Benoit XVI homophobe ?

Il aura suffit d’une rencontre avec les évêques anglais et gallois en visite à Rome, et des réactions virulentes des médias britanniques pour ouvrir le champ d’une nouvelle polémique. Ou quand la presse a décidé de b… ffer du pape matin, midi et soir !

L e sujet fait la « Une » du monde de ce jeudi 4 février, à travers un dessin de Plantu. On a connu le caricaturiste mieux inspiré. Et le quotidien du soir plus sourcilleux à l’heure de peser le poids des mots qui titrent le dessin :  « Le pape s’en prend aux homosexuels ». Diable !

Pour ce que l’on sait (j’avoue m’en tenir à l’heure où j’écris ce blog aux seuls articles du Monde, Libération et le Figaro, la polémique est née d’une encontre à Rome entre Benoît XVI et des évêques britanniques en visite ad limina. Evoquant un projet de loi en cours de débat au Parlement britannique,  visant à lutter contre toutes les discriminations – notamment sexuelles – et « pour l’égalité des chances », Benoît XVI a  déclaré : « Votre pays est bien connu pour son engagement en faveur de l’égalité des chances pour tous les membres de la société. Pourtant, certaines lois conçues pour atteindre ce but, imposent des contraintes injustes sur la liberté des communautés religieuses  d’agir en accord avec leurs croyances. »

Directement visée la volonté du gouvernement britannique d’aligner sa législation sur les recommandations de la Cour Européenne de Justice concernant les discriminations à l’égard des homosexuels. Déjà outre Manche, un certain nombre d’agences d’adoptions, placées sous l’autorité de l’Eglise catholique, se sont vues contraindre d’accepter les demandes formulées par des couples homosexuels. Leur refus, rapporte Le Monde, a entrainé pour elles l’obligation « de fermer ou de prendre leur autonomie ». Et donc, on peut l’imaginer, de renoncer à des aides publiques.

Le projet de loi auquel Benoît XVI faisait allusion dans son discours aurait pu obliger, de même, des institutions catholiques, à accepter l’embauche de personnels appartenant à d’autres religions ou des personnels revendiquant leur homosexualité. Toujours selon Le Monde, le projet a momentanément été repoussé par la Chambre des lords.

Derrière ces débats, deux questions d’importance se profilent. La première concerne l’absence d’autonomie des Etats membres de l’Union Européenne au regard de la législation communautaire. Est-il normal, dans ces débats de société qui soulèvent des questions d’ordre éthique, que les citoyens d’un pays ne puissent décider démocratiquement de cultiver, au besoin, leur différence ? La France sera-t-elle contrainte, demain, d’adopter à son tour le mariage homosexuel, la légalisation de l’euthanasie ou du suicide assisté, au motif qu’un refus de sa part serait lourdement sanctionné par la cour Européenne de justice ? Il y a un risque réel à vouloir imposer à des citoyens libres une conception des droits de l’homme qu’ils ne partagent pas !

La seconde question concerne la difficile gestion de la question homosexuelle par l’Eglise catholique. Elle tire du texte de la Genèse : « Homme et femme il les créa » cette conviction que la véritable altérité repose sur l’hétérosexualité elle-même condition de l’ouverture à la vie, notre seule vraie richesse. Quoi que puissent permettre aujourd’hui les techniques médicales en matière de fécondation assistée. De ce fait, son discours s’articule toujours autour des deux principes : accueil des homosexuels et refus de l’homosexualité.

Ce blog n’est pas le lieu où débattre de la question au fond.  Mais les principes mêmes évoqués plus haut soulèvent bien des interrogations. S’agissant du « refus de l’homosexualité », on peut se demander s’il est bien réaliste (et bien chrétien ?) de n’avoir rien d’autre à proposer aux personnes homosexuelles que la continence… à vie ? S’agissant de « l’accueil des homosexuels », s’il est bien cohérent de lui opposer, dans le même temps, des réticences  à recruter des personnes homosexuelles dans des institutions catholiques, voire même le refus de laisser accéder au sacerdoce , des candidats présentant « des tendances homosexuelles profondément enracinées » ?

Ne soyons pas cruels ! Mais pas hypocrites non plus. Cela fait deux-mille ans que le catholicisme compte des homosexuels dans ses rangs, à tous les échelons de la hiérarchie, et il n’est pas prouvé qu’ils n’aient pas fourni à l’Eglise parmi les meilleurs de ses fils !

Derrière cette question c’est bien, en fait, et plus globalement, la vision catholique de la sexualité qui fait débat. Mais c’est là une autre histoire.

4 comments

  • Je cite : « Est-il normal, dans ces débats de société qui soulèvent des questions d’ordre éthique, que les citoyens d’un pays ne puissent décider démocratiquement de cultiver, au besoin, leur différence ? »

    Quel méli-mélo, Monsieur Poujol.
    Qu’est-ce que l’éthique a à voir avec la démocratie ?
    Et qu’est-ce que la sexualité des prêtres catholique a à voir avec la justice ?

  • Cher Jean-Claude,
    Je ne vois pas où se trouve le méli-mélo. Se demander ce que l’éthique a à voir avec la démocratie c’est ne pas percevoir de différence entre le légal et le moral. Or c’est tout de même la base de toute réflexion de type éthique. Sauf à admettre la barbarie comme valeur supérieure, toutes les civilisations acceptent le principe d’une séparation entre le bien et le mal. Or, ne vous en déplaise, il n’appartient pas aux représentants du peuple (députés et sénateurs) de dire le bien et le mal mais de différencier ce qui est permis de ce qui est défendu. Pour ne retenir qu’un seul exemple, il y a peu encore, la loi permettait de poursuivre en justice (notamment dans la région de Calais) les citoyens qui aidaient les clandestins… Cette disposition était légale et pourtant la morale – ou l’éthique – apperlaient à passer outre !
    Peut-on renoncer, dans une démocratie, au souhait de voir le légal coller au plus près avec ce qui semble moral donc souhaitable ? Contrairement à une idée simpliste ce n’est pas la loi qui, dans une société démocratique, crée l’interdit, elle se contente de l’officialiser. C’est bien parce que des citoyens perçoivent en eux-mêmes que certains comportements sont inadmissibles, immoraux, qu’ils votent des lois pour les interdire ! Le sens moral précède la loi, toujours ! Sauf pour les croyants qui considèrent que celle loi leur a été donnée par Dieu… mais c’est là un autre débat.

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