilliard, évêque auxiliaire de Lyon et membre du Conseil pour la communication à la Cef s’exprime en ces termes : « Il y a sur les réseaux une dimension affective et personnelle qui fait que notre présence ne peut pas être uniquement institutionnelle. Mais cela fait partie du jeu : lorsque l’on est ordonné prêtre, on doit accepter la dimension publique qui vient avec. Comme toute personne publique, un clerc ne peut communiquer uniquement en son nom ! » Voilà qui a l’avantage de la clarté ! Et qui illustre, d’une certaine façon, le malaise de nombre de clercs ou laïcs en mission ecclésiale, lorsqu’ils sont tenues « par obéissance » de se faire les relais d’un enseignement  dont, au fond d’eux-mêmes, ils ne sont pas convaincus. La question n’est pas près de disparaître. Encore faut-il que, de part et d’autre, dans le débat qu’elle suppose, on ne se complaise pas à la confusion des arguments. 

Dans l’ouvrage, passionnant, qu’il vient de consacrer à la pensée politique de Frédéric Ozanam (3) mon ami Charles Vaugirard évoque (p.80) la réflexion de ce dernier sur le métier d’homme de lettres catholique dans « Des devoirs littéraires des chrétiens ». J’entends bien que journalistes, blogueurs et autres youtubeurs ne sont pas forcément assimilables à des « hommes de lettres ». Pour autant, dès lors qu’ils se veulent catholiques, il me semble qu’ils doivent se sentir interpellés par les trois principes éthiques posés par Ozanam : la recherche de la vérité, la beauté du style et la charité envers les contradicteurs. « Ces trois principes étant la déclinaison littéraire et chrétienne du vrai, du beau et du bien. » J’entends, sur ce blog, assumer le propos pour moi-même ! 

  1. Or l‘abbé Matthieu reprend cette affirmation dans une seconde vidéo ce qui laisse tout de même perplexe.  
  2. Une amie me transmettait ces jours derniers le CV d’un homme aujourd’hui âgé de 63 ans (on peut voir ici un entretien vidéo où il reprend ces propos), victime d’abus de nature non sexuelle dans différentes communautés. Revenant sur ses années de jeunesse il évoque en ces termes son passage chez les Scouts d’Europe (1973-1978) qui illustre parfaitement notre propos. « Je suis le préféré du prêtre en soutane qui venait célébrer en plein air la messe dite « de St Pie V » pour les scouts. Il me confessait en m’expliquant que de se procurer « un peu » de plaisir « en se touchant » était un péché véniel et que s’il y avait « écoulement » (sic), cela devenait un péché mortel. » Certains en restent là !
  3. Charles Vaugirard, La pensée politique de Frédéric Ozanam, Ed. Pierre Téqui, 228 p., 18 €.

139 comments

  • Soyons encore plus clairs et concrets !
    Ce qui suggère d’autres questionnements encore plus rarement abordés : la pratique de la sodomie par un couple chrétien est-elle plus légitimement « ouverte sur la transmission de la vie » ?

    • Je crois qu’il y a beaucoup de fantasmes sur cette question et que c’est abusivement qu’on qualifie les homosexuels de sodomites. Faute de documentation précise sur le sujet je suis allé regarder sur Wikip&dia. Voici ce que j’ai trouvé : « Contrairement à une idée reçue, la sodomie n’est pas une pratique banale ou systématique au sein de la population homosexuelle. Selon une étude de 2011, menée par l’université de l’Indiana et la George Mason University, seulement 35 % des personnes homosexuelles interrogées ont affirmé avoir pratiqué la sodomie au cours de leur dernier rapport sexuel. La fellation (pratiquée à 72,7 %) et la masturbation mutuelle (pratiquée à 68,4 %) seraient des pratiques nettement plus courantes35.

      • Vous avez raison.
        D’ailleurs qualifier des homosexuels de sodomites, c’est montrer que l’on envisage la question que sous l’angle de l’homosexualité masculine. Quid des femmes ?
        Etant personnellement concerné par la question, je me suis toujours demandé ce que l’Eglise entendait par « acte homosexuel ». Elle prétend avoir résolu la question, mais se contente toujours de répéter son discours en boucle, sans jamais prendre en compte la réalité du vécu des personnes homosexuelles.
        Un geste de tendresse, est-ce un acte homosexuel ? Vivre sous le même toit avec une personne aimée, sans relation sexuelle, est-ce un acte homosexuel ? Se rendre dans une association qui agit sur cette question pour trouver un espace de parole, de non-jugement et de construction de soi que l’on n’a pu trouver nulle part ailleurs et surtout pas dans l’Eglise, est-ce un acte homosexuel ? Parler de sa vie privée au travail, comme le font mes collègues hétérosexuels sans jamais se poser de questions, est-ce un acte homosexuel ? Toutes ces dimensions de la vie, l’Eglise me demande-t-elle de les supprimer de mon existence comme étant intrinsèquement désordonnés et ne pouvant recevoir d’approbation sous aucun prétexte ?
        En fait, je crois que plus prosaïquement, l’Eglise n’envisage les actes homosexuels que sous l’angle de la pure sexualité. Elle n’a rien à dire sur la vie affective des personnes homosexuelles, son paradigme de réflexion écartelé entre une tendance qui serait neutre et des actes toujours peccamineux ne lui permet même pas de ne serait-ce que la penser. Ou alors cette réalité la dérange et elle préfère faire comme si elle n’existait pas, plus confortable pour la doctrine.

        • Mon impression est qu’il y a une crispation idéologique en lien avec le plaisir pour le plaisir, vu nécessairement comme de l’égoïsme pur (à l’inverse du don de soi) donc comme un péché. Comme les couples hétéro peuvent faire des enfants, alors c’est toléré, mais dans la mesure où il n’y a pas de contraception (donc possibilité qu’un enfant advienne et qu’on soi dans le don de soi). Tandis que les couples homo qui ont du plaisir ne le feraient que pour le plaisir. L’idéologie derrière cela repose sans doute sur le mépris du corps (et du plaisir) et l’incapacité de le voir comme un vecteur de l’amour, même (et surtout!?) à travers la sexualité. Ça parle de leur lien à leur corps en fait.

        • « l’Eglise n’envisage les actes homosexuels que sous l’angle de la pure sexualité » => Et même pour les couples h/f mariés, son magistère tourne principalement autour de cela…

          • L’Institution, et non l’Église, à la fâcheuse tendance de faire une fixette sur le plaisir, en particulier sexuel.

      • Non, René, je ne fantasme pas.
        D’abord, je n’ai pas employé le terme de « sodomites » pour qualifier les personnes homosexuelles masculines.
        Ensuite, travaillant en CeGIDD, je peux vous assurer que la pratique de la sodomie, même si elle n’est pas constante, est plutôt fréquente pour ne pas dire courante chez les homosexuels masculins ou les HSH.
        Du reste l’étude que vous citez (35%) faisait état du dernier rapport sexuel et non de l’ensemble de la vie sexuelle des personnes homosexuelles interrogées.
        La sodomie est pratiquée aussi de façon non exceptionnelle chez les personnes hétérosexuelles, quoique beaucoup moins fréquemment.

  • Dans ses mémoires, Jean Guitton rapporte ces propos de Paul VI sur la contraception : « Et qu’importe que je ne sois pas suivi et que meme à la fin je sois presque seul ». La matière (la pilule) est moins grave : dans « Humanae vitae », le pape ne parle pas de péché mais de désordre.. Pour l’homosexualité, on ne peut qu’être perplexe : ce n’est pas faire injure aux homosexuels que de dire que leurs corps ne sont pas complémentaires et leurs unions infécondes.Leur amour, lui peut être profond. Mystere…Quoi qu’il en soit, il fallait s’attendre à ce que les padreblogueurs , qui savent leur CEC par cœur, suscitent des contre-blogs plus soucieux de compassion que de la lettre. Mais ce n’est pas une raison pour nier cette dernière..

    • A Bruno .
      Il ne s’agit pas de nier la lettre de la doctrine de l’église . Elle existe et le travail de son institution consiste à la rappeler et à la défendre .
      Le problème est que la doctrine de l’église sur la sexualité humaine repose sur des bases qui sont anthropologiquement fausses . En effet , la sexualité humaine n’a pas pour seule finalité , même si elle est importante , la reproduction de l’espèce ; elle est signifie aussi la dimension physique d’une relation affective y compris hors de tous liens pérennes et même à minima l’échange de plaisir entre adultes consentants .
      La question de fond qui se pose à l’Eglise est de discerner comment la grâce de Dieu peut rejoindre cette réalité qu’est la sexualité humaine dans toutes ses dimensions et ses composantes et pas seulement de plaquer une théorie théologique sur cette réalité et de faire semblant de s’offusquer lorsque cette réalité a l’outrecuidance de ne pas se conformer à la théorie . Mais cette question , le magistère refuse de l’envisager ; Ayant lu crayon à la main , phrase par phrase Humanae Vitae , je peux dire que ce texte ne concerne pas la réalité de la sexualité humaine , mais reflète simplement la conception cléricale de celle ci : le rapport sexuel entre un homme et une femme ne peut avoir pour seule excuse que sa fécondité potentielle . . Ce texte est , de mon point de vue plus une injure à la masculinité qu’à la féminité dans la mesure ou il envisage l’homme comme entièrement mu par des pulsions dégradantes qu’il convient de contrôler et d’orienter . Le texte ne parle essentiellement que de paternité responsable ,( la femme étant sensée subir le rapport sexuel dans le seul but de la maternité ) et la femme est étrangement très absente de cet excellent résumé des obsessions perverses (l’idéal de la vierge mère ) qui fondent la doctrine de l’église en matière de sexualité .

      • Je suis d’accord, Guy. Si Humanae vitae a eté oubliée, c’est en grande partie à cause des lacunes de son argumentation. Mais le propos de Paul VI rapporté par Jean Guitton m’ interroge davantage : j’ai dit l’enseignement de l’Eglise, j’ai fait mon devoir, tant pis si on ne m’écoute pas. Il est à craindre que l’enseignement de l’Eglise sur l’homosexualité ne change pas mais qu’il tombe dans l’oubli : ces questions sociétales ne feront pas éternellement la une de l’actualité, compte tenu de l’importance de la population concernée et des concessions faites par le legislateur . Déja le pape a en partie tourné la page: qui suis-je pour les juger ?

    • Si un acte gravement désordonné, vécu dans la durée, n’est pas considérér par l’Eglise comme un péché, alors on se demande bien pourquoi elle a si durablement refusé l’accès aux sacrements (notamment au baptême et à la communion) aux homosexuels vivant en couple ou assumant sexuellement leur tendance. Et pourquoi les « audaces » pastorales du pape François à ce propos, lors du synode sur la famille, ont mis en érection métaphysique autant de catholiques, dénonçant là une atteinte à la sainte tradition.

      • Si l’Eglise avait voulu employer le mot péché, elle n’aurait pas hésité à le faire. Le mot désordre traduit le désordre social induit par l’homosexualité aux yeux de l’Eglise (pas de reproduction possible donc de perpétuation de la Vie) tout en reconnaissant que les personnes ne sont pas responsables de leur état ( le péché implique une responsabilité). D’où l’ambiguïté sur l’accès aux sacrements. Quant à l’érection méthaphysique dont vous parlez, merci de ne pas confondre l’interprétation des conservateurs catholiques et les textes. Un beau commentaire sur ces textes a été publié par l’association DUEC « Foi et homosexualité dans l’Eglise »

        • Non, il n’y a hélas aucune ambiguité. Il n’y a pas si longtemps le diocèse de Paris refusait d’accueillir des personnes ouvertement homosexuelles comme catéchumènes (sauf si elles s »engageaient à respecter une continence absolue) au motif qu’elles « vivaient en état de péché permanent » (comme les divorcés remariés). J’en ai eu des témoignages directs. Peut-être cela était-il une lecture excessive du CEC, mais cette pratique bien peu pastorale avait l’aval des évêques.

          • Je pense au contraire que l’ambiguité du texte ( pas d’emploi du mot péché) conduit à l’ambiguïté des positions. Les clercs et les Eglises nationales (CEC) interprètent les textes de façon différente selon leur sensibilité et leur culture. L’Eglise de France comme les autres ( influencée à mon avis par tous ces « bons chrétiens » que j’entends aujourd’hui ouvertement critiquer le pape en s’arrogeant le droit de juger tout le monde.)

          • Je persiste dans mon désaccord. Vous écrivez que les clercs et les Eglises « interprètent ces textes de façon différente selon leur sensibilité et leur culture ». Peut-être sauf que le code de droit canonique, lui, ne change pas pour autant dans sa prétention à l’universel. Ce que vous décrivez est en fait moins le réel que le souhaitable qui, à mon sens, est bien perçu comme tel par le pape François et qui devrait normalement trouver place, à titre de réflexion, dans le prochain synode sur la collégialité. Mais ne nous leurrons pas trop : rien n’est gagné !

  • Bonjour Roger et tous les autres lecteurs de ce blog.

    Je comprends que votre billet est suscité par la réaction de certains catholiques dont vous êtes proches au coup de crosse reçu par un jeune prêtre pour des propos considérés comme sortant d’une sorte d’obligation de réserve sur Tik Tok.

    Ces jours-ci nous avons entendu si nous sommes attentifs à la liturgie proposée par notre Sainte Mère des propos assez scandaleux et même gravissimes de la part d’un prédécesseur des évêques pourtant réputé très sûr au plan doctrinal, et dont votre chronique cite d’ailleurs le nom. Cela suffit à attester l’importance de ce personnage!
    Je ne reproche pas à Saint Paul de ne pas parler de Tik Tok dans sa première lettre aux Thessalonicidns. Je lui reproche de confier avec une imprudence à mon avis d’une légèreté coupable le rôle d’annonce de la bonne nouvelle du salut dans sa totalité à cette communauté chrétienne de Thessalonique sans se soucier du privilège pétrinien ni du collège apostolique.

    Le Père Gobillard a entièrement raison de dire que plus de 600 000 abonnés sur Tik Tok ne prouve rien mais s’accrocher à des discours inaudibles de la plupart de nos contemporaines sur l’homosexualité ne prouve rien non plus en matière de charité.

    Pout poursuivre sur ce qui est gravé dans le marbre de la parole dûment estampillée de l’église: entre la lettre d’Humanae Vitae dont les jeunes catholiques ignorent aujourd’hui à peu près tout et sa réception par le Peuple de Dieu il y a peut-être bien eu le même travail de l’Esprit que celui qui est à l’œuvre dans l’évolution de l’opinion publique catholique vis-à-vis de l’homosexualité. Qui sait?
    Réjouissons-nous!

  • Mon cher René,
    Je ne peux qu’être d’accord avec toi, j’allais dire : hélas ! Car tout cela donne une image affligeante de notre Eglise, y compris avec son Catéchisme, qui ne constitue pas la meilleure idée du Magistère pour annoncer l’Evangile dans le monde d’aujourd’hui. Mais enfin, tu as évidemment raison, c’est une question de bon sens.
    Il y a quelques années, les responsables de l’année de recherche et de discernement en vue du diaconat, me faisaient venir pour plancher devant les couples qui s’interrogeaient sur cette question : et si on n’est pas d’accord avec l’enseignement de l’Eglise sur tel ou tel point, on fait quoi ?
    J’essayais de témoigner comment je m’en sors avec la question que tu poses en termes de liberté et d’obéissance.
    Cela tenait en trois principes :
    – Etre capable d’expliquer objectivement la position officielle de l’Eglise : moins j’étais d’accord, mieux je devais connaître la question, et donc être capable d’expliquer cette position, y compris dans son argumentation. Ce qui demande un minimum de travail. On ne peut pas critiquer Humanae vitae si on ne l’a pas lue !
    – Expliquer les débats qu’il y a dans l’Eglise sur cette position officielle, parmi les chrétiens, les théologiens, voir même les évêques, quand c’est le cas. Expliquer aussi que, dans le domaine éthique, l’enseignement de l’Eglise a évolué, par exemple sur l’arme atomique ou sur la peine de mort.
    – M’autoriser à dire ce que je pense, en me situant dans ces débats, en veillant à ce qu’on ne puisse confondre mon opinion avec la position officielle de l’Eglise si celle-ci m’inspire critique ou réserves.

    Quand je suis devenu prêtre, mon frère qui était athée et anticlérical, m’avait dit que c’était un suicide intellectuel car, à ses yeux, je renonçais à penser pour devenir comme un permanent du PCF qui est chargé de défendre la ligne du parti. J’ai essayé toute ma vie d’éviter cet écueil. Je n’ai jamais renoncé à penser et je dois dire que mes études théologiques m’y ont beaucoup aidé ! Il n’y a qu’une seule foi, mais beaucoup de théologies et beaucoup de spiritualités dans l’Eglise. Tu en sais quelque chose ! Bien à toi, Jean-Pierre

    • Vos trois principes sont bien intéressants. Pendant 13 ans, dans mon diocèse, j’ai été chargée de la formation des laïcs (tous ceux qui voulaient approfondir leur foi) et de ceux qui recevaient des missions. J’essayais d’être fidèle à la manière de faire que vous décrivez : savoir dire et argumenter la position de l’Eglise et me donner la liberté d’exprimer mes questionnements mais de l’intérieur, pas en face de la position officielle. J’ai toujours eu la conviction que l’on ne pouvait participer à l’évolution d’une institution que de l’intérieur.

    • Votre propos et votre attitude, Jean-Pierre Roche, me paraissent s’inscrire dans une grande sagesse et une grande loyauté.
      Merci !

    • Merci Jean-Pierre pour ce commentaire que je partage sans réserve.
      Mais quelle misère d’une telle casuistiqque face à la misère du monde…

  • Je souscris pleinement à cet article de René et à son argumentaire ..Au delà de ses bonnes intentions ce jeune abbé comme ceux qui le soutiennent se trompent de méthode

    La CEF , gardienne de » la saine doctrine » est totalement dans son rôle en rappelant la position de l’institution ecclesiale sur l’homosexualité .On ne peut pas attendre d’un commissariat politique qu’il ne fasse pas son métier. Le fait que Jésus ne parle pas de pratiques sexuelles , que Paul condamne le libertinage sexuel et que l’interdiction de pratiques homosexuelles dans les textes de la première alliance relevent d’un enjeu de survie survie du peuple hébreux dans un contexte radicalement différents sont d’autres problèmes qui relèvent de l’adéquation entrel’Ecriture et ses interprétations et le contenu de la doctrine de l’église .

    Quant aux questions d’obéissance , et de la capacité d’un représentant de l’institution ecclesiale à tenir en son nom propre un discours différent de celui de son institution , elle sont vite résolues :
    Un clerc EST sa fonction , il n’y a pas dans le droit de l’église de possibilite de dissocier la personne de son statut . (Sacerdos in aeternum)
    Cela est différent pour les laics catholiques qui ne se sont pas engagés à l’obéissance envers leur évêque . Mais contrairement à la société civile l’église ne distingue pas le citoyen (baptisé)du fonctionnaire .(le clerc)
    Cet abbé n’est donc pas légitime à tenir publiquement un discours différent de celui de l’institution qu’il sert .
    Au risque de radoter , on ne peut pas dans un logiciel féodal , se réclamer des valeurs des droits de la personne humaine en matière de liberté d’expression .
    Je suis en total desaccord avec la doctrine de l’eglise sur l’homosexualité qui repose sur des interprétations discutables de l’Ecriture et doit olus à une conception de l’organisation sociale , mais ce n’est pas de l’interieur du système que l’on pourra la faire évoluer .Il ne le permet pas .
    Ce sympathique jeune prêtre n’a pas compris que du fait même de son statut clerical , sa liberté de parole publique n’existe pas .

    • Suite à votre message, trois questions me viennent:
      1. N’y a-t-il pas eu déjà des exemples d’évolution du système à partir de l’intérieur?
      2. Qu’est ce que la hiérarchie ecclésiastique fait de ces clercs qui sont plus ou moins en désaccords avec certaines de ses doctrines/dogmes? fait-elle comme si elle ne savait pas tant que ce n’est pas divulgué publiquement? Ont-ils une liberté d’expression seulement privée?
      3. Si ce prêtre avait dit sur Tik Tok « voici ce que dit le catéchisme et ce que cela signifie d’un part, d’autre part moi je pense autrement et voici pourquoi », cela aurait-il eu d’autres sortes de répercussions et lesquelles?

      • A Sophie ,

        1) Si l’on se réfère aux paradigmes de Hans Kung pour décrire les différentes formes qu’à prises l’église au cours de son histoire , c’est toujours influencée par la culture de la société dans laquelle elle devait annoncer l’évangile , donc de l’extérieur que l’église s’est transformée . Ces transformations ont été formalisées par des conciles depuis celui de Jérusalem . La Contre Réforme puis la crise moderniste ont exacerbé l’attachement de l’église catholique à son paradigme médiéval dont elle n’est toujours pas sorti et qui la handicape aujourd’hui fortement pour annoncer l’Evangile au monde de ce temps , engendrant des incompréhensions dues en grande partie à un cadre de pensée et à un langage qui rendent inaudible un message pourtant essentiel .

        2) Héritère de la pensée romaine , l’église fait semblant d’ignorer tout ce qui n’est pas rendu public et qui de ce fait n’engendre pas de scandale . Aussi tant que cela ne se sait pas , un prêtre peut vivre en couple hétérosexuel ou homosexuel , avoir des relations sexuelles avec des mineurs , et penser ce qu’il veut , la hiérarchie n’en tient aucun compte . pis , elle le couvre .Par contre dès que les faits sont rendu publics et risquent de remettre en cause le caractère absolu et la valeur inconditionnelle et contraignante de ses normes , la magistère agit avec célérité et violence , sans respect de la personne pour châtier et exclure « le coupable  »
        A titre d’exemple un prêtre de ma famille ayant été aumônier national des scouts de France a été écarté de ses responsabilités pour cause de « déviationnisme « , et laissé sans affectation pendant 50 ans sans qu’à aucun moment ses supérieurs ne s’inquiètent de son sort ; l’église a fait comme s’il n’existait plus .

        3) Si ce jeune prêtre avait bien distingué le discours doctrinal de son opinion personnelle , il aurait évidemment été sanctionné si cela faisait scandale . ( existence de nombreuses lettres anonymes de dénonciations à son évêque et à la CEF) Sinon l’institution aurait fait comme si sa parole n’existait pas .

        L’institution ecclésiale a ceci de commun avec toutes les institutions humaines : elle se moque éperdument de la réalité des faits , Seul ce et ceux qui remettent publiquement en cause son discours officiel sont susceptible de l’affecter .
        Comme dit un célèbre adage que l’église fait sien : c’est toujours un grand tort que d’avoir si publiquement raison .

        l

      • Oui, Sophie, il y a eu des évolutions . Dans les années 20, la hiérarchie à fortement poussé les prêtres à interroger leurs pénitents sur leurs pratiques contraceptives, parce qu’elle voyait bien que la natalité s’effondrait . Vient 68 et « Humanae vitae » : moins de 20% des épiscopats relaient correctement l’encyclique . L’Eglise a résolu le problème d’ une manière bien à elle: on n’en parle plus.

  • Je viens de lire en détail votre article. Merci et bravo. Ça fait du bien de lire une vision progressive et ouverte. Ça change des sempiternelles bondieuseries. On en a, ou plutôt, j’en ai un.peu assez de ces t3xtes prosélytes qui nous basdinnent avec la vraie foi genre communauté St Martin et consort. Non pratiquant, j’ai vraiment apprécié votre approche ouverte et pleine de bons sens

  • Cher ami (nous nous connaissons que par FB),
    |A titre strictement personnel et sans engager mes missions en Eglise ou dans des mouvements d’Eglise je ne peux qu’être en accord avec vous.
    Je dis souvent que l’Eglise, ou plutôt beaucoup de ses clercs… et de ses fidèles, feraient mieux de s’intéresser à ce qui se passe dans la tête de leurs ouailles plutôt qu’à ce qui se passe sous leurs couettes ! par exemple, le thème de la veuve, de l’orphelin et de l’étranger traverse toute la Bible. Et pourtant, combien qui se présentent comme de bons chrétiens pensent et disent que les étrangers devraient être rejetés à la mer ou que le mères célibataires sont responsables de ce qui leur arrive !
    J’avoue que le « Qui suis-je pour juger ? » du pape François a été d’un grand secours pour moi. Depuis, je distingue l’enseignement de l’Eglise qui est là pour nous dire quelle est la conduite à laquelle doit essayer de se conformer le chrétien, homme comme les autres et donc essentiellement faillibles, et l’amour miséricordieux auquel toute personne a le droit de la part de tout chrétien… par fidélité à enseignement de l’Eglise. Ça n’est pas la panacée mais ça m’aide.

  • Fréquentant le réseau social twitter depuis plus de 10 ans, je voudrais dire combien je suis inquiète, choquée… en tout cas en questionnement, devant le fait que les RS sont des lieux où l’on partage bien peu de réflexion et beaucoup trop des réactions à chaud, des arguments en « pour » et « contre » à partir d’un flash sur ce qui fait la vie de quelqu’un. J’ai donc vu arriver sur twitter quelques vidéos du PèreMatthieu et ce qui me parait dramatique c’est autant ceux qui condamnent (jusqu’à demander son excommunication à la CEF !) que ceux qui défendent, sans connaissance de l’histoire de Matthieu, de ses premiers pas dans le ministère presbytéral (2 ans d’ordination). D’un côté comme de l’autre, ils ne semblent pas se rendre compte de la pression qu’ils imposent à ce jeune prêtre et du fait qu’ils l’enferment ainsi dans une posture… dont je me demande bien comment il pourra ressortir grandi. J’ajoute, et c’est vrai pour chacun de nous, qu’il faudrait s’aider à voir comment bien se situer sur ces RS car c’est une nouvelle planète que les chrétiens ont aussi à habiter. Merci à René de reprendre la question par le fond

    • « Ce qui me parait dramatique c’est autant ceux qui condamnent ( jusqu’à demander son excommunication à la CEF)  » Que Monseigneur Hervé Giraud de Sens Auxerre soit extrêmement prudent avec ce jeune prêtre , qu’il ne l’enferme pas dans des débats inextricables qu’il se souvienne que dernièrement il y a eu plusieurs suicides de jeunes prêtres et plusieurs graves dépressions qu’il le regarde comme une perle très rare lui qui n’ eut que trois ordinations dans son diocèse au cours des 10 dernières années tr qui se plaignait amèrement du manque de prêtres dans son diocèse au point qu’il devra prendre en charge lui même une paroisse

      • Je me garderai bien d’entrer dans le débat que vous ouvrez ne connaissant le prêtre en question qu’au travers de cette affaire qui agite les médias et le monde catholique. Je ne pense pas que Mgr Giraud soit totalement irresponsable et sans capacité de discernement. Car à vous suivre le manque de prêtres justifierait finalement qu’on considère chacun d’eux – surtout s’il est jeune – comme un don du Ciel tellement inespéré, fragile et précieux qu’il faudrait surtout le laisser agir sans aucune contrainte. Je ne suis pas sûr que ce soit le meilleur, ni pour lui ni pour l’Eglise.

  • J’ai lu une fois avec attention et la question qui me vient d’abord est celle-ci: quelle raison pousse un évêque en exercice et une conférence épiscopale à sur-réagir ainsi? Comme il ne s’agit pas de l’alpah et l’oméga de la foi, j’ose une réponse raisonnable: ceux que dérangent ce que dit ce prêtre (et la manière dont il s’adresse avec succès à la jeunesse « hors les murs »), constituent le noyau dur du petit peuple dont les dons (à partir de trois zéro avant la virgule), font vivre l’institution.
    Je m’interroge, sur ce même sujet de l’argent -cachez ce sein ….-, sur la réaction de l’épiscopat au cas ou l’idée viendrait à un jeune prêtre d’estimer publiquement que la propriété privée, l’héritage et autres « valeurs » qui fondent la « science » économique depuis la révolution sont incompatibles avec l’anthropologie chrétienne. Ces propos « communistes », Gaël Giraud vient de les tenir (La Croix 31/08) et je parie que là, l’épiscopat va continuer de se taire.
    A propos de ce que dit Guy Legrand qui est très juste, … combien de jeune prêtre vont rester, en conscience, prêtre selon l’institution catholique? Encore une question que notre épiscopat ne peut pas se poser.

    • Ce n’est pas une réponse mais une question : qu’appelez-vous sur-réagir ? Je ne vois pas en quoi rappeler que l’Eglise invite à être présent sur le continent des réseaux sociaux et dire que la parole d’un prêtre n’engage pas toute l’eglise, serait surréagir ?

      • La confusion Église Institution est cause d’un nombre croissant de malentendus. Un prêtre est d’abord un homme, donc libre/responsable. L’institution qui le cadenasse est une médiocre mère. Cela, voyez-vous, l’Église le sait de plus en plus et de mieux en mieux comme l’indiquent statistiques et sondages. Que dire d’autre!
        Pour préciser, sur homosexualité, en commentaire le 28/08 à l’article du journal la Croix j’ai précisé ainsi ma pensée: « Ce prêtre aurait pu répondre à ce jeune, par exemple: Et toi quelle réponse fais-tu au fond de toi, en ce moment? C’eut été une manière de renvoyer ce jeune à sa conscience alors que les écrits du magistère sont du même tonneau que ceux de ces « pharisiens » que Jésus a recadré plus d’une fois, si l’on en croit les évangiles. Dieu tout-puissant n’est pas le Père des chrétiens, il est celui des philosophes, notre Père lui aime ses enfants comme ils sont, c’est pas du tout pareil. »

        • Il y a tout de même un problème à accepter un statut de clerc qui suppose une certaine obéissance, lorsqu’on entend rester libre de ses propos.

          • Libre/responsable, pas libre au sens que vous dites. Ce pb -de confiance- conduit inéluctablement au tarissement des sources … départs, en catimini ou avec tambours et trompettes (comme David Gréa « Touche pas à mon pote » dont j’ai connu la mère et échangé un peu avec elle, …) ou plus grave les suicides. Maintenir l’actuel statut de clerc et religieux -à vie- est contre nature et constitue un poison mortel pour l’Institution. La « collecte » de garçons de 10 11 ans pour remplir les petits séminaires a beau être du passé, l’état d’esprit demeure (St Martin, scouts d’Europe, garçons de chœur, JMJ, …). Si l’institution faisait confiance à ceux qui s’engagent, cela se saurait et elle n’aurait pas à poser des verrous. A cet égard et avec le recul, les deux promesses de ma vie ont été la promesse scoute à 12 ans et celle échangée yeux dans les yeux, peau contre peau, avec mon épouse à 24 ans. Rappel des mots de liberté responsable de la promesse scoute:  » … avec la grâce de Dieu, je promet de faire de mon mieux pour … ». Ça, c’est à hauteur d’Homme. Se croire différent et être vu ainsi par « les autres » a forcément des conséquences. Refuser de le savoir est, de la part de l’institution, une forme de suicide. Donner du temps au temps aurait été audible il y a 60 ans, il est trop tard désormais alors que, par exemple, c’est François qui a refusé de répondre à la proposition de David Gréa: rester prêtre d’une Église orientale et se marier. Ce refus de répondre, ce silence responsable, est de la même nature -lâche- que celui qui accompagne les plaintes pour abus et conduit inéluctablement à la disparition des clercs et religieux même si des ilots, radicaux, subsisteront encore quelques temps: il subsistait quelques « blancs » de la « petite Eglise » (opposés au concordat de 1801) il y a 20 ans dans le petit pays de sud bourgogne où je vis, il n’y en a plus.

          • Ce n’est pas aujourd’hui que je vais vous convaincre. J’ai passé l’âge de m’illusionner, autant que sur l’institution, sur le « basisme » d’un certain catholicisme. Je n’ai pas à juger David Gréa mais je connais de ses amis qui, eux, l’ont jugé sévèrement. Concernant l’abbé Matthieu la question pour l’heure est tout autre. Elle porte sur ce que peut ou ne peut pas dire publiquement un clerc, concernant la foi ou la morale, dès lors qu’il s’est engagé librement dans un statut qui suppose obéissance à son évêque. Moi je veux bien que tout spontanéisme pastoral généreux (en 68 j’ai connu les mao spontex) soit à respecter – et au moins à ne pas décourager – au nom de la jeunesse et de la pénurie des vocationss… Mais la réalité ne me semble pas forcément aussi simple. Et on ne règlera pas la question en prétendant que grosso modo tous les évêques sont des irresponsables ou des imbéciles, pieds et poings liés à l’institution. Moi, je ne mange pas de ce pain là.

  • Lorsque je m’interroge sur certains aspects de la vie du chrétien, je me réfère toujours à l’Ecriture, non pas à sa lettre, mais à son Esprit. Car il est évident pour moi qu’une application littérale de l’enseignement biblique a toujours été impossible mais surtout, elle caricature la Parole de Dieu à l’assimilant à un code moral.

    Lorsqu’on lit le Lévitique ou le Deutéronome, on constate sans peine que l’immense majorité des consignes rédigées à l’époque, si elles s’avéraient utiles pour la vie et l’organisation sociale du peuple hébreu, sont aujourd’hui complètement anachroniques et inapplicables (sauf par certains juifs intégristes) par l’homme et la femme de notre XXIe siècle. De même concernant les différentes épitres de Paul. Le contexte historique dans lesquelles elles ont été écrites ne peut être comparé à celui de notre époque et appliquer à la lettre les instructions de St Paul aujourd’hui relèverait de l’obscurantisme. Alors pourquoi donc l’Eglise s’est-elle permise de sélectionner et de maintenir certaines de ces instructions pour en faire un code moral et en a-t-elle ignoré les autres ? Toutes ces instructions sont bonnes et sages si on en retient l’esprit mais elles sont obsolètes et irréalistes si on s’en tient à la lettre.

    Il en va de même pour l’homosexualité. Pendant l’Antiquité, certaines pratiques sexuelles étaient extrêmement courantes et de notoriété publique, mais on ne faisait pas la différence le recherche de plaisirs sexuels désordonnés et l’homosexualité. Voilà pourquoi L’AT comme St Paul condamnaient tout en bloc. Il en est différemment aujourd’hui. Les pratiques de plaisirs sexuels déviants sont une chose. L’homosexualité en est une autre. En quoi l’homosexualité est-elle un péché, puisque c’est Dieu lui-même qui a permis que des hommes et des femmes naissent homosexuels. Ils n’ont pas choisi leur sexualité. Pourquoi donc les homosexuels seraient ils privés de ce qu’ont les hétérosexuels, à savoir de pouvoir vivre une relation d’amour durable et féconde ? Pourquoi Dieu ne bénirait il pas une telle union ?

    En revenant toujours à l’Ecriture, la meilleure explication sur la façon dont nous serons jugés, nous la trouvons au chapitre 25 de l’Evangile selon Matthieu. Lecture faite, il me parait invraisemblable qu’à son retour dans la gloire, le Fils de l’Homme ajoute à son jugement : « Les hétéros à ma droite ; les homos à ma gauche ». Voilà pourquoi l’homosexualité ne peut être un péché.

  • Merci, cher René, pour la publicité faite sur mon coup de gueule. Je n’ai pas ta patience (ni ton talent) pour écrire de longues analyses sur les dérapages de l’institution ecclésiale. Dérapage, car il y est quand même écrit que la prise de position du jeune abbé « dénature » le message de l’Eglise. Moi, je considère que ce sont eux qui dénaturent le message de l’Evangile (et d’ailleurs aussi du pape). Je voulais par ce coup de gueule signifier que ce genre de rappel à l’ordre fait des ravages incommensurables dans l’opinion. L’expert de la communication que tu es le sait bien. Quelles que que soient les maladresses du jeune abbé, il me semble à notre époque aberrant de continuer de ratiociner sur le triste article 2357 du Catéchisme officiel, sur ce que peut ou ne peut pas dire un clerc et sur la différence très jésuitique entre actes et tendances homosexuelles. Nos évêques vivent dans leur bulle et le monde se moque de ce qu’ils disent. Même en Allemagne où l’on bénit dans les églises des couples homosexuels…

    • Merci Dominique pour ce commentaire. Je partage ton exaspération concernant le fossé qui se creuse entre l’Eglise figée dans sa doctrine et une société sans doute disponible – sinon en demande – d’une vraie parole sur l’amour et la sexualité. Mais on a le sentiment d’évêques prisonniers de la loi et incapables de faire face à la pression d’une minorité ultra. Tu l’auras compris, ce jeune abbé m’est plutôt simpatique dans son souci pastoral à l’égard des jeunes. Mais je trouve sa maladresse dommageable car elle justifie par contre-coup toutes les surenchères.

      • A René
        Ce jeune abbé est du fait même de sa jeunesse excusable de ne pas avoir trouvé la juste pondération entre éthique de conviction (à fonder cependant sur des vérités factuelles) et éthique de responsabilité (ne pas outrepasser sa faible marge de manoeuvre) .
        Il n’empêche qu’il dessert malheureusement la cause qu’il pretend servir .
        Les moloch episcopaux vont le dévorer tout cru .
        La prochaine fois il sera plus avisé dans sa méthode.

        • Il dessert aussi la vérité et les homosexuels : je plaint sincèrement ceux qui, en l’écoutant, s’imaginent qu’ils peuvent entrer dans n’importe quelle église et y être accueilli avec bienveillance – cela ne sera pas toujours le cas.

          C’est tout le problème des curés « 2.0 » : de bonne foi ou par dessein, il proposent une image de l’église qui n’est pas conforme avec ce qu’elle est à l’intérieur. On les écoute, le discourt est attrayant, on leur fait confiance, mais quand on découvre la réalité on a vraiment le sentiment de s’être fait abuser.

          • A Emmanuel
            Oui , C’est en cela qu’il s’inscrit en réalité dans la logique clericale: être irresponsable , toujours , Ne jamais être engagé par le discours que l’on tient .

  • Je suis d’accord.
    Même pour une cause juste, on ne peut se passer de dire la vérité a savoir le rappel de la doctrine officielle de l’Eglise au sujet de l’homosexualité, quoiqu’on puisse penser par ailleurs de cette doctrine.
    Sinon, les choses ne sont pas claires et n’aident personne en définitive.
    « Transformer « cette doctrine par naïveté ? Conviction personnelle ? Volonté de ne pas rebuter ou de faire changer les choses ? ne la fera pas disparaître pour autant et oblige nécessairement les autorités ecclésiales ( c’est le role qui leur est dévolu ) à la reaffirmer.

  • Une fois encore, de quoi parle-t-on en parlant de l’Église ?
    « Église », un nom « propre » qui par définition a sa « propre définition ».
    Remarque : 30 secondes suffisent pour compter combien de fois sont écrits les mots suivants dans les commentaires ci-dessus :
    « Église » : 51 fois —— « Jésus » : 1 fois —— « Christ » : 0 fois —— « Dieu » : 5 fois.
    Alors quand on parle de l’Église, ne serait-il pas primordial de se préoccuper de ce à quoi nous invite Jésus ?
    JÉSUS, son fondateur nous demande de nous concentrer sur amour, fraternité …, et de le vivre au mieux.
    Si le verbe aimer ne doit pas se réduire à de la jouissance (alimentaire, sexuelle ou autre) cela ne signifie pas que tout bienêtre est un péché.
    L’enseignement du Christ ne nous invite-t-il pas à définir tout simplement le verbe aimer comme « désirer et contribuer au bonheur, la paix … de ceux que l’on veut aimer ».
    Déjà rappelé dans les commentaires d’autres articles, Jésus « invite » plus qu’Il ne « règlemente » : Vraie différence entre l’Église (de Jésus) et les religions … Ne pas confondre.

  • A Michel 19,
    Quand on parle de l’Eglise, on sait bien qu’on parle de l’institution. Je suppose que c’est ce dont veut également parler la CEF, même si elle aimerait sans doute représenter bien plus qu’une institution. Mais ce n’est pas l’Eglise mystique qui érige la doctrine et moralise.
    Que ce jeune prêtre ait le profond désir que l’Eglise-institution qu’il sert et à laquelle il doit obéissance par évêque interposé soit autre est compréhensible, mais il ne s’agit que d’un voeu pieux de sa part, qui peut en effet tromper, et donc faire naître de faux espoirs chez ceux qui donneraient du crédit à ses propos.
    La réalité est la suivante : l’Ancien Testament condamne l’homosexualité. La doctrine de l’Eglise aussi.
    Quand au Christ, personne n’en parle, et pour cause. Il n’a rien à voir dans les obsessions de l’institution.

      • Merci René. L’exégèse s’avère toujours absolument passionnante.
        Je reformule donc ce que j’ai écrit : l’Ancien Testament condamne l’homosexualité, en tant qu’il s’agissait d’une pratique païenne à l’époque. La doctrine de l’Eglise condamne l’homosexualité tout court.
        Question : le magistère s’est-il sérieusement plongé dans l’exégèse des textes de l’AT ?

        • Pour répondre à votre dernière question : j’imagine que oui ! Mais il y a des approches différentes dans l’exégèse. Pour résumer ma pensée je dirais volontiers que le divorce qui s’est instauré dans l’Eglise depuis des décennies vient du fait que l’institution continue à vouloir que les fidèles vivent moralement en conformité avec la lecture que cette même institution fait des Ecritures alors même que de plus en plus de fidèles partent du concret de leur vie, s’interrogent sur la manière de la rendre fidèle à ce qu’ils comprennent de l’Evangile et, lorsqu’il leur semble y avoir contradiction avec l’enseignement du magistère interpellent l’institution sur une exégèse revisitée des Ecritures. A la Révélation verticale et immuable prônée par les uns répond la demande des autres d’appréhender la Parole de Dieu à partir de ce qu’ils vivent et ressentent profondément.

          C’est à travers cette grille que je lis le débat autour de l’homosexualité. L’Eglise continue à inviter les personnes homosexuelles à la continence au nom d’une lecture immuable du livre de la Genèse alors que nombre de fidèles, témoins de ce que vivent les personnes homosexuelles et convaincus qu’elles ne trahissent pas le message de l’Evangile invitent le magistère à reconsidérer son interprétation de ce texte biblique de manière à réduire les contradictions.

          Car au fond, c’est pour moi une hypothèse crédible, déjà évoquée dans un article de 2012 de ce blog et reprise dans mon livre Catholique en liberté : ne peut-on considérer que les rédacteurs de la Bible ont posé un certain nombre d’interdits sexuels moins sous la dictée de Dieu qu’à partir du vécu du peuple Hébreu qui, pour survivre, avait besoin que la sexualité soit tout entière tournée vers la transmission de la vie ? Ce qui, dans la Bible, se traduit par des situations de polygamie, d’adultère, de relations avec des prostituées ou d’inceste… toutes favorables à la natalité, et des interdits pour toute forme de sexualité qui détourne de la reproduction : onanisme ou sodomie.

          Au fond, avec un peu d’audace ou simplement de liberté, on pourrait se demander si le petit peuple chrétien d’aujourd’hui qui entend partir de son expérience de vie pour « chercher Dieu » ne rejoint pas ce que fut l’expérience du peuple Hébreu partant de ses propres fragilités, des menaces existentielles qui pesaient sur lui… pour élaborer des lois ultérieurement déclarées « inspirées par Dieu » afin de mieux asseoir leur autorité. (Qu’on me comprenne bien, si Dieu a semé en chacun les « semences du Verbe », on peut tout à la fois affirmer que la Bible est le produit du travail de l’intelligence humaine en transcription de la Parole de Dieu entendue au plus profond d’eux-mêmes.)

          On peut se demander tout autant si les « interdits » qu’on continue de vouloir justifier au nom d’un prétendu dessein immuable de Dieu sur sa Création, au prix de contradictions insupportables avec ce que les gens comprennent de l’Evangile, n’illustrent pas surtout l’incapacité de l’institution à nourrir un travail permanent d’intelligence de la foi à travers une exégèse renouvelée.

          Si après ça je ne suis pas dénoncé à la Congrégation pour la doctrine de la foi… c’est à désespérer des professionnels de la délation, « défenseurs de la vraie foi » auxquels j’ai eu à faire lorsque je dirigeais la rédaction de Pèlerin.

          • > l’incapacité de l’institution à nourrir un travail permanent d’intelligence de la foi
            Voire un travail d’intelligence tout court.

            C’est un peu comme si le magistère avait transposé l’idée de « fin de l’histoire » de Fukuyama au Catholicisme : « tout à été démontré dans les siècles précédents, nous possédons la morale et la foi parfaite et éternelle, il n’y a plus rien à chercher, emballons tout ça dans le CEC et focalisons nous sur la pastorale ». Les encycliques ne servent alors qu’a rappeler a l’ordre (HV) ou tenter d’arrondir les angles (Amoris Laetitia), sans jamais vraiment remettre en cause le fond.

            Bien sur ça ne marche pas, et ça ne marchera pas. Tant qu’il n’y aura pas de schisme, l’Eglise continuera d’être un royaume divisé, et comme le dit Jésus : « Tout royaume divisé contre lui-même est dévasté, et toute ville ou maison divisée contre elle-même ne peut subsister. »

          • A René ,
            1° Vous posez la question de fond qui divise effectivement l’Eglise dans l’approche de la foi :
            – L’Ecriture est elle le récit d’une expérience de découverte toujours à poursuivre?, Est elle l’expression symbolique du sens religieux que des hommes animés par l’Esprit donnent à leur histoire ?
            – Ou est elle la révélation « d’en haut  » venant progressivement donc historiquement mais toujours « surnaturellement dévoiler des vérités divines éternelles ?

            2° Bien sûr l’institution ecclésiale défend la deuxième proposition , y compris en s’opposant aux apports de la connaissance avérée .
            Elle envisage la Révélation exclusivement comme un savoir et non comme le déchiffrement d’une expérience de vie dans laquelle les croyants ont reconnu au cours de leur histoire la présence aimante et agissante de Dieu dans leur vie .
            Ces se traduit concrètement par le clivage objet de cet article sur des questions très concrètes sur l’homosexualité notamment .
            Si la foi est exclusivement un savoir alors ce qui se vit entre deux personnes dans une relation homosexuelle n’a pas à entrer en ligne de compte puisque l’on sait à l’avance ce qui est bon et ce qui est mauvais ; cela est vrai aussi pour la question des divorcés remariés etc …
            Si la foi est la découverte de la présence agissante de Dieu dans nos vies , ce n’est plus la forme de la relation qui est importante , mais ce qui est concrètement vécue en son sein et dont il serait téméraire d’exclure à l’avance que Dieu ne s’y révèle pas à travers la qualité humaine de cette relation .

            3° La difficulté aujourd’hui est que ,comme vous le soulignez , nos sociétés ont évolué et continuent à le faire très rapidement dans la manière de rechercher le bien . . C’est à partir de l’expérience vécue que se développe aujourd’hui la réflexion éthique et donc chacun , en se fondant sur sa propre expérience est amené à y participer .
            L’église en est restée au modèle d’une soumission à une parole (aussi justifiée soit elle ) qui tombe d’en haut selon le modèle médiéval qu’elle a adoptée à la fin du premier millénaire après Jésus Christ .

            4° Ces approches antinomiques , de la foi à l’intérieur de l’église , de la recherche du bien au sein de l’ensemble de la société , contribuent à creuser le fossé entre l’église et la société et entre le magistère et les fidèles au sein de l’église
            Et ce d’autant plus que ces approches antinomiques ont des conséquences sur l’organisation collective et la gouvernance de nos institutions . tant sociétales qu’ecclésiales .

            Peut être comprendrez vous , cher René, pourquoi je ne crois pas à une réforme de l’intérieur de l’institution ecclésiale : parce que je ne la pense pas prête pour diverses raisons que l’on pourrait développer à renoncer à sa vision de la Révélation comme un contenu définitif venant d’en haut qu’elle a pour mission de dire et de transmettre .Ce qui fonde et justifie toute la vision qu’elle a d’elle même et qui selon elle ne dépend pas d’elle . (cf la position de J P II sur l’ordination des femmes : l’église n’a pas le pouvoir , n’a pas la liberté de remettre en cause ce que le Christ a explicitement voulu ) .
            Le système s’est lui mëme verrouillé .

          • Guy, vos commentaires sont toujours intéressants, mais vous dialectisez en caricaturant les choses en les opposant.
            Je ne suis pas certain que les deux positions que vous décrivez soient aussi antinomiques que vous le pensez.
            Pourquoi ne pas admettre que l’Ecriture est une Parole révélée traduite en mots humains par des hommes faisant l’expérience de cette Révélation ?
            En outre, faire remonter les choses au « modèle médiéval » selon une expression qui vous est familière et semble signifier pour vous l’obscurantisme n’est pas très exact ; les discussions sur le Canon des Ecritures sont bien antérieures.

          • Je trouve qu’à propos de la question importante, majeure sans doute, à savoir « avec quel état d’esprit convient-il de recevoir ce qu’on nomme, un peu vite, révélation? » Je trouve, en ce moment quand j’en ai le loisir une approche intéressante dans « Jesus, l’encyclopédie » et, pour le peu que je l’ai feuilletée, dans la suite « Après Jésus ». Les regards croisés interdisciplinaire, la mise en relief de quelques uns des points en débats, l’approche des limites du savoir ouvrent des horizons qui manquent au magistère. L’institution pourra-t-elle accepter que l’unité qui est centrale dans sa manière d’être puisse se faire dans une honnête diversité. Pour prendre un exemple, en rapport avec le sujet qu’est l’impur et le pur, pourquoi tant de dissonances -même de contradictions- selon les traductions de la Torah et de la Bible sur les termes jeune-femme, jeune-fille et vierge.
            Qu’il est facile de mériter d’être dénoncé à … en effet, merci René.

          • A Michel,
            Je me suis posé la même question que vous en écrivant mon post . Il ne s’agit pas de dialectique entre expérience humaine et vérité descendue d’en haut dans l’appréhension de la révélation , mais de complémentarité avec une priorité donnée à l’expérience ; c’est toute l’herméneutique de la première alliance et notamment du livre de l’Exode .
            L’événement Jésus Christ réussit pleinement cette synthèse entre les deux approches et c’est à cause de Jésus que je suis chrétien .

            Quant au qualifié « médiéval « , il n’est aucunement péjoratif mais exclusivement descriptif d’un modèle d’organisation sociale et d’un cade de pensée . Le paradigme culturel de l’église est resté bloqué à celui de cette époque ou il était parfaitement en adéquation avec la société civile .
            Imaginez ce que serait l’organisation de l’église aujourd’hui si elle était en phase avec la culture de notre société .

          • Tenir compte du contexte culturel des époques de rédaction de la Bible est bien sûr indispensable, éclairant, et permet d’éviter les lectures fondamentalistes. Mais il me semble que le sens de ces textes ne se trouve pas dans la seule recherche de ce que « voulaient dire » les auteurs à leur époque. « Le pouvoir-dire du texte est supérieur à son vouloir-dire » disait Lévinas. L’exégèse actuelle en est bien consciente et diversifie les approches qui prennent en compte le texte tel qu’il est, dans sa dimension littéraire. Et cela est fort parlant !
            Ainsi pour le chapitre 19 de la Genèse dans lequel il est question de Sodome, une analyse littéraire attentive indique comme ressort principal du texte le verset 9 : « Et ils dirent (NDLR : les gens de Sodome à propos de Loth) : « Cet individu est venu en émigré et il fait le redresseur de torts ! Nous allons lui faire plus de mal qu’à eux. »
            Voilà ce qui me semble visé dans ce texte : le refus de l’hospitalité et de l’altérité, l’exclusion et la violence qui s’en suivent. L’homosexualité est une problématique seconde dans ce texte, d’ailleurs ce qui est en cause ici c’est le viol.
            Ce texte suit l’épisode où Abraham accueille les visiteurs aux chênes de Mamré ; on y retrouve les mêmes « anges visiteurs » qui permettent de relier les deux récits. Pour mieux en montrer le contraste ? A Mamré en effet : l’hospitalité et la vie contre toute attente ; à Sodome, la violence contre les étrangers, la mort et la désolation. Diptyque qui met en récit le grand fil rouge de la Bible : « Choisis donc la vie ».
            Y a-t-il message plus actuel ?

          • Oui, Guy, je suis plus en phase avec votre dernier commentaire plus nuancé qui voit les choses en terme de complémentarité plutôt qu’en terme d’opposition.

            Pour ce qui est de la période médiévale, je pense que les choses étaient infiniment moins univoques et plus foisonnantes que vous ne le laissez penser.
            C’est sûr en tout cas dans un domaine que je connais mieux qui est celui de la liturgie.
            C’est plutôt la période tridentine qui a rigidifié.

  • En réponse à Anne Mardon :
    Je comprends parfaitement votre réponse, et sans la moindre critique on peut penser que :
    – Si beaucoup sur ce site savent qu’on parle de l’institution, pas tout le monde, notamment dans les églises dans lesquelles beaucoup croient y entendre la voix de Dieu (c’est grave ?).
    – Et comme vous le soulignez, ne serait-ce pas une occasion d’utiliser ce site (merci René) pour bien rappeler que l’Église n’est pas mystique, mais celle de Jésus, vrai homme et donc clairement compréhensible par les hommes (même si le NT appelle lui aussi à effort d’interprétation … à partager si possible ! … avant de l’appliquer !).
    – Vous écrivez :  » … qui peut en effet tromper … » – Ah oui ! Et Ô combien les religions nous ont trompés, y compris celles se disant « christiennes ».

  • Bonjour à tous,

    depuis 10 ans que je lis votre blog et ses commentaires j’ose me lancer…

    Suite à la lecture de votre article, j’ai été jeter un oeil sur le site padreblog. Et là, quelle ne fut pas ma surprise de tomber en premier sur un article critiquant « traditionis custodes »… A ce jour, y a-t-il eu un rappel de la CEF auprès desdits abbés à respecter l’obéissance pontificale ?

    Bien à vous,

    PA

    • C’est bien toute l’ambiguïté de ce site, très influent dans le milieu « observant » (pour reprendre les classifications de Yann Raison du Cleuziou) que de prétendre se contenter d’annoncer la foi de toujours et le Magistère de l’Eglise, « garanti » en quelque sorte par le port de la soutane et du col romain de ses contributeurs (ils ont leur rond de serviette sur KTO), tout en prenant des libertés qui les trahissent. Je ne sais pas si la Cef, à ce jour, est intervenue. Mais je sais que dans et hors du diocèse de Versailles telle ou telle prise de position des padre avait suscité bien des interrogations. J’espère que le nouvel évêque, Mgr Luc Crépy, sera attentif au problème soulevé – comme à Sens avec le l’abbé Matthieu mais dans une sensibilité pastorale opposée – par le statut de la parole de ses prêtres sur les réseaux sociaux. Un vrai chantier pour les évêques.

  • En vous lisant René, je me demande si l’une des clés de l’attitude du magistère n’est pas qu’il craint (peut-être inconsciemment) d’être débordé par la réflexion des simples fidèles. Il perdrait dans ce cas son pouvoir sur les consciences, et serait en quelque sorte réduit au rôle de distributeur de sacrements.

    Il y aurait beaucoup à dire sur quantité d’arguments présentés comme indiscutables.
    La notion de fécondité : un couple peut être fécond bien autrement qu’en mettant des enfants au monde.
    La notion de « naturel » : qu’est-ce qui est naturel, surnaturel, contre nature ? Si on veut être entièrement naturel, supprimons la recherche médicale, évitons les soins un peu sophistiqués, laissons souffrir et mourir, puisque c’est la nature.
    Allons d’ailleurs au bout du raisonnement : Dieu a-t-il créé des êtres monstrueux, contre nature, en donnant la vie aux homosexuels ? On sait qu’il y a des animaux homosexuels, nulle question ici de choix, de culture ni de « vice ».
    Quant à la continence à laquelle serait appelée les homosexuels, c’est une aberration. Si des consacrés se font, par choix et parce qu’ils le peuvent, eunuques pour le royaume de Dieu (on voit d’ailleurs que c’est tout sauf simple et peut faire beaucoup de dégats sur soi et les autres), de quel droit amputer des personnes d’une partie si importante de ce qui les constitue ?….

    Au bout du compte : « qui suis-je pour juger » et décider de ce qui est bon et bien pour l’autre, qui est doté d’une conscience personnelle, à partir du moment où il n’attente pas à la liberté et à l’intégrité de l’autre ?

    Pour en revenir au jeune père Matthieu, sa position est tout sauf confortable et l’on peut se faire du souci pour lui, puisque comme vous le disiez très bien même le soutenir joue contre lui et les opinions qu’il défend.

    • Anne vous avez en partie raison dans le propos de votre premier paragraphe. Mais sincèrement, je ne pense pas que consciemment, l’institution dans sa globalité (je ne parle pas de tel ou tel évêque en particulier) réagisse en termes de défense d’un pouvoir. Ils sont persuadés d’être les dépositaires d’une Tradition qui ne leur appartient pas et donc qu’ils n’ont pas liberté de modifier ou d’interpréter autrement. Pour eux il s’agit d’abord, sincèrement je crois, d’une question de fidélité à Dieu et à leur devoir d’obéissance. Le goût du pouvoir sur les âmes, si férocement dénoncé par Dostoievski dans la Légende du Grand Inquisiteur, à mon sens, ne vient qu’après.

      Sans compter que la « réflexion des simples fidèles » n’est pas à l’abri de l’erreur comme le montrent tous les populismes, s’il n’existe pas un minimum de confrontation à la pensée des autres… donc également de l’institution elle-même.

      • Je vous crois sans peine René quand vous dites que la plupart des évêques désirent être fidèles à la tradition et sont persuadés, ce faisant, de l’être à Dieu.
        Ce qui m’interroge constamment est la difficulté, pour eux donc, et pour le fidèle, d’avoir une pensée personnelle libre et de l’exprimer ouvertement, ailleurs que dans certains ilôts.

        Quant à la confrontation aux autres pensées, je ne peux qu’être d’accord avec vous.

        • A Anne et René ,
          C’est bien là la force du système . La plupart des évêques hormis quelques cyniques sont persuadés que la transmission de l’évangile ne peut passer que par le canal de l’institution ecclésiale .
          L’adage » hors de l’église point de salut  » est toujours leur impératif catégorique . C’est pourquoi le fait d’avoir une pensée personnelle n’est pas concevable : Je ne dis jamais ce que je pense , mais uniquement ce que l’église pense , me disait un jour un évêque qui était persuadé qu’en niant la validité de sa propre expérience , de sa propre pensée il était d’autant plus fidèle à la mission qui lui était confiée .

          • J’ai connu pas mal d’évêques dans ma vie dont plusieurs ne correspondent pas à ce que vous décrivez.
            Pour revenir à l’homosexualité il faudrait regarder non seulement la parole des évêques mais leurs actes. Certains ont initié dans leur diocèse des rencontres entre personnes homosexuelles, pas pour leur déverser le CEC mais pour écouter ce qu’ils vivent.
            Rappelons aussi qu’il y a, me semble-t-il, un tiers des évêques français dont la formation initiale est celle de théologiens moralistes. Alors je veux bien croire qu’une partie d’entre eux redisent sans cesse la même parole convenue mais ils ne sont pas tous des perroquets quand même ; et certains d’entre eux doivent bien être en recherche pour renouveler le discours.
            Ce qui est sûr c’est qu’en fac de théologie, les moralistes mesurent toutes leurs paroles. J’en ai eu Un qu’il fallait écouter au 3ème degré pour comprendre que chaque catholique peut utiliser les ressources de sa « conscience éclairée » pour prendre ses décisions dans ce domaine de la sexualité ! Au 1er degré la liberté n’existait pas trop.
            J’ai connu aussi des étudiants, souvent des laïcs, qui faisaient des travaux sur des points délicats (homosexualité, PMA) avec une grande liberté de parole et qui étaient bien notés, par les mêmes profs qui bridaient leur propre liberté de parole, si leurs propos tenaient la route.
            On en est là mais cela veut dire aussi qu’on peut avancer. Peut-être suis-je trop optimiste ?

          • A Grimonprez .
            La limite entre l’espérance et l’optimisme est toujours floue .
            Si j’ai sans doute trop tendance à privilegier le poids des structures sur l’influence des individus dans le fonctionnement de l’église, il me semble que vous adoptez la démarche inverse .
            Le fait même que vous mentionniez l’autocensure des profs de théologie dans leur expression , me conforte dans mon approche .Qui lit les travaux des étudiants même bien notés et quelle autorité ont ils dans la vie de l’église ?
            En .notant bien ces étudiants ces profs essaient de compenser leur absence de liberté .Pour reprendre une phrase de Jean Sulivan , ils sont dans le même situation que la prostituée affirmant rêver d’un mariage en robe virginale .

  • Pingback: 4 Septembre 2021 | Au fil des jours, dans la suite du Synode de la famille

  • A Grimonprez,
    En admettant que la liberté de pensée et de parole existe, il y a tout de même un problème de taille : elle est toujours dissidente par rapport au discours officiel, quasiment inamovible et excluant.
    On va considérer et traiter les homosexuels avec « charité » , fermer les yeux par « charité » sur le fait que des divorcés remariés communient… on peut multiplier les exemples.
    Je ne sais pas vous mais si l’appartenance à l’Eglise et l’accès « légitime » aux sacrements était importants pour moi, je n’aimerais pas avoir affaire à cette charité-là, qui me tolérerait tout en me discriminant, aux yeux de l’institution comme, du coup, d’une quantité de fidèles.

    • Anne il y a du vrai dans ce que vous écrivez. Mais la dissidence n’est pas l’exclusive de l’Eglise catholique. Il existe, Dieu merci, des dissidents dans l’armée, la police, la justice, l’université. Et je ne vois pas comment on peut éviter qu’un dissident ait un statut de dissident, forcément « en marge » et de ce fait mal perçu voire malmené. Par comparaison, il y a aussi aujourd’hui des dissidents du tout sociétal, de l’individualisme triomphant, du « tout se vaut », donc en quelque sorte des dissidents de la dissidence et je puis vous affirmer qu’ils ne sont pas mieux traités… par les partisans de la dissidence !

      Sauf à opter pour un principe d’anarchie généralisée dans tous les domaines qui rendrait toute dissidence vaine, je ne vois pas comment sortir de la situation que vous décrivez et, en toute franchise, je ne sais même pas si c’est souhaitable. Car cela signifierait qu’il n’y a plus de loi, plus de principes communs.

      Je pense que la vraie question aujourd’hui, pour l’Eglise notamment, est de situer, par rapport à la doctrine et au dogme, où se situe le seuil de dissidence. Posant l’hypothèse que ce seuil est susceptible d’évolution au cours des siècles. Et je crois que, pour l’institution crispée sur une tradition qui ressemble fort à une auberge espagnole ou à un magasins d’antiquaires, refuser de regarder cette réalité en face est la meilleure manière de produire ce que vous décrivez : c’est-à-dire des prises de paroles dissidentes qui séduisent par leur liberté de ton mais qui ne sont pas pour autant toutes pertinentes du seul fait de leur dissidence.

      • René, je comprends parfaitement ce que vous dites. J’espère que vous me pardonnerez de continuer à « chercher la petite bête », voyez-y plus de l’intérêt et une envie de comprendre de ma part qu’une condamnation ou même une critique. De plus, je réfléchis en écrivant et dis peut-être des bêtises ou inexactitudes.

        L’un des problèmes pour moi est que l’institution ecclésiale, du fait même qu’elle doit transmettre l’enseignement du Christ, par sa doctrine s’immisce dans le plus intime de l’être humain. Elle se situe donc essentiellement au plan moral et juge, ou contrôle, ou se mèle de tout ce qui constitue un homme, de ses moeurs -jusque dans le secret de l’alcôve – jusqu’à la fine pointe de son âme. Or cette institution, il n’y a pas si longtemps que je l’ai compris, est effectivement une institution comme une autre, avec ses règles etc… D’où une tension souvent insoutenable.
        Par exemple, faire de la relation homosexuelle un péché, donc porter dessus un jugement moral, alors que l’homosexuel est simplement lui-même, me paraît grave et extrêmement culpabilisant.

        La dissidence, dans laquelle on peut mettre sa fierté, son honneur, peut ètre vue comme un devoir, une évidence, dans toute autre institution que l’Eglise. Dans l’Eglise, ça me semble autre, plus ambigu, compliqué puisqu’on ne peut transiger avec les « vraies valeurs » énoncées.
        Mais je ne suis pas sûre d’être claire.
        Il est possible que le « seuil de dissidence » dont vous parlez soit une piste, il serait en tout cas bon que l’Eglise y vienne peu à peu. Pas à la vitesse d’un escargot en fin de vie tout de même ☺.

      • A René
        L’antique Israel avait apporté une réponse institutionnelle intéressante la question de la dissidence en séparant les rois et les prophètes et en reconnaissant aux second un rôle essentiel quand bien même leur sort était d’être banni ou précipités du haut des murs de Jérusalem tant ils dérangeaient l’ordre établi y compris au nom de Dieu
        J’aime particulièrement le dialogue entre le prêtre royal Amatsia et le prophète Amos . ET à la fin de ce dialogue , Amatsia , m^me s’il demande à Amos d’aller prophétiser ailleurs lui reconnait d’une certaine manière la qualité de messager de Dieu .
        Les institutions publiques ou privées qui se veulent efficaces savent aussi ménager une place à leur dissidents parce qu’elles ont perçu que leur message aussi dérangeant soit il à un moment de l’histoire , devait aussi être écouté , ne serait ce que pour assurer la pérennité de l’institution dans le futur .Ce qui ne les empêchent pas de les maltraiter .

        L’Etat lui même lorsqu’il a créé les directions de l’environnement s’est situé dans cette logique qui consiste à penser que les emmerdeurs d’aujourd’hui sont aussi des garanties pour demain .
        Je me souviens de la remarque méprisante d’un préfet à qui je rappelais les contraintes de protection du milieu marin dans le cadre d’un dossier d’exploitation de ressources du sous sol , me dire faute d’arguments légaux pour justifier une autorisation qu’il comptait bien quand même délivrer : De toute façon si les enjeux de cette réunion étaient importants , je ne vous aurai pas invité . Mais il nous avait quand même invité à cette réunion .

        D’accord aussi avec René pour dire que la dissidence et le statut de victime dont certains aiment se parer ne prouve strictement rien quant à la pertinence du discours que l’on tient .

    • Il me semble que vous m’avez mal lu… car je pense justement qu’il y aura une évolution du discours officiel ; elle a déjà eu lieu pour les divorcés remariés

      • A Grimonprez
        Désolé , il m’avait complètement échappé que les divorcés remariés pouvaient avoir
        de plein droit accès aux sacrements de l’eucharistie et de la réconciliation . .
        Si vous considerez comme une avancée le fait que l’eglise ldise vouloir les accueillir tout en les tenants à l’écart de la table du repas , je ne partage pas votre avis .
        J’y vois au contraire une hypocrisie supplémentaire. Un signe de cette inauthenticité structurelle de l’institution ecclesiale que dénonçait déjà Hegel .

        • Absente tout le WE je vois que René a apporté des éléments.
          Amorim Laëtitia ouvre, pas un boulevard mais une petite porte pour que des divorcés remariés soient accueillis officiellement à la table eucharistique. Pour l’avoir vécu dans ma paroisse, je peux témoigner que ce n’est pas rien, ni pour le couple en question, ni pour ceux qui suivront, ni pour la communauté paroissiale. La règle n’a pas changé mais la pratique de la règle peut changer avec les attitudes pastorales affirmées : accompagner, discerner et intégrer.
          On ne peut pas attendre de l’Eglise catholique qu’elle traite le divorce comme une bonne chose ! J’ai des divorcés plein ma famille ils ne disent jamais que c’est un heureux moments de leur vie, même s’il est parfois plus sain/saint de divorcer que de donner aux enfants de vivre dans le drame permanent. Comme cela a été dit, le fait que ce soit un sacrement pour l’Eglise catholique limite le changement de la règle. Autant que je sache Amorem Laëtitia s’était inspirée de la pratique de l’Eglise orthodoxe.
          J’ajoute encore que lorsque des prêtres donnent une juste place à la règle (elle est seconde par rapport à la conviction de foi que l’amour de Dieu pour tout humain ne cessent pas, et heureusement pour tous) il y a, de fait, des divorcés remariés qui, en conscience, vont communier, sans se voir refuser la communion ( ce que d’autres font je le sais aussi). C’est pareil cela se vit dans ma paroisse de banlieue.
          Le primat de la conscience (formée) est souvent rappelée dans le catholicisme (même dans Humanae vitae) mais bien mal vécu.
          On sait bien aussi que les plus rigoureux sur les diverses règles peuvent être ceux qui ne les respectent pas pour eux-mêmes, voir même sont des criminels (prêtres pédophiles). Rien n’a changé de ce point de vue depuis le temps où Jésus se battaient contre les scribes et pharisiens qu’il traitait « d’hypocrites » et cet affrontement l’a conduit à La Croix.
          Ma conviction la plus profonde sur toutes les questions autour des diverses règles, c’est que si l’on était plus imprégnés de la manière de vivre et d’agir de Jésus, lui l’homme libre par excellence, tout irait mieux.
          Je crois que je garderai l’espérance jusqu’à mon dernier souffle, non pas que je sois aveugle sur tout ce qui devrait changer dans l’Eglise catholique, mais parce que je crois que nous avons été créés intelligents, capables de trouver dans l’Evangile de quoi diriger nos pas, personnellement sûrement et communautairement probablement.

      • Si, il me semble vous avoir bien lu (si c’est à moi que vous répondez). Je n’ai pas répondu point par point.
        Pour ce qui est de l’évolution du discours officiel, je ne le vois pas, mais je dois reconnaître que je ne suis pas spécialiste et ne suis pas toute l’actualité ecclésiale. Tout ce que je peux dire est que le discours que j’entends ne varie pas, sauf individuellement, comme je l’ai toujours entendu aussi depuis mon entrée dans l’Eglise il y a 40 ans.
        Mais vous semblez dire qu’il VA évoluer. Alors c’est tant mieux.

      • @Grimonprez : pour ce qui est des divorcés remariés, il ne me semble pas que que l’article 1665 CEC ait été abrogé : https://www.vatican.va/archive/FRA0013/__P51.HTM
        1665 Le remariage des divorcés du vivant du conjoint légitime contrevient au Dessein et à la Loi de Dieu enseignés par le Christ. Ils ne sont pas séparés de l’Église, mais ils ne peuvent accéder à la communion eucharistique. Ils mèneront leur vie chrétienne notamment en éduquant leurs enfants dans la foi.

        Même s’il leur reste – comme aux homosexuels – la possibilité de la continence (la continence, pour le magistère, c’est la solution miracle qui absout tout, c’est a croire que chaque absence d’orgasme est une joie pour Dieu) : https://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_con_cfaith_doc_19940914_rec-holy-comm-by-divorced_fr.html
        « Cela implique concrètement, lorsque l’homme et la femme [divorcés remariés] ne peuvent pas, pour de graves motifs – par exemple l’éducation des enfants – remplir l’obligation de la séparation, qu’ils prennent l’engagement de vivre en complète continence, c’est-à-dire en s’abstenant des actes réservés aux époux' »(8). Dans ce cas, ils peuvent accéder à la Communion eucharistique, l’obligation d’éviter le scandale demeurant toutefois. »

        Amoris Laetitia ne fait que poser un vernis pastoral sur tout ça, sans rien changer au fond : aux prêtres de se débrouiller avec tout ça ! Je me demande d’ailleurs dans quelle mesure cette schizophrénie demandée aux prêtres n’est pas en partie responsable du faible taux de vocations (sauf bien sur dans les milieux ou l’on s’en tient a la doctrine pure et dure).

        • On peut faire ce type de lecture, surtout si on a envie de démontrer qu’il n’y a définitivement rien à tirer de l’Eglise. CQFD
          Mais on peut aussi lire de manière positive l’ouverture pastorale d’Amoris Laetitia. Si elle était à ce point insignifiante, aurions-nous eu droit à ces procès en hérésie nourris contre François par une frange extrême d’excités ?
          J’ai écrit ici bien des fois depuis 2013 que François, d’évidence, n’était pas un réformateur. Et qu’il y avait une forme d’impasse à jouer l’ouverture pastorale là où c’était la doctrine qu’il fallait réinterroger. Je reste sur cette analyse.
          Pour autant, j’observe que contrairement à ce que vous affirmez, des prêtres nourrissent désormais une autre attitude tant vis-à-vis des divorcés remariés que des couples homosexuels. Au plan des grands principes, je vous l’accorde, cela ne change rien. Mais pour les personnes, si. N’en faisons pas les otages de nos débats et de nos combats.

          • A René ,
            Effectivement vous posez bien la question : Y a t il encore quelques chose à attendre ,non pas de l’Eglise qui est bien vivante , mais de son institution ?

            Y a t il quelque chose à attendre de ceux qui fustigent en permanence la société civile au motif qu’elle ne prend pas suffisamment en compte les plus faibles et qui dans le même temps , en toute connaissance de cause ont couvert ou se sont tus quand ils avaient connaissance de faits de pédocriminalité ?

            L’institution ecclésiale est sur le défensive et maintenant qu’elle ne peut plus imposer ses oukases à l’ensemble de la société , elle recoure aux techniques de marketing du capitalisme le plus sauvage pour tenter quand même de se vendre .
            On m’a suffisamment reproché , vous aussi , de ne pas croire que l’institution est capable de s »‘amender , et de se réformer .
            Comment peut on aujourd’hui faire confiance à des gens qui n’ont cessé de mentir et qui multiplient-lient les belles paroles (fruits parait il d’un travail » colossal « ) dont on attend toujours la traduction concrète en actes auprès des victimes et en réformes structurelles pour limiter drastiquement la survenue de ces crimes .
            Un récent et pénible débat sur le blog de Y Hamant a montré qu’on nous demande toujours de « croire  » sur parole sans jamais apporter de preuves et que se montrer sceptique ; c’est remettre en cause les personnes de ceux qui sont chargés d’effectuer le sale boulot au sein de l’institution ecclésiale .
            La seule conclusion que l’on puisse en tirer est que la culture du débat est toujours totalement étrangère au magistère de l’église .

            Alors si le choix est entre l’attente sereine de preuves tangibles de la part du magistère avant de se prononcer et un à priori de bienveillance qui sera exploité et instrumentalisé par une institution prête à toutes les forfaitures pour sauver sa respectabilité : c’est à chacun en conscience qu’il appartient de la faire .
            Une seule certitude : l’invocation d’un statut de « malgré nous  » lorsque l’on pourra enfin juger sur les seuls actes du magistère en faveur de la lutte contre la pédocriminalité des clercs , ne sera pas recevable .

          • Je crains qu’une partie de vos propos n’échappe aux lecteurs de ce blog qui ne sont pas présents sur Facebook.Et comme je viens de mettre en ligne une « conclusion » personnelle aux débats que vous évoquez, où j’évoque les débats à venir sur ce blog, je voudrais, ici, rappeler les faits essentiels et donner cette conclusion.

            Le 3 septembre, Yves Hamant publiait le post suivant : « Portrait de la directrice de la communication à la Conférence des évêques de France (CEF) qui vient d’entrer en fonction le 1er septembre. Venue du marketing et après dix-huit ans dans des firmes américaines telles que Gillette ou Universal, Karine Dalle vient de diriger pendant cinq ans la communication de l’archevêché de Paris. Elle compte s’appuyer sur l’abbé Pierre-Hervé Grosjean : consécration du Padre Blog, dont il est le cofondateur, par la CEF ? »
            https://www.la-croix.com/…/Karine-Dalle-voix-libre-tete…

            S’en est suivi un échange extrêmement vif qui dépasse, au moment où j’écris ces lignes, les 170 commentaires, dont certains de Karine Dalle elle-même.

            Voici le texte que je viens de poster, quelques minutes avant de répondre à ce commentaire :

            « Loin de moi la prétention à vouloir conclure, d’une quelconque manière, un débat que je n’ai pas initié mais auquel j’ai modestement participé, jusqu’à ce que le dialogue me paraisse sans issue. Je remercie Yves Hamant de l’avoir ouvert et m’étonne par la même occasion qu’aucun média chrétien ne se soit senti autorisé à soulever le problème que pouvait représenter l’entrée dans l’équipe de communication de la Cef d’une personnalité forte, aussi marquée que l’abbé Grosjean. J’ai dit, plus haut dans cet échange, combien ce questionnement me semblait légitime. J’observe qu’il a été soulevé « par la base ».

            Je viens de relire la totalité des contributions. Si je mets à part, sans les minimiser pour autant, les soutiens affirmés à la nouvelle Directrice de la communication de la Cef, Karine Dalle, elles font apparaître un profond clivage. Il y a, d’un côté, un groupe de commentateurs, connus comme bon observateurs ou acteurs de la vie de l’Eglise, qui, tout en soulignant la pertinence du questionnement soulevé par Yves Hamant considèrent que l’heure n’est pas aux procès d’intention et que l’équipe qui se met en place doit bénéficier pour le moins d’une bienveillante neutralité. Jusqu’à ce qu’on puisse l’interpeller sur son action.

            Un deuxième groupe, plus radical, me semble engager le procès de la communication de la Cef elle-même en son principe. L’institution ecclésiale étant structurellement cléricale et donc suspecte des déviances qui ont conduit aux scandales que nous savons, toute communication émanant d’elle est par principe nulle et non avenue. Puisque des « communiquants » institutionnels ne peuvent être par définition que les porte parole consentants – et recrutés sur ce profil – d’une institution décrédibilisée. Il y a là du : « pas de liberté (de communication) pour les ennemis de la liberté » puisqu’ils sont en plus eux-mêmes privés de liberté personnelle d’expression.

            Très honnêtement, je ne vois pas comment, dans les semaines qui viennent, ces deux groupes pourraient bien débattre entre eux de manière tant soit peu constructive et apaisée – ce qui ne semble pas être pour certains un critère pertinent – puisqu’ils se situent sur des logiques antagonistes. Pour ce qui me concerne, envisageant de commenter dans un proche avenir la publication du rapport Sauvé, les réactions de la Cef, du monde catholique et de la société civile, ainsi que le lancement de la consultation du synode sur la synodalité… je suis bien décidé, sur mon blog personnel et par ricochet sur mon compte Facebook, à ne pas laisser un débat pluraliste, nécessaire et légitime, s’enliser ou se faire récupérer.

            La violence de certains propos tenus sur ce fil, sans aucune censure de la part d’Yves Hamant, l’a conduit à présenter ses excuses à Karine Dalle. J’aurais eu la même attitude. Peut-être, au fond, est-ce une chance, pour elle, d’avoir connu cet épisode cévenol en début de mandat. Il illustre le fait que le réchauffement climatique n’épargne pas le monde catholique. L’augmentation récente de quelques degrés de la température moyenne de la « mer Eglise » pouvant être lu comme signe avant coureur de phénomènes paroxystiques. Nous y sommes. Souhaitons que chacun sache garder son sang froid. »

          • A René
            Ma seule question ,est dans ce « débat » la suivante : Que dit le choix de ses personnes de la position de la CEF quant à sa posture de communication ?
            Cette question qui m’a valu une bordée d’injures, validées par défaut par Monsieur Hamant , ne peut manifestement pas être posée . J’en prend acte

          • Ce n’est pas l’idée que j’ai perçue dans vos interventions puisque vous insistiez sur le fait que les personnes ne comptaient guère au regard de la mécanique même de communication qui, de toute manière, les assujettit puisque le rôle d’un communiquant est de porter la parole de ses patrons.
            Et très honnêtement, pour peu que j’essaie d’être objectif, vous n’avez plus été agoni d’injures que vous n’avez été vous même impitoyable avec tel ou tel, expliquant d’ailleurs que c’était là la loi de l’engagement et du combat de convictions.
            Pour le reste et pour ce qui me concerne je ne décide pas avant l’échéance, et in abstracto, quel commentaire – ou quel comentateur – sera validé ou non. Simplement je respecterai la finalité de mon blog qui est d’ouvrir largement le débat dans le respect des personnes. Ce que je n’ai pas vraiment trouvé dans le fil d’Yves Hamant.

          • A René Oui j’ai combattu durement , mais sans haine ni mépris pour les personnes .Je n’ai injurié personne .Mais si vous ne faites pas la différence entre le combat d’idées et la mise en cause des personnes…..

          • Alors comment qualifieriez-vous ce commentaire posté sur Facebook sous votre signature : « En se deshonnorant pour acheter le droit d’assister à ce spectacle en trompe l’œil que sont les ag de la CEF , Monsieur Hamant a fait un marché de dupe .. »

  • Dans ce long débat vraiment très intéressant et presque serein, notamment sur la parole et la condamnation des « autorités » épiscopales, il me semble que l’on n’a évoqué nulle part les multiples exemples d’homosexualité dans le clergé lui-même. A-t-on déjà oublié les informations de « Sodoma  » ?
    Un corps schizophrène à ce point peut-il encore être crédible même dans l’annonce de l’Evangile du Seigneur?

    • C’est vrai ! Mais il faut bien sérier les problèmes. Et l’on pourra vous répondre en « haut lieux » que la tolérance dont l’homosexualité ecclésiastique peut faire l’objet n’influe en rien sur le jugement moral « objectif » que porte l’Eglise à son sujet. Ce qui, je le reconnais, est parfaitement hypocrite… mais cohérent ! De même qu’on peut fermer les yeux sur certaines pratiques d’euthanasie tout en ne souhaitant pas sa dépénalisation au regard des conséquences qu’elle pourrait entrainer. C’est, depuis longtemps, la position de Marie de Hennezel (voir notamment le monde du 15 février 2012) comme c’est la mienne ! Mais oublions momentanément le débat sur la fin de vie. Restons sur notre sujet.

      • Voici ce que je lis sur la toile, en résumé, à propos de la question de l’homosexualité dans le protestantisme français :
        Il existe des tensions entre la branche « historique » et les évangéliques (qui font une lecture littérale de la Bible), mais l’Eglise protestante Unie de France a donné son feu vert en 2015 à la bénédiction des couples homosexuels.
        Sans doute parce que chez les protestants le mariage (non institué par le Christ lui-même) n’est pas un sacrement, mais un « contrat humain et social » passé à la mairie, qui ensuite peut recevoir une bénédiction par le pasteur. Sans doute aussi parce que l’acte homosexuel n’est pas jugé comme un « péché ».
        Quant au divorce et remariage, il peut avoir lieu plusieurs fois (c’est vrai même chez les orthodoxes !)

        Pour la question que vous soulevez Alain, nous sommes dans le « Faites ce que je dis, mais pas ce que je fais ». Ça surprend, évidemment, et le mot est faible. Mais je crois que je n’ai personnellement jamais pensé à prendre les pasteurs de l’Eglise comme exemples pour ma vie, même quand j’étais pratiquante, même quand je portais l’habit.

        • Chez les orthodoxes effectivement on peut se remarier plusieurs fois mais les conditions pour cela sont d’une sévérité extrême et la célébration se fera presque en catimini , en tout cas rien à voir avec le premier mariage.
          Par ailleurs, Anne, »faites ce que je dis et ne faites pas ce que je fais » n’est-ce pas dans un certain sens se reconnaitre tout simplement pécheur?

  • Merci cher René. Mais quelle valeur morale donner à une réponse hypocrite voire à un pareil sophisme même tombés de ce que vous nommez « les hauts lieux »? Aucune à mon sens.
    . D’autant que certains clercs qui continuent de répandre un jugement moral soi-disant « objectif » (en fait qui condamnent), tout en étant eux-mêmes homosexuels-et c’est leur droit- ne sont tolérants que pour leur propre personne. On est donc au cœur du sujet.

  • Si, bien sûr Dominique.
    C’est donc bien ce que je disais : il ne faut pas prendre comme modèles les différents pasteurs et peut-être d’ailleurs ne leur est-il pas demandé de jouer ce rôle.
    En même temps, charger les autres d’un fardeau qu’on ne porte pas soi-même est sévèrement dénoncé par le Christ.
    Pour ce qui est de se reconnaître pécheur (humilité donc si je vous comprends bien ?), il ne faudrait pas que cela serve systématiquement de justification à toutes les dérives possibles. Puisque je suis pécheur de toute façon, eh bien allons-y donc, je serai un pécheur continuellement pardonné voilà tout. C’est oublier un peu vite sa propre responsabilité.
    Quant à la cohérence ou l’essai de cohérence entre paroles et actes, c’est un effort constant et qui me semble archi-nécessaire pour qui s’immisce dans l’âme de l’autre.

    • Anne, pour ma part je prends pour modèle certaines personnes qu’il m’a été donné de croiser sur mon chemin;ce qui ne m’empêche pas pour autant d’être moi malgré tout,car prendre un modèle ne veut pas dire pour autant qu’il convient de l’imiter en totalité car il n’y a qu’une personne à imiter « prenez-moi pour modèle, mon modèle à moi c’est le CHRIST »
      Autrement ,bien sûr qu’il peut être trop facile pour se dédouaner à bon compte de se contenter de se reconnaitre pécheur sans rien faire d’autre… mais il peut être trop fa cile également de s’autojustifier en prenant à témoin sa propre conscience comme si celle-ci ne pouvait en aucun cas être viciée

      • Dominique, vous me renvoyez à ma conscience et vous avez raison. Celle-ci doit être sans cesse interrogée et il est malhonnête de juger celle de l’autre sans faire ce travail incessant sur soi-même.
        Toutefois, l’énorme différence est que moi je n’ai pas charge d’âme, ni accepté le redoutable (et intrusif d’une certaine manière) rôle de définir ce qui est bien ou mal pour l’autre, ni l’autorité qui va avec ce rôle.
        En ce qui me concerne, les prêtres ou évêques peuvent coucher avec qui ils veulent, à partir du moment où l’autre est un adulte, et consentant (ce qui n’est pas forcément évident vu justement leur position d’autorité morale). Là où ça se complique, c’est qu’ils sont tenus de prêcher et d’imposer en même temps aux autres l’exact contraire de ce qu’ils vivent, parfois de façon notoire.
        Bien sûr, Dieu leur pardonnera et au fond ils s’arrangent peut-être ainsi avec leur propre conscience qui est avant tout je crois ecclésiale.

        Ce qui me gêne toujours dans cette position (celle de « nous sommes tous pécheurs » de toute façon), qui est belle en soi puisqu’elle fait appel à la miséricorde de Dieu, est que c’est pour ainsi dire une histoire de moi à moi : ma conscience et Dieu qui ne la condamne pas. Comme pour l’une de mes connaissances qui entrait dans des colères noires devant ses employées, les laissant tremblantes et nauséeuses pour 2 jours, n’avait ensuite de cesse d’aller se confesser et tournait ainsi complètement la page pour elle-même avec un grand soulagement.
        Pour en revenir à ces pasteurs dont nous parlons (pas tous bien entendu, seulement ceux qui sont évoqués ici), ils ont une charge redoutable et ne peuvent à mon sens culpabiliser et exclure l’autre pour un problème de morale qu’eux-mêmes ne parviennent pas à suivre. Libre ensuite à leurs ouailles de les écouter ou non évidemment et vous devinez comment je me situerais si j’étais à leur place… Mais ça risque de devenir alors du grand n’importe quoi, sans compter les dégats provoqués chez l’autre, s’il est un tant soit peu scrupuleux.

        • Anne, si ne doivent parler de ce qu’il faut ou non faire en fonction de l’Evangile que ceux dont les actes sont en accord avec ce dernier il me semble que ce sera alors le très grand silence
          Quant au personnage odieux avec ses subordonnés dont vous parlz il me semble sue seul Dieu ,et son confesseur lequel pouvait le cas échéant lui refuser l’absolution ,peut juger de sa sincérité
          Quant à la sexualité, l’Eglise a pris un risque énorme en entrant dans la chambre devait-elle pour autant s’en abstenir complètement???

          • Oui Dominique, je pense qu’elle devrait s’abstenir de juger en ce domaine (hormis s’il n’y a pas de respect de l’autre), tant elle n’est pas claire par rapport à elle-même et charrie aujourd’hui encore de préjugés qui n’ont pas grand-chose à voir avec la personne et le message du Christ.

            Bien sûr , ce n’est que mon opinion.

          • >que ceux dont les actes sont en accord avec ce dernier
            Disons qu’il importe que l’écart ne soit pas excessif.
            Je me sent légitime à recommander à mes grands enfants de ne pas trop boire d’alcool en soirée, je ne le serais pas a leur demander de ne pas boire du tout.

            >l’Eglise a pris un risque énorme en entrant dans la
            >chambre devait-elle pour autant s’en abstenir
            >complètement???
            Je répond catégoriquement à cette question : OUI. C’est évidement facile à dire a posteriori, mais OUI elle aurait du – et elle devrait aujourd’hui – s’abstenir de toute recommandation pratique sur ce sujet. A la fois pour le bien du monde – parce que c’est un sujet qu’elle ne maîtrise pas suffisamment – et pour son bien à elle – parce qu’a chaque fois qu’elle le fait, c’est sa parole qu’elle décrédibilise un peu plus, et c’est elle même qu’elle fracture.

  • Mgr Éric de Moulins-Beaufort : « Notre épreuve, aujourd’hui, c’est que, dans une société qui se préoccupe d’élargir toujours davantage le champ des possibles, nous avons le rôle ingrat de dire ce qui est bien ou pas. Or, nous ne pouvons pas en rester là : le cœur du christianisme n’est pas de dire ce qui est défendu mais d’annoncer à chacun que son histoire personnelle avec Dieu n’est jamais terminée, quoi qu’il ait fait. »
    (…)
    « Nous devons tenir une ligne de crête. En termes théologiques et spirituels, nous sommes un petit nombre au service du bien et du salut de tous, et non pas une réserve d’Indiens fiers de l’être. Nous portons quelque chose de la totalité. »
    https://www.la-croix.com/JournalV2/LEglise-ecoutee-est-elle-entendue-2021-09-06-1101173908

    ou encore ici :
    https://www.la-croix.com/Religion/Quel-avenir-catholicisme-France-2021-09-06-1201173941

    • Entre autres citations de cet entretien croisé entre Mgr de Moulins Beaufort et l’hisorien Guillaume Cuchet, je retiens ces deux qui me semblent être en résonnance, avec les débats de ce blog :

      Guillaume Cuchet : Il y a toujours eu des divisions dans l’Église. C’est inévitable, même si un peu d’œcuménisme interne pourrait ne pas être inutile. On a parfois le sentiment que le déclin général avive la conflictualité interne en son sein, comme si les catholiques tenaient absolument à se faire payer deux fois le prix de la sécularisation, une fois tous ensemble face à la société et une deuxième fois entre eux.

      Mgr É. de M.-B. : D’abord, nous n’allons pas déserter les lieux où nous sommes encore présents. Ensuite, puisque nous ne pouvons pas être présents partout, tout le temps, nous devons l’être partout au moins de temps en temps. L’Église, d’ailleurs, n’est pas présente seulement à travers les prêtres et les institutions mais à travers des personnes. Comment accompagner et soutenir ceux et celles qui, là où ils se trouvent, cherchent à vivre du Christ et en lui ? Des laïcs formés, nourris, soutenus, sont capables d’engagements de foi et d’actions au nom de leur foi.

      • – Guillaume Cuchet décrit très bien la situation interne à l’église catholique .
        -E de Moulins Beaufort aurait pu , dans sa réponse, employer le mot « sacerdoce commun des baptisés  » qui, me semble t il correspond parfaitement à sa préoccupation et repose sur une base doctrinale solide : Lumen Gentium .
        Mais comme chacun sait , Vatican II en ce qu’il définit l’Eglise d’abord comme un peuple de baptisés n’est qu’une vieille lune d’une génération dont il convient de se débarrasser au plus vite .

        • Oui, Guy, E. de Moulins-Beaufort n’emploie pas le mot, mais c’est bien de cela qu’il s’agit dans l’économie générale de son entretien ; du coup, je ne comprends pas votre coup de patte à la fin de votre commentaire.

      • A Michel et à René,
        Pour moi nous sommes là au coeur du problème. Que le catholicisme s’arroge le droit d’affirmer « ce qui est bien ou pas ». Je n’ai pas connu l’Eglise d’avant le concile et, vu ce qu’on m’en avait dit, j’ai été étonnée, après coup, d’avoir été bien souvent confrontée à cela : on me disait ce qui était bien ou pas, pour la vie des autres (non-croyants compris), pour ma propre vie.
        Je veux bien entendre que ce n’est pas le tout du catholicisme, comme le dit EMB, ou que j’ai mal compris, ou que je n’ai pas eu de chance, pas fréquenté les « bons milieux », ou que je n’ai pas la foi. Il n’empêche que je l’ai vécu, il y 40 ans comme il y a quelques années. Je dis cela sans aucune agressivité et je m’efforce de ne pas avoir de parti pris ni d’opinion toute faite.
        Il y a donc un gros effort à faire par l’Eglise pour respecter, si ce n’est soutenir, « l’histoire personnelle de chacun avec Dieu ». Et en effet, laisser aux non-clercs une place non pas subalterne, mais essentielle, puisqu’eux vivent dans le « monde » serait sans doute l’une des solutions.

        • Je crains, Anne, que dire le bien et le mal ne soit la tentation de toute institution détentrice d’un peu de pouvoir, qu’elle soit de nature religieuse ou non.

          Dans Catholique en liberté, j’ai consacré un chapitre à illustrer comment en régime démocratique, alors que le rôle du Parlement (législateur) est de dire le permis et le défendu, l’opinion en déduit qu’il se prononce en termes de bien et de mal. Le légal devenant moral.

          A chacun de savoir décrypter et d’agir en conscience.

          • Personnellement je tique aussi sur cette «  prétention » que je trouve quand même assez «  inouïe «  d’un «  petit nombre «  à dire le bien et le mal pour tous ; non pas parce qu’il ne faudrait pas en soi le faire ( au nom de quoi l’interdire ?) mais parce que les bases du jugement moral ne sont pas les mêmes pour l’Eglise et pour l’homme actuel.
            1 ) Étant donné que la conscience morale commune connaît en général les interdits fondamentaux, issus d’ailleurs en grande partie d’une sécularisation des commandements bibliques et n’a donc pas besoin de l’institution pour les lui rappeler.
            2 ) Et, de plus, que l’humanité ( sans l’Eglise et même souvent contre elle ) a fait des progrès politiques et moraux décisifs avec les déclarations des droits de l’homme, de l’enfant etc..La mémoire de ce divorce en est restée.
            3) L’Eglise a donc perdu progressivement sa suprématie morale, en partie par sa faute. Avec «  Humanae vitae «  incompréhensible, en tout cas pour moi et beaucoup d’autres etc…) le fosse n’a fait que s’accentuer.
            C’est bien joli en effet de prétendre dire ce qui est «  bien «  au nom de grands principes basés sur une conception de l’homme et de la femme ( de la sexualité ) qui peut être discutable. Et encore faudrait il que ces interdits ne soient pas dangereux ( interdit du préservatif ).
            Mais ce n’est pas au nom des grands principes que l’homme actuel se détermine. C’est en fonction de la considération première du mal fait à autrui et du respect de sa propre personne comme de celle de l’autre.
            Les bases du jugement moral n’étant donc pas les mêmes,comme déjà dit, il ne peut exister qu’incompréhensions réciproques et dialogues de sourds.
            4 ) Pour finir, il me semble que l’on ne peut poser que des interdits à peu près respectables car compréhensibles par le plus grand nombre, comme l’interdît du meurtre. Sinon on parle dans le vide.

            Je parle uniquement du point de vue de la morale, pas du point de vue des «  vertus «  chrétiennes telles la foi, l’espérance et la charité qui sont d’un tout autre ordre.
            Il y a donc de plus en plus besoin de réflexions théologiques allant vraiment à la racine des choses ( et non de discours évasifs ménageant la chèvre et le chou) prenant aussi en compte les mentalités actuelles, ceci bien sûr à mon humble avis.

            Toujours à mon humble avis, je ne comprends pas plus pourquoi il faudrait « former » des laïcs ( que veut dire concrètement cette formule ? ) pour qu’ils puissent être le plus à même d’être tout simplement des chrétiens. Il y aurait donc des «  super chrétiens «  et le tout venant ?

          • Vous me paraissez bien optimiste, Marie-Christine, quand vous faites confiance en « une conscience morale commune » qui serait universellement partagée et que vous décrivez un monde idéal qui aurait « fait des progrès politiques et moraux décisifs avec les déclarations des droits de l’homme, de l’enfant, etc. »…

          • A Marie Christine ,
            EMB déploie sa réflexion dans le cadre de pensée qui est encore actuellement celui de l’église :
            Le salut de tous est assuré par le petit nombre de ceux qui ont reçu l’onction sacrée .Comme ce nombre n’est plus suffisant , il fait une concession à la modernité en déléguant à des laics « formés  » , c’est a dire formatés .Il raisonne toujours en fonction d’une conception de l’église conçue comme une pyramide de castes . D’ou mon post sur le non emploi très révélateur de l’expression « sacerdoce commun des baptisés « pourtant juridiquement valide .C’est tout le cadre de pensée de EMB qui n’est plus comprehensible par nos mentalités actuelles
            Mais ils refuseront toujours de changer de modèle car c’est leur vie toute entière qui est fondée sur cette forme d’église . C’est un clivage culturel qui a des enjeux existentiels pour les clercs qui constitue le verrou majeur qui empêche toute évolution .

          • Guy, vous tirez à vous, je veux dire à vos thèses, les propos de Mgr Eric de Moulins-Beaufort en faisant un contresens complet sur ce qu’il dit.
            Quand il dit : « nous sommes un petit nombre au service du bien et du salut de tous, et non pas une réserve d’Indiens fiers de l’être », il ne parle pas du « petit nombre de ceux qui ont reçu l’onction sacrée » mais du petit nombre de chrétiens dans notre société aujourd’hui et qui sont au service de la « totalité » de la société, et met en garde contre la tentation du repli identitaire.
            Il ajoute aussi plus loin : « L’Église, d’ailleurs, n’est pas présente seulement à travers les prêtres et les institutions mais à travers des personnes ».

        • Mais Anne, l’Eglise ne « s’arroge pas le droit d’affirmer ce qui est bien ou pas », elle ne fait que reprendre ce que disait déjà le Décalogue et ce que le Christ dit dans la péricope de Matthieu 25 sur le jugement dernier !

          • Bien sûr Michel.
            Mais c’est loin d’être aussi simple concrètement car le décalogue a toujours donné lieu à des interprétations diverses. Il ne pouvait d’ailleurs en être autrement puisqu’il énonce des principes généraux qui ne peuvent tels quels s’appliquer à toutes les situations humaines. Par exemple «  le catéchisme de l’Eglise catholique », justement à propos des relations homosexuelles, interprète bien d’une certaine façon, si je ne m’abuse, le commandement divin de l’interdît de l’adultère ( y incluant l’ interdit de la masturbation, de la contraception etc…), comme il y a eu diverses interprétations de l’interdît du meurtre au cours de l’histoire.
            Quant aux déclarations des droits de l’homme, oui, elles traduisent bien, selon moi, un progrès moral décisif de l’humanité, même si elles sont effectivement, dans les faits, loin d’être respectées et très souvent trahies. Elles tracent un idéal certes mais un idéal nécessaire à poser. C’est leur but. D’autant plus qu’elles s’appuient sur une conception de la dignité de toute personne humaine issue du judéo-christianisme.
            Il ne s’agit donc pas d’optimisme qui pourrait s’avérer «  beat » mais d’un constat.
            De même que oui, il existe une conscience morale commune qui consiste dans cette sagesse de bon sens : «  ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas que l’on te fasse. » Et je ne crois pas que l’Eglise l’ait jamais reniée puisqu’elle est une des «  marques évidentes de l’ouvrier ( Dieu ) sur son ouvrage ( l’homme ) «.

            La charité, quant à elle, ( Matthieu 25 ) va bien au-delà des interdits moraux puisqu’elle depasse le cadre de l’interdit. Comme déjà dit, elle est d’un tout autre ordre. Ainsi on pourrait longuement réfléchir sur le sens de cette phrase de Pascal: «  la véritable morale se moque de la morale «. Et pourtant on ne peut accuser ce dernier de prôner l’immoralité.

          • Non seulement l’Eglise n’a jamais renié la règle d’or de la morale commune « Ne fais pas à autrui… » mais elle l’a positivé en « Fais à autrui ce que tu voudrais qu’on te fasse à toi même », notamment à travers l’injonction à « Aimer son prochain comme soi-même. » Cela étant il y a loin, bien évidemment, du principe à la réalité. Mais la réalité, c’est aussi nous – et non les seules institutions – qui la mettons ou non en œuvre.

          • C’était l’Evangile de ce matin, René :
            « Ce que vous voulez que les autres fassent pour vous,
            faites-le aussi pour eux. » (Luc 6, 31)

      • Oui, René, on ne peut tout citer, mais cet entretien est très intéressant et vos extraits comme les miens en illustrent la qualité de la réflexion.

          • « on n’a de rôle que celui qu’on a choisi » vous en êtes sûr,car il ne me semble pas que Pierre voulait absolument la charge que le Christ lui a imposé de même que Jonas dans l’Ancien Testament et tant d’autres d’ailleurs

  • >nous avons le rôle ingrat de dire ce qui est bien ou pas
    On n’a de rôle que celui que l’on a choisi.
    La société n’impose pas à l’Eglise de lui dire ou est le bien et ou est le mal. C’est l’Eglise elle même qui se pense dépositaire de cette mission, et c’est une partie des fidèles qu’elle câline en leur disant qu’ils cochent bien les cases (par ailleurs discutables).

    Et si l’église abandonnait le « ministère du bien et mal » pour lequel elle ne me semble pas avoir de mandat divin et ne rencontre pas de succès, pour se focaliser à faire des disciples de toutes les nations ?

  • J’ai voulu récemment souligner des vérités évidentes (pas les miennes !) qui contribueraient à éclaircir ce débat, en rappelant que l’Église est celle « inaugurée » par Jésus, trop absent de ce débat (sauf de la part d’Anne et qq autres).
    Je ne vois pas pourquoi mon dernier commentaire, très court, a été éliminé !
    René m’a qu’il ne le retrouve pas, sauf que lorsque je le renvoie, il est refusé comme étant un « doublon ».
    Si trop pénible (le commentaire ou moi ?), j’eus aimé que l’on me dise pourquoi, René ou d’autres. C’est ça la communion fraternelle. Donc à défaut, je me retire.

    • Je ne suis pas dans les algorythmes de mon blog… et j’imagine que si vous aviez recopié le texte en fin de ce commentaire… il serait passé ! Sachez en tout cas que son absence ne procède d’aucune censure. Envoyez-le moi par mail (via le lien Conctactez-moi) et je l’insèrerai).

      • Je viens de vous « renvoyer » le mail que je vous ai déjà envoyé le 4 septembre à 9 h 44, accompagné de 2 commentaires en pièces jointes.
        J’espère ne pas être classé en « indésirable » !

        • Michel, je viens de retrouver votre mail parmis les spams de mon ordinateur. Avec ce commentaire de mon opérateur : « Pour votre sécurité, nous avons désactivé les liens présents dans cet e-mail. » Je vous avais affirmé n’avoir rien censuré et je vois que votre dernier commentaire évoque encore l’hypothèse selon laquelle vous seriez jugé « indésirable »…

          Voici votre texte : (pour ce qui est de votre lettre à un ami de BaPE 19 je publierai le cas échéant les extraits que vous me fournirez.)

          Merci à Anne, René et aussi Guy Legrand qui résument tellement bien (pour moi) d’où vient la difficulté de s’accorder.

          Concernant « la pensée personnelle libre », ne s’agit-il pas tout simplement de « la foi ». Ma foi, c’est ce que je « choisis » de croire, en faisant le tri de tout ce que j’entends et lis partout, et en me centrant sur Jésus qui me semble expliquer tellement simplement comment l’homme pourra construire un MONDE DE PAIX.

          À défaut d’être capable de bien le vivre, au moins faisons-en notre « cap ».

          René souligne la question de la « fidélité à Dieu ». Oui, à chacun d’être fidèle à ce qu’il pense savoir de Dieu (c’est sa foi), mais de là à l’imposer à autrui « en Son nom » … ? – À chacun d’avoir sa réponse.

          • Michel19, il me semble que la foi est moins une question de savoir sur Dieu qu’une question de confiance dans la Parole de Dieu faite chair en Jésus Christ.

  • Si on ne reconnait plus à l’Eglise le droit de dire selon elle ce qui est bien et ce qui est mal tout simplement on n’est plus catho alors…ce qui ne veut pas dire pour autant qu’il est obligatoire de suivre sans jamais aucune réserve l’opinion de l’Eglise

    • @Dominique : cela ne m’avait effectivement pas échappé. Techniquement, tous les baptisés dans la foi catholique sont catholiques puisqu’on ne peut pas « effacer le baptême » (quand bien même on demanderait à être radié des listes).

      Pratiquement : pas simple de savoir qui est Catholique, ou si on l’est réellement. A partir de quel niveau les « réserves sur l’opinion de l’Eglise » deviennent trop encombrantes pour être Catholique ?

      Si l’on peut facilement être catholique en tenant pour vrai ce qu’enseigne l’église sans pour autant pouvoir/vouloir l’appliquer dans notre vie, est-ce que cela a toujours un sens de se penser catholique dès lors que l’on ne tient pas pour vrai ce qu’elle enseigne ?

      D’ou ma suggestion : que l’église réduise drastiquement le périmètre de son enseignement – en terme d’entreprise on parlerait de « se recentrer sur le core-business ». je pense qu’elle y retrouverait un souffle, une légitimité et des bases solides.

      • C’était le vœu exprimé par Jean Delumeau dans son « Le christianisme va-t-il mourir » toujours disponible. Réconcilier les chrétiens autour d’un noyau dur de la foi, laissant à chacun le soin de compléter cette « croyance commune » en fonction de sa sensibilité personnelle.

  • Michel, c’est donc alors le christianisme qui s’arrogerait ce droit ? Et de quel droit ? La référence au Christ n’est pertinente que pour les chrétiens. Bien sûr il faut les écouter – au même titre que tous les autres. Mais on dirait parfois qu’ils réagissent comme s’ils étaient persuadés d’être les seuls à détenir les clés de la vérité, du bien et du mal. Je comprends parfaitement qu’on soit attaché au Christ – moi-même…mais cette « foi », pour les autres, n’est qu’une croyance.
    Comme le dit très justement Dominique, les chrétiens ont bien le droit d’avoir des idées arrêtées sur la morale – encore qu’ils sont eux-mêmes divisés pour ne pas dire déchirés à ce sujet.
    Ils ont le droit tant qu’ils n’essaient pas d’influer sur les autres (par exemple le gouvernement, donc la société dans le cas de la manif pour tous).
    Vraiment je ne désire pas polémiquer, juger etc… je trouve simplement cette conversation passionnante et remercie René de nous donner l’occasion d’échanger sur ce que nous portons au plus profond.

    • Anne, je ne sais auquel de mes commentaires vous répondez ?
      Je vous écrivais précédemment :
      « Mais Anne, l’Eglise [ou donc alors le christianisme, si vous préférez] ne « s’arroge pas le droit d’affirmer ce qui est bien ou pas », elle ne fait que reprendre ce que disait déjà le Décalogue et ce que le Christ dit dans la péricope de Matthieu 25 sur le jugement dernier ! »
      Le Décalogue appartient au patrimoine de l’humanité, le Christ aussi qui touche au-delà des seuls chrétiens, et je ne vois pas pourquoi il faudrait relativiser le message chrétien au bénéfice d’autres traditions religieuses ou athées.

      • Ler Décalogue appartient d’autant plus au patrimoine de l’humanité, qu’on en trouve le contenu, formulé en des termes très voisins, dans d’autres écrits antérieurs comme le Code d’Hammurabi. Ce qui semble conforter l’enseignement de Vatican II sur la présence de « semences du Verbe » dans le cœur de tout être humain depuis les origines, quelle que soit sa culture ou sa religion.

        • A Michel, René…
          Non, il n’y a pas à relativiser le message chrétien au profit des autres, mais à les entendre tous et essayer de comprendre chacun les vues de l’autre.
          Et je pense de toute façon que le religieux ne doit pas intervenir dans les problèmes de société, communs à tous, sauf par ce dialogue entre tous. Je n’aimerais pas avoir des dirigeants se revendiquant d’une quelconque religion et agissant au nom de celle-ci.

          J’aimerais tenter de dire quelque chose, puisque vous savez que je viens de l’athéisme, qui comporte évidemment lui aussi des personnes droites, soucieuses et respectueuses de l’autre et de sa liberté. Il est compliqué de leur expliquer qu’elles portent en elles des « semences du Verbe », bien que je comprenne en quel sens Vatican II l’a dit. Pour elles, c’est une sorte de non-respect de ce qu’elles sont et de ce en quoi elles croient et c’est reçu comme une violence, j’en ai fait l’expérience avec les miens il y a longtemps.

          Pour en revenir aux problèmes de morale, je suis entièrement d’accord avec Emmanuel, comme avec René : laisser à chacun le soin de compléter une croyance commune en fonction de sa sensibilté personnelle » et donc « que l’Eglise réduise drastiquement le périmètre de son enseignement ». Ce serait signe de sagesse et de respect et serait bien plus conforme à l’enseignement et à la personnalité du Christ.

          • Comprenons-nous bien, l’expression « semences du verbe » est la lecture que les croyants font, dans leur foi, de l’existence d’une conscience morale commune à tous, croyants de toutes religions et/ou confessions et non-croyants. Il ne s’agit en aucune manière de vouloir récupérer qui que ce soit en le déclarant chrétien malgré lui.

          • @René : je pense que c’est surtout le mot « semence » qui pose problème. C’est un peu comme si on disait à quelqu’un : « je sent bien qu’il y a des semences d’intelligence dans ce que tu dis ». Cela évoque l’idée que, en dehors de l’Eglise, le verbe est forcément « non germé », inabouti. Alors que par contraste dans l’Eglise – et dans le magistère en particulier – se trouverait le « verbe mature ».

            Tout cela est difficilement audible aujourd’hui.

          • Sans doute, comme reste difficilement audible pour un croyant que toute foi serait infantile, la seule vérité « raisonnable » et mature étant d’admettre la non existence de Dieu. Chacun faisant naturellement une lecture du tout à partir de ses propres croyances.

          • Précisément, il me semble que la foi en ce qu’elle est relation au père, est par nature « Infantile » (Jésus le rappelle d’ailleurs en Mt 18.3 « si vous ne devenez comme les petits enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux »).

            Ce qui ne veut évidement pas dire qu’elle doive être idiote ou naïve, mais plutôt qu’elle est et nous permet de rejoindre un état de l’enfance.

            C’est – a mes yeux du moins – ce qui lui donne toute sa beauté et révèle la beauté du monde comparée a la vision grise, froide, triste et déterminée de la raison. Vouloir opposer ou comparer l’un à l’autre serait comme vouloir opposer un sécateur au jardinier : lorsque l’on regarde le rosier taillé, on ne voit que les marques du sécateur, mais c’est bien le jardinier qui en fait la beauté.

            (il va sans dire que ce n’est pas du tout la vision de la foi proposée par St Jean-Paul II qui semble les mettre sur un pied d’égalité en considérant que : « LA FOI ET LA RAISON sont comme les deux ailes qui permettent à l’esprit humain de s’élever vers la contemplation de la vérité. ». A la limite, la raison pourrait être une aile, alors que la foi serait le gouvernail).

  • Je me joins tardivement à ces échanges pour signaler la publication d’un nouveau livre du prêtre anglais, homosexuel et théologien, James ALISON : « La foi au-delà du ressentiment – fragments catholiques et gays ». S’appuyant sur une exégèse poussée des textes de la Bible, il rejoint les nombreux personnages aux parcours de vie cabossés qui s’y expriment, et partage avec ses lecteurs leur découverte irradiante de la miséricorde divine.
    L’originalité de cet ouvrage tient au fait que c’est l’orientation sexuelle de l’auteur et les drames que celle-ci a provoqués dans sa vie, qui constituent l’herméneutique, la source vive la plus profonde de son travail théologique.

  • D’acord René, cette lecture interne, je la comprends.
    Je m’explique mieux : de par mon histoire, j’ai vu « s’affronter » – ce qui n’aurait jamais dû arriver – athées et catholiques et j’entends encore ces derniers dire â ma mère ou à mes grands-oncles, qui tous m’avaient appris l’ardent souci d’autrui, que leurs qualités venaient de ce Dieu qu’ils portaient en eux sans le savoir, au stade embryonnaire parce que non éclairés.
    J’ai compris par la suite, d’autant plus que j’ai par mon expérience apporté un contre-témoignage extraordinaire de ce qu’est la foi au Christ, la violence du propos que, par égard pour moi ou pour éviter la rupture complète avec moi, ils ont dû « encaisser » (mal tout de même).

  • Vous avez absolument raison René. Personne n’a à juger la foi ou la non-foi de l’autre, ni de son degré d' »éveil », ni de sa maturité.

    Pour en revenir au sujet de ce fil, qu’aurait dû faire ce jeune père Matthieu ? Et comment va-t-il s’y prendre maintenant ? Car je présume qu’il a d’autres choses, qui lui tiennent à coeur, à dire. Je n’aimerais pas être à sa place.

    • Ce qu’il aurait « pu » faire, c’est expliquer – comme certains l’ont fait ici – que les choses ne sont pas si simples, que l’homosexualité telle qu’elle est décrite dans la bible n’a probablement pas grand chose à voir avec celle qui est vécue aujourd’hui, que ce n’est probablement pas sur notre sexualité que nous serons jugés, etc…

      => Donner des informations, mettre en lumière, laisser l’auditeur se forger une réponse

      Le problème, c’est qu’il à tordu la vérité (volontairement ? par maladresse ?), en disant « NON le catéchisme ne considère pas l’homosexualité comme un péché », il s’enferme dans un mensonge, et cela lui coute cher.

      Veut-il faire changer le CEC sur l’homosexualité ? La méthode me semble maladroite. A la relecture de tous les échanges, je pense qu’il serait tactiquement meilleur de disqualifier le CEC plutôt que d’essayer de l’amender.

  • Emmanuel,

    Il me semble qu’il ne faut pas confondre régression infantile propice à toutes les manipulations et « esprit d’enfance. » L’ Évangile insiste aussi sur la prudence qui permet recul critique et discernement : ce qui aurait été bien utile, en particulier, aux communautés «  déviantes «.

    Par ailleurs, le renoncement à l’exercice de la raison et de l’intelligence dans la compréhension et la transmission de la foi me paraît aussi un très grand danger. Le risque en est de tomber dans la pure affectivité comme on le voit dans le Pentecôtisme et certaines dérives sectaires des mouvements et communautés charismatiques assez bien connues maintenant. La raison qui est un élément nécessaire du dialogue avec autrui est une dimension esssentielle de l’être humain que l’on ne peut négliger, surtout si on veut s’adresser aux hommes éduqués des pays développés ( raison que d’ailleurs nous sommes en train d’exercer pour nous expliquer pour nous mêmes et pour les autres.)

    Sinon, effectivement ceux qui considèrent la religion comme le stade infantile de l’humanité propre à être dépassé ( Freud ) ou comme une aliénation ( Marx ) resteraient seuls à tenir un discours intelligible sur cette dernière.
    Ainsi, à mon avis, il est impossible de négliger ces critiques, en se référant uniquement à une foi personnelle, puisqu’elles sont la mise en forme cohérente et rationnelle de l’athéisme et peuvent aussi contenir des vérités dont il faut tenir compte.
    A une analyse rationnelle et argumentée, on ne peut répondre que par une analyse du même ordre, à moins que l’on renonce définitivement non seulement à la théologie mais aussi à tout dialogue avec autrui.

    • Marie Christine,

      En effet, il ne s’agit pas de renoncer à la raison (comme un horticulteur renoncerait à son sécateur) mais en quelque sorte de la subordonner à quelque chose qui la transcende. Il convient aussi bien sur de l’aiguiser – toujours comme un sécateur. Et il faut effectivement être attentif aux pièges qui peuvent naitre de l’émotivité et de l’affectivité.

      Je propose trois stades de l’évolution :
      – la foi inconsciente, de celui qui croit sans être capable de remettre en cause ou en doute ou avec une volonté de ne pas raisonner (qui est celle que dénoncent Freud et Marx – et qui est encore répandue dans l’Eglise)
      – la raison consciente, sans foi, que l’on qualifie souvent d’adulte et constitue le « modèle actuel de l’homme éclairé », qui est a mon gout triste et terne
      – la « foi consciente », qui est l’intégration réussie des deux précédente, dotée à la fois de la puissance de la foi – notamment dans sa capacité a initier des actions déraisonnables qui nous surpassent – avec l’outil de la raison pour les mener à bien

      Je manipule mal les mots pour exprimer ce que n’est pas encore totalement clair dans ma tête, mais en substance il me semble qu’il faut chercher au delà de la « religion brute », au delà de notre époque (et ne pas chercher à s’y comparer), pour atteindre un stade supérieur.

  • Michel de Guibert,

    Je voulais revenir sur ma mauvaise compréhension d’une phrase de E. de Moulins-Beaufort.
    J’avais cru comprendre qu’il s’agissait pour lui de «  former « des laïcs choisis parmi les autres, afin qu’ils suppléent éventuellement au manque de prêtres. Or s’il s’agit de «  nourrir «, de «  soutenir «  la minorité des laïcs cathos ( le petit reste ) dans notre société actuelle ; il n’y a rien à en redire, bien au contraire…

    • Par ailleurs, je ne vois pas où est le problême de « former » des laïcs, parfois interprété comme volonté de les formater, ce qui ne peut être totalement exclu mais reste l’exception lorsqu’on connaît de l’intérieur les universités catholiques.

      Je me peremttrai ici un souvenir personnel. Lors des JMJ de Madrid, j’avais été « recruté » par sœur Nathalie Becquart aujourd’hui en poste au Vatican, alors chargée de la Pastorale des jeunes et des vocations au sein de la Cef. Ma « mission » (partagée avec mon ami Laurent Grzybowsky) : former à la communication les dix jeunes qui avaient été sélectionnés comme porte parole des JMJ. Suite à un article que j’avais publié dans Pèlerin sur cette formation, j’avais eu droit, sur Europe 1, à une reprise ironique dans le cadre de la Revue de Presse, où le journaliste insinuait qu’il pouvait s’agir là de formatage. Je l’avais appelé au téléphone pour remettre les pendules à l’heure. L’expérience qui, à l’inverse, avait été la nôtre, est que ces jeunes étaient arrivés à ce stage avec une pensée qui était celle de l’institution, répondant à nos questions ce qu’ils pensaient qu’on attendait qu’ils répondent. Toute notre formation a consisté à les « déprogrammer » et à leur faire comprendre qu’en réalité ce qu’on attendait d’eux (et ce qui parlerait aux journalistes avec lesquels ils seraient en relations), c’était qu’ils s’expriment avec leurs mots à eux, avec leurs tripes, avec leurs convictions et leurs questionnements.

      Mais allez donc convaincre de cela ceux qui nourrissent en permanence le procès de l’institution… même universitaire !

      • « calomniez, calomniez il en restera toujours quelque chose »tel est le principe appliqué perpétuellement par certains (pas vous bien sûr..)

      • Rene,

        Je pense encore qu’il y a mauvaise interprétation ,du moins de ma part.
        Bien sûr que la formation par des spécialistes et des universitaires est absolument nécessaire. Tout dépend cependant, pour ce que j’en sais, des universités ou organismes en question et de «  l’esprit » de cette formation, pour aller très vite; ou complètement «  alignés « ou au contraire trop «  libres  » et « désordonnés «, ayant bien conscience que l’équilibre est bien difficile à trouver…
        Mais cette formation des laïcs ne leur donne aucun pouvoir institutionnel, ne les différencie pas en ce sens des autres croyants.
        Ce que je craignais est que la formation dont il était question n’en fasse des « « super-chrétiens « pourvus d’un pouvoir les rendant supérieurs aux autres et surtout legitime par diverses procédures dans l’institution.
        .

        • Marie-Christine, former n’est pas obligatoirement synonyme de déformer que je sache du moins Un théologien , tout théologien qu’il soit peut malgré cela dire des c …ies mais me semble-t-il ce risque est , du moins peut-on l’espérer,, bien supérieur chez le commun des mortels

          • Vous n’avez pas lu.
            Je n’ai absolument pas parler de «déformation «  ?, ni n’ai critiqué la théologie ? Bien au contraire…

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