Rimbaud et Verlaine menacés de chambre froide

Rimbaud et Verlaine menacés de chambre froide

Les faire entrer au Panthéon, voilà bien la meilleure façon de nier ce qu’ils ont été et doivent rester : des rebelles !

Le 9 septembre a été rendue publique une pétition adressée au Président de la République, demandant l’entrée au Panthéon des deux poètes français Rimbaud et Verlaine. (1) Pétition initiée par un certain nombre d’écrivains, académiciens et intellectuels, et soutenue par la totalité des ministres de la culture successifs depuis Jack Lang, au premier rang desquels l’actuelle titulaire du poste : Roselyne Bachelot. Quelques jours plus tard, dans une tribune du Monde, des artistes et écrivains, admirateurs des deux poètes, disaient ouvertement leur désaccord avec une initiative qui, selon eux, « relève d’une idéologie bien pensante et communautariste » Voilà une polémique bien française qui, pourtant, en dit long sur les maux de notre société. 

Le texte de la pétition ouvre sur cet « exposé des motifs » : « Arthur Rimbaud et Paul Verlaine sont deux poètes majeurs de notre langue. Ils ont enrichi par leur génie notre patrimoine. Ils sont aussi deux symboles de la diversité. Ils durent endurer « l’homophobie » implacable de leur époque. Ils sont les Oscar Wilde français. » Tout est dit. L’objectif est bien de faire entrer au Panthéon deux poètes connus pour avoir été amants et qui symbolisent donc le couple homosexuel rêvé pour la France émancipée de ce début de millénaire. Le reste de l’argumentation, que chacun peut lire sur le texte de la pétition n’est, pour le coup, que littérature, sous forme d’un savant habillage qui peut se retourner comme un gant. 

Pourquoi pas Baudelaire, Nerval ou Lautréamont ? 

Car enfin, que Rimbaud et Verlaine soient de grands poètes, nul ne le conteste. Mais au registre des « poètes maudits », pourquoi eux et pas Baudelaine, Nerval ou Lautréamont sinon, peut-on supposer, parce qu’ils n’étaient pas homosexuels ? Et lorsque la pétition vient arguer du fait que Rimbaud serait, contre son gré, prisonnier dans un caveau familial dont il faudrait le délivrer, reposant auprès de « son ennemi et usurpateur, Paterne Berrichon », on se sent autorisés à rappeler que Beaudelaire partage au cimetière Montparnasse la tombe de son beau-père détesté, le général Aupick… 

Comprenons nous bien : je ne vois aucune objection de principe à l’entrée au Panthéon de deux poètes homosexuels. Mais que ce soit là, d’évidence, le critère déterminant porté par les initiateurs de la démarche pose une vraie question. Les signataires de la tribune du Monde soulignent fort justement, qu’il y a là «une démarche sociétale, et non mémoriale, qui n’est pas dans la vocation du Panthéon». Depuis, la polémique fait rage par médias interposés. Sur le site du Point, le journaliste et essayiste Frédéric Martel qui figure parmi les signataires de la Lettre au Président de la République, entreprend de défendre la cause de la Panthéonisation. « Le Panthéon, explique-t-il, ne peut pas rester le monument des grands hommes politiques d’antan et des militaires ultradécorés. (2) Il doit représenter davantage la société française. C’est aussi pour cela qu’on y a fait rentrer Aimé Césaire ou Simone Veil. Le temps de Rimbaud et de Verlaine est venu. Y faire entrer deux poètes maudits, des dissidents, la bohème, le blasphème, c’est cela, la France. » (3)

Toute leur vie semble dire non au Panthéon.

Si d’aventure, on considérait – ce qui n’a jamais été signifié – que ce haut lieu de la République se doit impérativement de rendre compte de la « diversité », alors peut-être devrait-on commencer par changer l’inscription qui barre le fronton du monument et semble ne pas pouvoir faire la moindre place aux femmes « Aux grands hommes la patrie reconnaissante. » Mais là n’est pas l’essentiel. L’insupportable, en cette affaire, est l’instrumentalisation des deux poètes qui, par définition, n’ont rien demandé. Si Martel a raison de souligner que “toute leur œuvre“ dit leur homosexualité, ce que peu de monde conteste même s’ils furent en réalité bisexuels, les signataires de la tribune antipanthéonisation sont aussi légitimes à faire valoir que leur vie même de poètes maudits dit également une forme de rejet radical de tout ce qui peut ressembler de près ou de loin à une institution, une forme d’ordre, fussent-ils républicains.

On m’objectera que ce rejet tenait au contexte, à la nature de la société française du XIXe siècle, bien proche de celle qui, outre-Manche, envo

yait Oscar Wilde à la geôle de Reading. C’est cette société hypocrite et bourgeoise qu’ils méprisaient. Leur ouvrir largement les portes du Panthéon porterait témoignage que les temps ont définitivement changé et qu’ils n’auraient plus de raison, s’ils vivaient aujourd’hui, de se comporter en rebelles à l’égard d’un pays devenu ouvert, tolérant et généreux à l’égard des homosexuels. Sincèrement, imagine-t-on Arthur Rimbaud et Paul Verlaine se marier à la mairie du XVe avant d’aller recevoir la Légion d’honneur sous les ors de l’Elysée ?

Les honorer là où ils reposent

Leur rebellion ne porte-t-elle pas de manière plus radicale, existentielle, spirituelle, sur les modalités même de l’être au monde qui conditionne chacune de nos vies ? Et qui fait que nous nous reconnaissons en eux. Et que notre dette à leur égard est immense. Qui peut imaginer que des évolutions sociétales, si libérales soient-elles, puissent rendre vain tout esprit de révolte ? Comme si la rébellion propre à toute jeunesse, était désormais sans objet ! Il est de salubrité publique que chaque génération continue de générer ses révoltés. Pour nous tenir éveillés contre tous les renoncements, toutes les lâchetés ! Et que ces “enfants terribles“ brûlés par le génie de la poésie que furent Verlaine et Rimbaud puissent rester tels dans le regard, le souvenir et le cœur des Français par-delà la mort.

Nul n’a le droit, d’instrumentaliser, de récupérer, d’aseptiser Arthur Rimbaud et Paul Verlaine. C’est là où ils reposent, au hasard de l’histoire – comme nous reposerons tous un jour à notre tour – dans la diversité des paysages de France, que nous voulons continuer de leur rendre hommage, non dans cette chambre froide de la République qu’est le Panthéon. 

  1. A l’heure où je boucle ce billet, ce dimanche 20 septembre, la pétition a reçu quelque 5 300 signatures. 
  2. Soulignons qu’il n’y a pas de militaire au Panthéon, leur lieu d’inhumation est la crypte des Invalides. 
  3. On attend que les mêmes pétitionnent pour la panthéonisation de l’Abbé Pierre, sauf à considérer qu’un prêtre catholique n’appartient pas à la vraie France. 

16 comments

  • C’est réduire leur art à un aspect transitoire de leur sexualité. Ras-le-bol des réductions à la couleur de peau ou à la sexualité par des gens censés être anti racistes ou anti homophobie. Même le mot  »rebelle » est réducteur.

    Seule chose à faire avec Rimbaud et Verlaine, comme avec tous les grands auteurs : les lire, les admirer, les faire lire.
    Tout le reste est littérature, sous-entendu mauvaise.

  • A propos du Panthéon:
    Peut-on réellement souhaiter, et quels que soient les mérites qui nous sont reconnus, ou que nous nous attribuons ,que nos cendres soient reçues au Panthéon ?
    Il y a déjà un prêtre catholique au Panthéon; c’est « l’Abbé Grégoire » dont les restes y ont été transférés en 1989,, mais la hiérarchie catholique regardait ailleurs.

    • Chacun peut avoir son idée sur la question. Que toute institution veuille magnifier ses « grands » (hommes ou femmes) pour les donner en exemple et autour de leur mémoire souder la communauté… on peut le comprendre. Reste que tout choix est subjectif et procède de politiques de communications difficiles à contrôler et parfois à justifier. L’Eglise n’y échappe pas ! Mais s’agissant du Panthéon républicain, il faut reconnaître qu’il y a là une forme d’oxymore. Comment élever (dans une église, au demeurant) un temple à des « dieux » humains dans une République laïque ? Et puis, quel lieu plus glacial ? De quoi décourager le citoyen le plus déterminé.

      Concernant la présence d’un prêtre en ce lieu, je n’ignore bien évidemment pas les circonstances du transfert de l’Abbé Grégoire. Ma note de bas de page voulait simplement illustrer ce que je disais dans le paragraphe précédent de ce commentaire. Sous couvert d’universalité et d’obsjectivité des mérites des uns et des autres, toute pantéonisation (comme toute canonisation) procède d’un choix subjectif. Lorsque Frédéric Martel déclare au Point : « deux poètes maudits, des dissidents, la bohème, le blasphème, c’est cela, la France » on a envie de lui répliquer qu’un homme comme l’abbé Pierre qui met sa vie au service des plus pauvres, c’est aussi cela la France ! Et qu’hélas, une certaine conception coincée de la laïcité semble empècher certains de pouvoir entendre cela !

      • René, « pour les donner en exemple » oui, mais pas que. Il s’agit aussi pour ces institutions de se glorifier.

  • Ce doublé est troublant. Il renvoie à la canonisation simultanée de Giuseppe Roncalli et Karol Wojtyła. Dans un cas, les poètes vécurent en harmonie agitée deux années seulement avant de se fâcher et de suivre chacun des routes fort différentes, dans l’autre, les hommes de Dieu, je ne sais s’ils ont vécu en harmonie spirituelle et estime qu’ils ont tenté de conduire l’Église dans des voies forts différentes. La canonisation laïque, si elle avait lieu, serait j’en convient, plus que maladroite, dénuée de sens, sauf à vouloir saluer ces deux années de vie créatrice orageuse et homosexuelle et réduire ces deux hommes à cela. Quand la canonisation religieuse, elle a pour révélé que canoniser est insensé, spirituellement parlant, même si Jorge Bergoglio a tené ainsi de réconcilier conservateurs et réformateurs. Manifestement, pour l’instant, c’est raté.

  • Aux arguments de René avec lesquels je suis en accord , je voudrai en ajouter deux autres moins liés aux personnes ces deux poètes qu’à la fonction même tant de la panthéonisation que du rôle de l’artiste .

    1) La fonction première du panthéon est de légitimer la République et ses valeurs, en portant au pinacle , des hommes comme des femmes qui se sont engagés pour elle , en mettant en exergue leurs actions illustrant la pertinence et la validité des valeurs de la République . C’est un moyen de renforcer le contrat social .

    Ce n’est bien évidemment pas le cas des artistes en général et de l’oeuvre de ces deux là en particulier . C’est pourquoi ce projet relève de la récupération et de l’instrumentalisation .

    Un artiste questionne le réel, interroge la société sur ce qu’elle vit , sur le décalage entre ce qu’elle dit et ce qu’elle vit , Un artiste est par définition quelqu’un qui dérange un ordre établi quelque soit cet ordre, en apportant un regard renouvelé sur la réalité . Un artiste peut donc pas être , sauf en lui niant sa propre identité, utilisé pour promouvoir des valeurs aussi légitimes soient elles .

    Un artiste ne peut pas être panthéonisé car en le faisant on dévalue et on nie ce qui est sa raison d’être . En voulant l’élever , paradoxalement on l’abaisse .
    .
    2) Si l’on perçoit les motivations d’un tel projet , il faut de plus souligner son caractère dangereux pour la démocratie . C’est le propre d’une logique totalitaire que de vouloir maitriser le discours sur le réel et de donner, quelque fois longtemps après, son imprimatur et sa marque sur tout ce qui se dit , s’écrit se pense . Or l’artiste est une instance d’appel qui dit que le réel est plus large , différent que ce que nous en disons nous même . Il nous rappelle sans cesse qu’il existe un ailleurs que nous n’avions pas perçu , un ailleurs différent de ce que collectivement nous en disons dans notre contrat social et que nous ne pouvons avoir la prétention de circonscrire et d »enfermer y compris avec les meilleures intentions du monde . L’artiste est une instance d’appel qui garantit notre liberté face à l’organisation de nos sociétés .

    Panthéoniser Verlaine et Rimbaud c’est méconnaitre la fonction du panthéon et nier le rôle de l’artiste .
    En trois mots : une double connerie .

  • La meilleure chose qui puisse arriver au Panthéon c’est de redevenir l’église Sainte Geneviève qu’elle n’aurait jamais dû cesser d’être !

  • Bonjour René !
    Merci de m’excuser pour mon intrusion hors du sujet ; mais je m’intéresse à l’Abbé Grégoire et j’ai craint que sa présence au Panthéon ne retire tout ou partie de son efficacité à votre note de bas de page dont le contenu ne me paraît pas contestable sur le fond. A moins, ce que je ne peux croire, que vous contestiez la qualité de « prêtre catholique » à Henri Grégoire ; mais ce n’est vraiment pas le sujet du débat.

    • Non, je ne conteste pas ce titre à l’abbé Grégoire, bien évidemment. Je voulais simplement souligner qu’à mes yeux l’abbé Pierre était une des grandes figures du XXe siècle, également « rebelle » à sa manière (même si lui a accepté tous les grades dans l’Ordre de la Légion d’honneur) dont on pouvait penser qu’il avait légitimement sa place au Panthéon non en tant que prêtre mais défenseur des plus pauvres… Ce que certains se refuseraient sans doute à l’envisager au nom de la laïcité. Signe, à mes yeux, que la notion même de « valeurs de la République » souvent présentée comme un absolu, reste largement indéterminée et fluctuante en fonction du politiquement correct du moment.

      • L’abbé Pierre comme l’abbe Grégoire aurait bien évidemment sa place au panthéon .Mais une juste vision de la laicite devrait conduire à distinguer les actes de ce qui les a motivés.
        L’abbe Pierre a illustré au plus haut point la valeur de fraternité .Et c’est cela que la République peut (doit?) reconnaitre .Par contre les motivations de son engagement quelques qu’elles soient (foi au Christ ou adhésion à la valeur républicaine de fraternite ) relèvent de la sphère privée et n’ont pas à être prises en compte pour la reconnaissance des actions publiques .
        La reconnaissance de la République met en exergue ce que nous avons en commun quand bien même ce qui inspiré ce bien commun s’origine dans des sources différentes .
        Comme le signifie le poème d’Aragon le même engagement peut réunir celui qui croit au ciel comme celui qui n’y croit pas .C’est l’importance de ce même engagement que la « patrie reconnaissante  » met en exergue , pas les raisons qui le motivent et qui relevent de la liberté de croire ou non que la laicite permet à chacun d’entre nous .
        C’est l’homme Henri Grouès qui entrera peut être un jour au pantheon , pas le prêtre .

      • Tout à fait d’accord, même en considérant que la volonté de tenir les rênes de l’abbé, malgré de modestes qualités de gestionnaire, ont provoqué des scissions, notamment dans le secteur construction et gestion immobilière.

  • Concernant Rimbaud, notre ministre Bachelot a deux uniques raisons, qu’elle a indiqué au journal Le Point, dont l’une me semble la plus primordiale et déterminante : lorsqu’elle entre au conseil des ministres elle pense aux premiers vers du « bateau ivre » (comme je descendais des fleuves impassibles…) qu’elle a appris par cœur lorsqu’elle usait ses jupettes sur les bancs des écoles de la république. Et ça c’est totalement de première grandeur !
    Sans Rimbaud et ce poème rabâché, les décisions gouvernementales ne vaudraient pas triplettes. Vite : flanquons au Panthéon ce diable d’Arthur !

  • Bonjour,
    Tout d’abord pour « rebondir » (facilité de langage!) sur une de vos remarques (i n’y a pas de militaires au Panthéon), il y en a quelques uns, presque tous issus des fournées napoléoniennes, le plus connu étant le maréchal Lannes, duc de Montebello, car on oublie que Napoléon avait fait du Panthéon une nécropole pour ses « grands serviteurs » qui sont encore actuellement la majorité des locataires du lieu je crois, des gens aussi illustres que le banquier Perrégaux, le peintre Vien (comte de l’Empire), les juristes Portalis, Tronchet (défenseur de Louis XVI et sénateur de l’Empire etc
    Et parmi eux, trois cardinaux italiens morts à Paris sous l’Empire; dont deux (parmi lesquels le célèbre Caprara) furent récupérés ensuite par leur famille et rapatriés, il en en reste un, sans doute sans famille, le bien peu connu (mais honorable) cardinal diacre italo-écossais Erskine de Kellie
    Evidemment ils n’ont pas grand chose à voir avec les grands hommes de la république qui furent panthéonisés à partir de 1885.
    S’agissant enfin de Verlaine, il serait amusant de le voir récupéré par la république; non seulement comme vous l’avez dit , l’esprit de révolte transcende toutes les situations historiques, mais aussi parce que Verlaine vieillissant (si on peut dire pour un homme mort à 52 ans) devint catholique et monarchiste.
    Je cite ici des extraits de son poème à l’occasion de la mort en 1879 du prince impérial (tué en combattant les Zoulous sous l’uniforme britannique – d’où l’expression de Verlaine « mort à cause de la France » qui avait obligé la famille impériale à l’exil)

    Prince mort en soldat à cause de la France
    extrait de Sagesse (1881)

    Prince mort en soldat à cause de la France,
    Âme certes élue,
    Fier jeune homme si pur tombé plein d’espérance,
    Je t’aime et te salue !
    (…)
    Maintenant j’aime Dieu dont l’amour et la foudre
    M’ont fait une âme neuve,
    Et maintenant que mon orgueil réduit en poudre,
    Humble, accepte l’épreuve,

    J’admire ton destin, j’adore, tout en larmes
    Pour les pleurs de ta mère,
    Dieu qui te fit mourir, beau prince, sous les armes,
    Comme un héros d’Homère.

    Et je dis, réservant d’ailleurs mon vœu suprême
    Au lys de Louis Seize :
    Napoléon qui fus digne du diadème,
    Gloire à ta mort française !

    Et priez bien pour nous, pour cette France ancienne,
    Aujourd’hui vraiment « Sire »,
    Dieu qui vous couronna, sur la terre païenne,
    Bon chrétien, du martyre !

  • « …L’homme est un apprenti, la douleur est son maître,
    Et nul ne se connaît tant qu’il n’a pas souffert.
    C’est une dure loi, mais une loi suprême,
    Vieille comme le monde et la fatalité,
    Qu’il nous faut du malheur recevoir le baptême,
    Et qu’à ce triste prix, tout doit être acheté… ». (La nuit d’octobre Musset)
    Je ne connais Arthur Rimbaud que par un mot « Je est un Autre » ; Je sais seulement qu’il a eu une vie bien remplie, et « Je est un Autre » est une pensée pleine de riches sous-entendus. C’est peut-être l’apogée de l’Amour…

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