Lettre ouverte à Mr l’abbé Amar

Lettre ouverte à Mr l’abbé Amar

Est-il légitime de jeter le discrédit sur un journal au motif qu’un couple homosexuel y a été présenté sous une rubrique «famille chrétienne» ? 

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(Cet article a été mis en ligne  samedi 24 octobre, en milieu d’après-midi, donc à un moment où nous ne connaissions pas encore les résultats du vote final du synode sur la famille. Il faut avoir cette donnée en tête pour comprendre la tonalité de certains passages du texte qui suit.) 

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Monsieur l’abbé,

Cette semaine a été marquée, pour vous et moi, sur les réseaux sociaux, par une polémique sur laquelle je veux ici revenir, car elle me semble significative de désaccords profonds qui marquent en effet la vie de notre Eglise.

Permettez-moi de rappeler ici les faits. Depuis l’ouverture du Synode sur la famille, le quotidien catholique la Croix publie chaque jour un article présenté aux lecteurs comme décrivant «une famille engagée dans l’Église et dans la société». Or, le 20 octobre, le quotidien catholique consacrait son article à un couple d’homosexuels prénommés Julien et Bruno. Quelques heures plus tard on pouvait lire sur votre page Facebook : «Il y a des jours où on se dit que, vraiment, il y a de bonnes raisons de NE PAS être abonné au journal la Croix

A l’heure où je vous écris, j’ignore quelle explication fournit la direction du quotidien. Mais pour avoir moi-même dirigé la rédaction d’un grand hebdomadaire catholique, j’imagine comment l’erreur de la non adaptation du « chapeau » a pu être commise. Avant de réagir comme vous l’avez fait, la prudence et la courtoisie auraient voulu que vous demandiez quelque éclaircissement à la rédaction du quotidien.

Le 21 octobre j’ai donc exprimé, à mon tour, ma désapprobation de votre initiative sur ma propre page. Je ne reviendrai pas ici sur les échanges vifs qui ont suivi, nourris de manière contradictoire par les uns et par les autres. Chacun peut s’y reporter s’il le souhaite. Votre «charge» contre la Croix m’a semblé d’autant plus injuste que le quotidien vous donne régulièrement accès à ses colonnes, ainsi qu’à vos confrères de padreblog. Et voici qu’hier même, alors que la plupart des lecteurs de la Croix ignoraient sans doute encore tout de cette affaire, son site web vous offrait une sorte de droit de réponse.

J’en trouve le contenu suffisamment explicite pour avoir choisi d’y répondre dans cette lettre ouverte, non sur le ton de la polémique, mais de la « franche explication » comme on dirait au quai d’Orsay.

Vous avez été blessé, dites-vous, que j’aie pu, dans un commentaire, présenter votre démarche comme une sorte de fatwa contre le quotidien catholique. Si je m’en réfère au dictionnaire je trouve, pour ce mot, la définition suivante : « Dans la religion islamique, consultation juridique donnée par une autorité religieuse à propos d’un cas douteux ou d’une question nouvelle ; décision ou décret qui en résulte. Une fatwa n’est pas forcément une condamnation. Il s’agit d’un avis religieux. »

Monsieur l’abbé,

Vous êtes à mes yeux une autorité religieuse, assumant des responsabilités pastorales dans un diocèse de forte pratique. Or vous prenez la liberté de formuler sur des réseaux sociaux puissants où votre audience est réelle (1), une suspicion publique vis à vis d’un journal à propos d’un « cas » jugé par vous « douteux »… Nous sommes donc bien là dans ce que je dénonce, puisque votre propos équivaut à dire à vos lecteurs, majoritairement catholiques, qu’ils ont bien raison de se méfier de la Croix. Ce qui constitue bien un «avis religieux».

Mais comme on pouvait s’en douter, le fond de votre désaccord avec le quotidien se situe ailleurs. Vous dites regretter : «Le parti pris de La Croix depuis le début de ce synode. La publication des propos de Mgr Vesco puis le récent article reprochant la « timidité des évêques » en (étant) les exemples les plus significatifs.» Or la Croix qui a rendu compte quotidiennement des débats du synode et fait entendre toutes les opinions sur les sujets débattus, se contente, dans le premier exemple évoqué, de citer les propos tenus à Rome, le 15 octobre, par l’évêque d’Oran, devant les pères du synode : « Priver des sacrements de réconciliation et de l’eucharistie est un acte grave. Qui peut affirmer que cette privation est toujours justifiée ? »  Y a-t-il là matière à scandale ?

Quant au «récent article» mis en cause, titré «Les évêques restent timides dans leurs propositions», il ouvre sur cette phrase :  «La plupart des propositions pastorales les plus ouvertes aux situations familiales irrégulières n’ont pas été retenues par les groupes linguistiques qui ont achevé leurs travaux mardi 20 octobre.» Ce que vous appelez un «reproche» apparaît au journaliste que je suis – ou au lecteur le moins averti – comme un simple constat. Est-ce à ce point insupportable ?

Monsieur l’abbé,

Je vous reconnais parfaitement le droit, comme vous le revendiquez dans votre article, de faire votre « job » de curé de paroisse : défendre l’énoncé de la foi catholique telle qu’elle est présentée dans le catéchisme voulu par le Concile. » (2) Et je n’ai pas souvenir d’avoir jamais contesté publiquement la légitimité de padreblog où vous vous exprimez avec régularité, avec l’accord de votre évêque. Mais reconnaissez qu’il y a une marge entre cette activité toute pastorale et la dénonciation de la manière dont d’autres que vous, journalistes de métier, font, eux aussi , leur job.

Nous sommes bien là au cœur de notre désaccord. Vous écrivez : « N’est-il pas temps de dire qu’on attend d’un journal catholique qu’il défende… la foi et la morale catholiques ?» Je m’interroge sur la surface réelle du «on» auquel vous faites référence. J’observe que le type de presse que vous appelez de vos vœux existe et que vous ne manquez généralement pas de vous y référer. Mais j’attends que vous me précisiez au terme de quel «décret» tout journal – ou média – catholique devrait s’en tenir à la définition que vous nous proposez. Le rôle de la presse chrétienne est de nourrir la réflexion de ses lecteurs, en redisant certes ce qu’est l’enseignement de l’Eglise et ce qui la fonde, mais également en rendant compte de la manière dont cet enseignement est reçu, vécu et questionné. La légitimité pour des journalistes chrétiens d’exprimer une opinion publique dans l’Eglise, vous le savez parfaitement, est reconnue par le code de droit canonique. Et le journal dont vous contestez l’orientation a toute la confiance de son actionnaire, la congrégation des Augustins de l’Assomption, comme de la majorité des évêques de France.

La conclusion de votre « réponse » dans la Croix justifierait à elle seule un article de mon blogue. Je vous cite : « Ce synode s’achève. Il nourrit déjà la désillusion et la tristesse de tous ceux qui formulaient à son sujet une espérance démesurée. Il va y avoir « les déçus du synode » comme il y a eu « les déçus du Concile » : tous ceux qui avaient singulièrement omis de renouveler leur confiance en l’Esprit qui travaille l’Eglise.» Je trouve plaisant d’entendre les mêmes qui, voici quelques mois, agitaient le chiffon rouge d’un risque de rupture avec la Tradition nous expliquer aujourd’hui benoitement que «certains» seront déçus de découvrir que le synode se situe résolument dans la continuité !

Par principe, je ne vois pas comment je pourrais faire partie des déçus d’un synode dont nous ne connaissons, pour l’heure, ni les conclusions ni à plus forte raison les résultats ultimes, puisque le dernier mot revient au pape François. Vous vous dites justement attaché à l’autorité du magistère mais en bonne théologie le synode qui s’achève n’est pas LE magistère. Il est une contribution à son élaboration, au côté de l’opinion des fidèles exprimée notamment au travers des synodes diocésains (3) et de l’expertise des théologiens. Ne soyez pas trop déçu de devoir attendre encore un peu que nous manifestions, le cas échéant, notre déception…

A Rome, les tenants du statu quo se sont largement appuyés sur la position intransigeante de l’épiscopat africain pour justifier leur propre immobilisme. Mais à trop vouloir dénoncer le colonialisme des Eglises d’Occident, qui voudraient leur imposer un débat sur les divorcés-remariés dont ils n’auraient que faire, les évêques africains ne manifestent-ils pas, à leur tour, une forme de colonialisme à rebours, en prétendant nous interdire d’apporter, chez nous, les solutions pastorales que la situation exige ? L’Eglise d’Afrique n’est pas plus dans la fidélité à l’Evangile que les autres Eglises.  Elle a ses richesses et ses faiblesses propres. Lorsqu’elle exige d’un catéchumène polygame qui aspire au baptême, qu’il n’ait désormais qu’une seule épouse… elle l’invite du fait même à répudier ses autres épouses avec pour conséquence, dans le contexte de la société africaine, de les condamner, elles et leurs enfants, à l’exclusion et à la misère. Est-ce là l’Evangile du Christ dont le continent noir serait devenu le porte étendard ? Sans doute nos frères africains ont-ils mieux à nous apporter.

Monsieur l’abbé,

Le plus insupportable, dans votre article, pour le catholique que je suis, est la phrase suivante : « Il y a des désaccords de fond entre catholiques que nous n’osons plus nous avouer, de peur d’être encore moins nombreux et d’offrir au monde un spectacle désolant.» Ces désaccords de fond nul ne cherche à les cacher. En tout cas pas moi. On me reproche bien assez d’en nourrir les articles de ce blogue ! Si je suis bien votre pensée, mais vous me démentirez le cas échéant si je fais fausse route, vous estimez qu’il existe des catholiques autoproclamés – dont je suis – qui en fait ne le sont plus, et qu’il serait temps que la hiérarchie en tire les conséquences.

Au fond, sans le dire vraiment, vous nous proposez trois issues possibles : rentrer dans le rang (sur sommation épiscopale), nous faire protestants ou prendre la responsabilité de la rupture et devenir schismatiques, c’est-à-dire créer notre propre Eglise et nous retrouver excommuniés. Trois manières de vous conforter dans l’évidence – qui vous habite – d’être, vous et ceux qui vous entourent, les seuls vrais catholiques. Détrompez-vous, nous resterons bien présents dans notre Eglise et continuerons à nous y exprimer en toute liberté.

L’a-t-on assez dit, le véritable enjeu de ce synode qui, encore une fois, est loin d’être achevé, est, au-delà de la famille, de concilier l’unité de l’Eglise et la prise en compte des diversités culturelles auxquelles nous sommes confrontés. Je suis aussi attaché que vous à l’unité, sur l’essentiel de la foi, mais ne vois pas aujourd’hui comment cette unité pourrait se consolider sans la prise en compte de la diversité et sans l’octroi d’un minimum d’autonomie aux Eglises particulières comme le pape François y invite dans Evangelii Gaudium. Est-il envisageable que, sur cette question majeure pour l’avenir de notre Eglise, vous et moi, vous et nous, soyons au moins capables de nous écouter, de nous expliquer, sans nous faire de faux procès en infidélité ?

© René Poujol

 

  1. A l’heure où je rédige ces lignes votre «post» initial a été liké par trois cent personnes et partagé trente-et-une fois démultipliant d’autant son impact.
  2. Encore pourrait-on débattre de cette expression. Car si le Concile a bien manifesté son souhait de mettre en chantier un catéchisme, on peut difficilement lui faire avaliser, a posteriori, le fruit de ce travail.
  3. Synodes qui pour l’écrasante majorité, depuis des décennies, demandent au magistère de revoir son enseignement sur la contraception, l’accès aux sacrements des divorcés remariés, l’ordination d’hommes mariés ou la place des femmes dans l’Eglise.

14 comments

  • Tout simplement bravo pour ce commentaire clair et équilibré. La Croix se singularise par rapport à tous les autres quotidiens francophones par la qualité de ses dossiers, l’équilibre de ses positions et le traitement de sujets de fond d’une manière résolument positive. J’ai souvent été frappé par la mauvaise foi de ceux qui critiquent ce journal en n’en prenant qu’une demi-phrase à épingler, sans la remettre dans l’ensemble du contexte d’un article ou d’un dossier, procédé bien connu de tous les déformateurs d’opinion.

  • Merci pour votre texte que je trouve, moi aussi, équilibré. Oui, gardons-nous tous de penser que les « mauvais catholiques » » sont toujours les autres !
    Il me semble qu’au cours du synode qui se termine, expérience a été faite par les évêques, qu’une parole « universelle » n’était guère possible, ni même souhaitable.
    De même qu’il y a 4 évangiles avec des accents théologiques différents, il est urgent que l’Eglise catholique favorise le débat, y compris sur des points clivants, sans pour autant que personne ne lance l’anathème aux autres. C’est peut être d’abord cela qui restera de ce synode : la capacité de « marcher ensemble » entre personnes n’ayant pas les mêmes lignes théologiques car c’est bien le cas.
    Au passage merci au journal « La Croix » de permettre des expressions diverses. Merci surtout pour la qualité de ce qu’il propose et qui est apprécié bien au-delà du cercle des pratiquants et même des chrétiens.

  • Ce n’est pas à chaque fois le cas, mais je suis entièrement d’accord avec ce billet. Bravo ! Il est clair et exprime une juste colère. Vous avez parfaitement raison : nous ne partirons pas, mais nous ne nous tairons pas non plus.

  • Bien sûr d’accord avec ce billet qui a le mérite d’en appeler à l’unité dans la diversité, unité qui est la seule appelée par le Christ, que cela nous convienne ou non…
    Par ailleurs toutes ces réactions ne sont que le révélateur, au sens chimique ou photographique du terme, des pensées cachées depuis longtemps entre les évangélisateurs,le pape aujourd’hui,et son entourage encore très encombré de pharisiens défenseurs du dogme et de la morale.
    Pour ma part et quelques soient le résultats du synode, je suis comblé par cette révélation, cette apocalypse : quoiqu’il lui arrive demain, le pape François a permis à l’Église de monter sur la marche de la Miséricorde. Si par malheur l’Église devait redescendre de cette marche,les colonnes du Temple risquent de sérieux tremblements.

  • Merci encore une fois pour votre éclairage pertinent. Alors qu’aujourd’hui, on (France-Info) annonce que les 94 articles du texte final ont été votés par le synode, dont certains sur l’accès aux sacrements des « divorcés-remariés » à une voix de majorité, d’une part je n’en connais pas leur teneur exacte et d’autre part, c’est bien les conclusions tirés par le pape François qui donneront les nouvelles orientations, attendues ou pas…

    • Ma lettre à l’abbé Amar a été rédigée avant que l’on connaisse les résultats du vote. De fait, les pères ont voté à une voix de majorité, l’ouverture, dans certaines conditions et au cas par cas, de l’accès aux sacrements des divorcés remariés. Une victoire du pape François qui souhaitait une telle évolution mais dont il lui reste à préciser les modalités dans son exhortation post-synodale qui devrait être publiée d’ici un an.

  • Je m’interroge sur votre expression « sans l’octroi d’un minimum d’autonomie aux Eglises particulières »… car à vos yeux le sacrement du mariage pourrait être different suivant les Eglises particulières ? Indissoluble ou pas, monogame ou polygame,… Si des Eglises particulières ne pratiquent pas les sacrements de la même façon, ne serait-ce pas alors le signe qu’elles ne font plus partie de la même Eglise catholique ? Et pour tous les chrétiens qui n’acceptent pas la discipline sacramentelle catholique, l’invitation à se tourner vers d’autres Eglises chrétiennes ne me semble pas une aberration : ces Eglises sont chrétiennes puisqu’elles professent le Credo de Nicée Constantinople, et un chrétien peut faire son chemin avec le Christ dans ces Eglises. Dans le contexte oecuménique, on respectent les particularités canoniques ou sacramentelles comme des richesses… pourquoi est-ce que l’Eglise catholique devrait absolument changer pour se plier aux dictats du monde contemporain qui ne supporte plus aucune règle ? Ceux qui veulent une Eglise qui ordonne des femmes prêtres et remarie les divorcés peuvent se tourner vers les Eglises qui pratiquent cela… ils n’en seront pas moins chrétiens. Mais de grâce, laissons l’Eglise catholique avoir son propre chemin, dans la fidélité à sa tradition, qui n’est pas moins riche que celle des autres Eglises chrétiennes.

    • Mon propos était plus large que la seule discipline sacramentelle. Mais pour s’en tenir à cet aspect des choses cette discipline a évolué dans le temps comme le montrent les bons auteurs. Sur la « maîtrise de la fécondité » par les couples chrétiens c’est Pie XII qui en a reconnu, le premier, la légitimité, certes au travers des seules méthodes naturelles, enseignement confirmé par Paul VI et ses successeurs… mais le premier pas, le plus important, ayant été franchi, pourquoi ce blocage à franchir le second ? Sur les divorcés remariés, on doit à Jean-Paul II, dans Familiaris consortio, de les avoir réintégrés dans la communauté chrétienne en affirmant qu’ils étaient membres à part entière de l’Eglise; même question, pourquoi ne pas franchir le pas d’après qui les réaccepterait, sous certaines conditions, à la communion sacramentelle ? Je ne sache pas que quiconque conteste aujourd’hui les décisions de Pie XII et de Jean-Paul II, pourquoi poser en postulat qu’aller plus loin serait hérétique ?

      Dans son discours de clôture du synode le pape François a longuement insisté sur la notion d’inculturation du Christianisme. Je le cite : « L’inculturation n’affaiblit par les vraies valeurs mais démontre leur véritable force et leur authenticité, puisqu’elles s’adaptent sans se transformer, mais au contraire elles transforment pacifiquement et graduellement les différentes cultures. (…) L’expérience du Synode nous a fait aussi mieux comprendre que les vrais défenseurs de la doctrine ne sont pas ceux qui défendent la lettre mais l’esprit; non les idées mais l’homme; non les formules mais la gratuité de l’amour de Dieu et de son pardon. »

      Vous avez raison de souligner qu’après tout chrétiens réformés et orthodoxes appartiennent également au Christ et professent le même credo (et une même Eglise, sainte, catholique et apostolique qui dépasse donc largement la seule Eglise catholique romaine). Mais c’est à chacun, en conscience, à se déterminer. Je ne vois pas au nom de quoi je demanderais à mon frère « d’aller se faire voir ailleurs » uniquement parce qu’il est en désaccord avec tel ou tel enseignement « second » du magistère que le pape lui-même accepte de mettre en débat suivant en cela l’enseignement théologique le plus classique sur le sensus fidei. A Rome personne n’a envisagé de remettre en cause l’indissolubilité du mariage…

      Alors, oui, je pense qu’il faut laisser les épiscopats, vraisemblablement par continent ou sous-continent, régler les questions pastorales propres à la réalité de leurs peuples. J’ai évoqué la polygamie. J’aurai le même discours que pour les divorcés remariés dans nos pays. Je ne vois pas pourquoi j’interdirais à nos frères africains d’avoir une pastorale propre sur cette question, notamment concernant les chrétiens qui « viennent » de cette pratique traditionnelle.

      Dans Evangelii Gaudium, le pape François formule cette nécessité de pondérer la centralisation de l’Eglise catholique qui, on le sait, procède plus historiquement d’un accaparement du modèle impérial romain que de l’Evangile lui-même. Pour ne retenir que ces deux seules citations : « Je ne crois pas qu’on doive attendre du magistère papal une parole définitive ou complète sur toutes les questions qui concernent l’Eglise et le monde. Il n’est pas opportun que le pape remplace les Episcopats locaux dans le discernement de toutes les problématiques qui se pressentent sur leurs territoires. En ce sens, je sens la nécessité de progresser dans une « décentralisation » salutaire. » (§16) et, plus loin : « n’a pas encore été suffisamment explicité un statut des conférences épiscopales qui les conçoive comme sujet d’attributions concrètes, y compris une certaine autonomie doctrinale authentique. » (§ 32).

      Que l’on soit soucieux de préserver l’unité est légitime et nécessaire. Mais il est des procès d’intention qui ne sont pas conformes à la vérité des choses. Pardonnez-moi mais lorsque vous parlez de « se plier aux diktats du monde contemporain » vous n’êtes pas dans une approche raisonnée de la vie de l’Eglise, vous êtes dans l’idéologie. Lorsque vous parlez d’ordonner des femmes prêtres ou de remarier les divorcés, aucune de ces deux questions n’était à l’ordre du jour du synode et vous le savez parfaitement. Je trouve malhonnête et très peu catholique de caricaturer les propositions d’évolutions du pape François pour mieux justifier, finalement, votre défiance à son égard.

  • Sur les ondes de Radio Notre Dame, en réponse à une interview de Louis Daufresne, l’abbé Amar revient sur la polémique qui a justifié ma « lettre ouverte ». Chacun peut se reporter à ce court entretien :

    http://www.padreblog.fr/wp-content/uploads/sites/8/2015/10/LaCrxv3.mp3

    Il appelle de ma part deux brefs commentaires :

    – Le premier est qu’à aucune moment je n’ai évoqué l’argument « justice et miséricorde » que l’abbé Amar met en avant… parce qu’il a une réponse facile et toute faire à caser…
    – Le second est l’insistance avec laquelle il évoque « les prêtres de ma génération »… J’ai pour eux le plus grand respect mais je ne vois pas au nom de quoi l’Eglise devrait s’aligner sur la manière – tout aussi générationnelle que d’autres qu’ils contestent – qu’ils ont de concevoir leur sacerdoce ou le rôle qu’il conviendrait d’attribuer à la presse catholique.

  • Bonjour,

    Je pense qu’il y d’autres sujets d’indignation plus importants que cette polémique. Le père Amar a justement réagit à un titre déplacé d’un journal qui vise avant tout les catholiques. C’était une ligne sur facebook, il publie beaucoup de statuts sur les réseaux sociaux.
    De là à s’acharner sur lui, je ne vois pas l’intérêt.
    Un commentaire en parallèle, les prêtres de sa génération sont souvent (heureusement pas tout le temps) mieux formés (et donc leurs homélies plus intéressantes) et plus orientés vers l’évangélisation que la génération précédente qui a observé les catholiques déserter les églises sans réagir…. Merci à ces jeunes prêtres courageux et engagés.

    Amicalement
    JP

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