Et je renaîtrai de mes cendres…

Et je renaîtrai de mes cendres…

Si 2015 fut, par bien des aspects, «annus horibilis», elle reste marquée, pour moi, par une belle aventure qui trouve aujourd’hui son épilogue.

Le 12 février 2015, au terme d’une réunion de travail au siège d’un mouvement de jeunesse où je suis engagé, sa Déléguée générale me faisait part du décès récent d’une collègue de son mari. Cette personne, décédée d’un cancer quinze jours plus tôt, laissait le manuscrit d’une autobiographie que, par fidélité à sa mémoire, son époux souhaitait faire publier. Est-ce que j’accepterais de le lire ?

Je n’avais aucune raison de refuser à cette amie le service qu’elle me demandait. Mais, outre le désagrément de devoir faire face à une charge supplémentaire dans un emploi du temps bien fourni, j’appréhendais cette lecture. J’ai tellement reçu de manuscrits, au cours de ma vie journalistique, provenant de personnes persuadées que «leur vie était un roman» et que le récit qu’elles en avaient tiré allait bouleverser le monde de l’édition… qu’à chaque fois, j’anticipe la manière dont je vais pouvoir répondre, en des termes courtois, qu’hélas, malgré ses qualités, le texte me semble difficile à proposer à un éditeur dans un contexte tendu pour ce secteur économique.

J’ai donc accepté ! Quelques jours plus tard je recevais le manuscrit en PDF accompagné d’un petit mot de remerciement du mari de l’auteure. Il me disait combien Laurence, son épouse, avait trouvé dans ce travail d’écriture un vrai bonheur et une forme de thérapie, et souhaitait que ce récit puisse aider d’autres personnes, atteintes de cancer, comme elle-même avait trouvé du réconfort à certaines lectures. J’accusai réception et promis un retour rapide.

Le manuscrit est resté quelques semaines sur un coin de mon écran d’ordinateur, sans que je prenne le temps de l’ouvrir. Fin mars le mari de Laurence venait aux nouvelles. Je lui répondis, confus, que j’allais lire le manuscrit sans trop tarder. J’étais d’autant plus désolé que je connais, d’expérience, la fébrilité de l’auteur lorsqu’il a fait parvenir son manuscrit à son premier lecteur, voire à un possible éditeur. Et j’imaginais ce que pouvait représenter de souffrance une telle attente, lorsque, comme c’était ici le cas, ce qui était  en jeu était une question d’amour et de fidélité.

Le samedi suivant, je me suis donc installé devant mon écran d’ordinateur et j’ai ouvert le fichier sur la page titre : Et je renaîtrai de mes cendres. Dès le second feuillet je me suis trouvé saisi par un récit dont je ne suis sorti, bouleversé, que quelques heures plus tard, après l’avoir dévoré d’une seule traite.

Outre le parcours, dramatique et singulier, de l’auteure – une enfance douloureuse suivie de cette terrible maladie – son style narratif servait le propos de manière terriblement efficace. Parce qu’on y trouvait tout à la fois une intelligence psychologique rare, une justesse d’analyse des sentiments et des situations, une infinie pudeur, un sens de l’humour et de la dérision, voire une légèreté qui aidaient à «encaisser» la rudesse du propos. Ce texte révèlait un vrai talent, je préfère dire un «bonheur» d’écriture, en même temps qu’une immense générosité. Sans aucune complaisance ni facilité. Il était tout simplement vrai.

J’avais reçu ce récit comme un coup de poing. Au cœur, à l’âme. Je me sentais fraternellement proche, en humanité, de l’époux qui, au travers de sa peine, au terme d’un long calvaire partagé, se voyait offrir ainsi qu’à ses enfants, un tel témoignage d’amour, un message de vie à partager. Et je pensai aussitôt que ce «ressenti» pourrait être, demain, celui de tout lecteur.

Je ne dirai rien de plus, ici, de mes tentatives, à propos desquelles j’ai régulièrement échangé avec Frédéric Finet. Les mois passèrent. Le 26 août je recevais un court message d’un ami éditeur me disant que ce texte «suscitait leur intérêt.»

Le lendemain, il m’écrivait dans un courriel : «J’avais donné le manuscrit à lire à une responsable éditoriale qui en est sortie bouleversée. Je n’ai entamé sa lecture qu’hier et je dois te dire que je ne parviens pas à lâcher la lecture de ce texte. Cela m’arrive rarement.» Le 3 septembre il m’informait de sa décision de publier.

Ce 22 janvier 2016 Laurence Finet aurait eu quarante-huit ans. Quelques jours plus tard, le 31, son époux et leurs quatre enfants marqueront le premier anniversaire de sa mort. Au travers de leur peine ils auront la consolation de savoir que depuis le 14 janvier, le livre est en librairie. (1) Au travers de ce récit flamboyant, d’une bouleversante humanité, leur épouse et mère, comme elle en avait le désir profond, renaît de ses cendres.

© René Poujol

________

(1) Laurence Finet, Et je renaîtrai de mes cendres, Ed. de l’Atelier, 408 p. 18 €.

 

PS. Merci à Catherine Larrieu pour sa requête, à Frédéric Finet pour sa confiance, à Bernard Stéphan pour son engagement, aux futurs lecteurs du livre pour le soutien qu’ils auront envie d’apporter à la diffusion de ce message de vie et d’espoir.

 

_________________________________________________________________________________________

VOUS SOUHAITEZ ETRE REGULIEREMENT INFORME DES ARTICLES PUBLIES SUR CE BLOGUE, IL VOUS SUFFIT DE DEPOSER UN COMMENTAIRE, MEME BREF, AU PRESENT ARTICLE A L’AIDE DU FORMULAIRE QUI CLOT LA SERIE DES COMMENTAIRES DEJA PUBLIES, ET DE COCHER LA OU LES CASES CORRESPONDANT A VOTRE DEMANDE

_________________________________________________________________________________________

7 comments

  • Je connaissais Laurence et regrette tellement de ne pas l’avoir rencontrée plus tôt.
    Une femme exceptionnelle. Un livre magique.
    Merci infiniment pour ce que vous avez entrepris pour permettre sa publication. .

  • Merci Monsieur Poujol pour votre article sur votre blog, consacré à mon amie Laurence et merci surtout pour votre aide extrêmement précieuse, je devrais dire, déterminante, dans la publication de son récit par les Editions de l’Atelier. Quel réconfort de voir son manuscrit publié et reconnu par des professionnels, elle qui ne croyait pas en son talent d’écriture. Merci pour ce beau cadeau.

  • Merci de m’avoir fait découvrir ce livre magnifique, quel courage qu’elle lucidité et quelle leçon de vie et surtout bonne route pour Frédéric et ses enfants

  • Merci pour votre article et votre contribution à la diffusion de ce livre!

    Laurence a quatre enfants et un mari aimant. Elle est docteur en informatique et récemment promue directrice de la production. Cette carrière, elle l’a accomplie avec constance, mais sans envie réelle.

    Sa volonté tue, c’était l’écriture. Mais ce contournement de sa vocation ne constitue pas le cœur de ses combats. Il est simplement le fruit de son affirmation mutilée.

    Laurence craque. En elle, enfouies depuis tant d’années, une honte corrosive, et une culpabilité omniprésente.

    Laurence n’a pas eu une enfance ordinaire. Elle n’a jamais connu l’insouciance. Aujourd’hui encore, elle ne sait pas poser de limites aux exigences de son entourage. Elle croit que sa valeur est dans l’appréciation de l’autre. En elle, l’idée qu’elle ne vaut que par ses efforts pour plaire.

    Laurence a subi, comme ses frères, une maltraitance verbale et physique. Laurence a subi, en plus de ses frères, l’indicible.

    Laurence a gardé pour elle ces offenses. Laurence a caché sans les panser, ses plaies.

    Suicidés, ses deux frères. Savaient-ils ? Etait-elle indirectement l’objet de leur rejet de cette vie ?

    Et je renaîtrai de mes cendres, est un récit autobiographique bien rythmé, coloré, malgré le sujet austère de la souffrance.

    Laurence aura à lutter contre ce sentiment de honte et de culpabilité. Elle aura à affronter la maladie. Elle aura à apprendre à goûter chaque jour, chaque heure, chaque souffle.

    Dans ses luttes, elle est accompagnée par un mari entier et dévoué.

    Laurence Finet a un réel talent pour l’écriture. On l’accompagne dans chacune de ses batailles. On se surprend à s’interroger sur la nature de la nécessité du pardon. La question n’est plus de savoir si on doit pardonner, mais si on le peut.

    Laurence doit pardonner, pas par faiblesse, mais pour se libérer de ses servitudes : « Et puis un jour, je comprendrai le vrai sens du pardon. Non pas celui que l’on prononce du bout des lèvres pendant que le cœur lutte contre la colère. Non, l’envie tout simplement de couper le lien qui m’attache à ceux qui m’ont fait du mal. » (p. 388)

    Apprenant à se libérer de sa culpabilité de s’affirmer comme auteur de sa vie, en posant ses propres frontières, en sachant dire non sans renier son nom, Laurence Finet renaît.

    Laurence écrit. Laurence s’écrit.

  • je fais une recherche sur la souffrance, le mal et suis toujours adeptes de témoignages . Je vais me procurer cet ouvrage et reviendrai vers vous. Merci par avance à tous ceux qui ont travaillé à ce témoignage et à sa publication. Cordialement.

Comments are closed.