L’audience croissante de ce blog dit quelque chose du désir de débat dans l’Eglise… ou hors d’elle.
L’année qui s’achève restera dans bien des mémoires comme « annus horribilis » pour reprendre l’expression d’Elisabeth II à propos de 1992 (1). Non seulement la pandémie de coronavirus aura fait plus de soixante-mille victimes dans notre pays, mais elle l’aura plongé dans la crise économique, la montée de la pauvreté et l’incertitude face à l’avenir. Avec il est vrai, pour 2021, l’espoir né de la découverte de plusieurs vaccins. Une année également marquée par d’âpres débats autour de la laïcité, suite à l’assassinat de Samuel Paty et des trois victimes de l’église de Nice ; une année de bouleversements enfin pour l’Eglise catholique, suite aux deux confinements, à la suspension momentanée des cultes et au retour incertain des fidèles. Autant de sujets qui, de mois en mois, ont nourri les pages de ce blog et suscité vos réactions, faisant exploser tous les compteurs.
Il est de coutume dans la presse écrite qu’un directeur de publication vienne au moins une fois l’an dresser pour les lecteurs un bilan de santé du titre. Une manière de les tenir informés et de manifester par là, à leur égard, une forme d’’estime et de considération. Occasion également pour revenir, en qualitatif, sur les temps forts des douze mois écoulés. Je vous devais bien ça !
Une belle croissance sur onze ans.
L’année 2020, si calamiteuse par bien des aspects, aura été une bonne année pour le blogueur que je suis. Même si tout cela reste d’une extrême modestie au regard des scores enregistrés ici et là sur les réseaux sociaux. Mais, pour reprendre une expression un peu triviale, nous ne jouons pas dans la même cour. Intéresser son lecteur aux relations entre l’Eglise et la société, avec des articles souvent longs, n’est pas le chemin le plus assuré vers les audiences vertigineuses ! Ce qui n’est pas mon objectif. Mais enfin, l’année qui se termine aura été celle où ce blog, dans sa onzième année, aura franchi quelques caps symboliques : 300 articles mis en ligne depuis la création du site ( ce qui représente plus de 2 millions de “signes“), 10 000 commentaires validés, 500 000 pages vues, 600 abonnés prévenus lors de toute nouvelle publication… Et pour la première fois sur une année plus de 50 000 visiteurs comptabilisés par l’outil statistique de WordPress. Courbe en croissance continue donc avec une accélération en 2020 après un décrochage ponctuel l’année précédente dû au fait que l’écriture de mon livre m’avait tenu éloigné de ce blog une partie de l’année.
Les sujets les plus lus : les plus polémiques
Il est toujours intéressant de regarder quels articles ont été particulièrement lus et souvent partagés sur les réseaux sociaux. Ce n’est pas une surprise et cela confirme l’observation des années précédentes : les sujets les plus lus sont aussi les plus polémiques. J’assume d’autant plus volontiers que les lecteurs de ce blog me créditent généralement d’une certaine bienveillance. Et que pouvoir échanger librement sur des questions qui « font débat » – sans être pour autant débattues – fait partie de l’ADN de ce blog depuis sa création. Je pense ici aux querelles consécutives à la suspension du culte liée à la pandémie et aux conditions de sa reprise ; à la candidature d’Anne Soupa soulevant la question de la place des femmes dans l’Eglise mais aussi des modalités de désignation des évêques; aux révélations sur de nouvelles « affaires » de dérives dans certaines institutions catholiques; aux controverses entourant l’action du pape François…
Répondre à un besoin de débat
Les billets consacrés au débat sur la laïcité suite à l’assassinat de Samuel Paty, aux enseignements à tirer de la pandémie, aux publications du pape François (encycliques, livres…) où à divers autres aspects de la vie de l’Eglise n’arrivent qu’en seconde position.
Un autre critère d’évaluation est le nombre de commentaires enregistrés pour chacun de ces articles. Pour 2020, la « querelle » autour de la reprise des cultes (n°1) et la candidature d’Anne Soupa (n°3) ont été les deux sujets les plus débattus sur ce blog avec respectivement plus de 420 et 340 contributions. Loin derrière (dans une fourchette de 150 à 180 commentaires) on trouve, par ordre décroissant : Le dernier livre du pape François (n°10), celui du cardinal Sarah portant signature de Benoît XVI (n°9), les accusations portées contre Jean Vanier (n°6), le Trombinoscope de Golias sur les évêques de France (n°4), la pédophilie dans l’Eglise de 1789 à nos jours (n°7) mais également la décapitation de Samuel Paty qui arrive en onzième position dans le palmarès.
Autant de commentaires auxquels les lecteurs de ce blog peuvent toujours accéder puisqu’ils sont en ligne, à la suite des différents articles. En revanche, ce qu’ils ne perçoivent pas toujours est le prolongement des débats sur les réseaux sociaux – en réalité sur Facebook – où chacun de ces articles est présenté et mis en lien par mes soins. Là, le public étant plus divers, les échanges sont souvent plus vifs, plus acérés, parfois sans concession. Et si le lieu et le format (interventions plutôt brèves) se prêtent moins à des débats sur le fond (quoi que…) ils permettent en revanche une claire perception des oppositions et des lignes de fracture qui traversent l’opinion publique française et le monde catholique en particulier. Non pour m’en réjouir, ce qui n’aurait aucun sens, mais pour en prendre acte et voir comment il est possible ou non de les dépasser.
Quatre lignes de fracture
De l’ensemble de ces échanges (Commentaires de blog + Réseaux sociaux) je tirerais volontiers quatre observations concernant l’année qui se termine.
SUR LA LAICITE, le sentiment d’un clivage irréductible qui traverse aussi bien la communauté catholique que la société française dans son ensemble, entre les tenants d’une totale liberté d’expression et de caricature et ceux, dont je suis, qui pensent qu’il n’est pas de liberté sans responsabilité et que renoncer librement à un droit n’est pas forcément une régression de notre vécu démocratique ni une concession faite aux « séparatistes » islamistes..
SUR LE PAPE FRANCOIS, le constat d’une incompréhension, doublée de désapprobation qui peut se muer en haine véritable et désir de hâter la fin de son pontificat, de la part de certains fidèles qui se retrouvaient mieux dans la pensée et l’action de ses prédécesseurs : Benoît XBVI et Jean-Paul II, et en viennent parfois à soutenir des accusations graves, fomentées en certains milieux ecclésiastiques, alors que le plus souvent, derrière une ouverture pastorale certaine, les positions du pape François restent en matière doctrinale dans la droite ligne des pontificats précédents.
SUR L’EGLISE EN FRANCE, le creusement du fossé non seulement selon un schéma ancien entre conciliaires et intégristes ou traditionnalistes, mais entre les tenants de deux ecclésiologie : l’une centrée sur le prêtre, la sacralisé, la liturgie et la morale, le maintien de l’Eglise comme contre-culture face aux dérives du monde moderne, et l’autre plutôt centrée sur le sacerdoce commun des baptisés, la priorité donnée à la spiritualité, l’ouverture au pluralisme religieux et au dialogue, fut-il difficile, avec la société; avec l’incapacité manifeste du corps épiscopal de les faire se rencontrer et cohabiter dans une perspective pluraliste.
SUR LES DERIVES, la poursuite de révélations concernant des personnalités charismatiques et des communautés nouvelles où l’institution voyait « un nouveau printemps pour l’Eglise » et le maintien, chez beaucoup, d’une forme de déni et de réticence à faire toute la vérité, notamment sur la pédocriminalité dans les institutions catholiques, qui pourraient bien être bousculées fin 2021 avec la publication du rapport Sauvé.
Ecoute, générosité, respect mutuel, sang froid
Autant d’incompréhension, de dissensions, de silences contraints qui nourrissent chez beaucoup le désir de pouvoir échanger librement et au besoin hors des structures institutionnelles puisque ces dernières se montrent réticentes ou incapables d’organiser un débat qu’elles imaginent – à tort – source de divisions plus que facteur de compréhension dans la prise en compte d’une légitime diversité. C’est pourtant l’expérience, inaugurée en 2019 et prolongée par à-coups en 2020 qu’il m’a été donnée de vivre lors de conférences liées à la parution de mon livre Catholique en liberté (2) qui marquait précisément les dix ans de ce blog dont il reprenait la signature (Cath’lib) en titre. Expérience interrompue pour cause de coronavirus mais la liste des lieux où j’étais invité : Abbaye de Saint-Jacut de la mer, Trébeurden, Nîmes, Bordeaux, Toulouse, Lyon, Saint-Nazaire, Mulhouse… dit assez la demande d’échange et de rencontre formulée ici et là par des groupes, des libraires, des paroisses ou associations.
Etre l’un des lieux possibles de ce dialogue reste donc l’objectif essentiel de ce modeste blog. Et je suis bien conscient que les rendez-vous de 2021 exigeront de notre part à tous beaucoup d’écoute, de générosité, de respect mutuel et de sang froid.
Bonne, sainte et heureuse année à tous.
(1) Annus Horribilis est l’expression utilisée par la reine Elisabeth II d’Angleterre pour qualifier l’année 1992 dans un discours prononcé le 24 novembre 1992 à Guildhall quelques mois après le 40e anniversaire de son accession au trône. Une année marquée, il est vrai par deux divorces princiers, le livre accusateur de la princesse Diana et l’incendie du château de Windsor.
(2) René Poujol, Catholique en liberté, Ed. Salvator 2019, 224 p., 19,80 €.
« L’audience croissante de ce blog » dit-elle aussi quelque chose de la censure, où le catho en liberté accepte-t-il encore la contradiction en 2021 ? La seule à faire avancer en vérité. Puisque « la vérité vous rendra libre ». Mais pas seulement la vôtre hein, ni celle de votre croyance toute relative face aux débuts de l’humanité 😉 ! Voilà un bon test de « liberté », avant que le rideau ne se ferme peut-être définitivement, sur cet obscurantisme religieux qui, au cours des siècles, aura commis tant et tant d’effroyables dégâts sur les esprits et sur les corps. Au fait, les voyez-vous et, si tel est le cas, comment les voyez-vous, d’un point de vue historique ? Je veux dire, par rapport à une église qui s’est toujours pensée porteuse de vérité éternelle, malgré toutes les réformes auxquelles elle fut contrainte, souvent grâce à la société civile et aux médias ? Enfin, comment justifiez-vous encore, d’un point de vue raisonnable si possible, votre présence au sein d’une église qui n’aura eu de cesse de tuer la liberté de conscience au nom d’une pseudo vérité tombée du ciel, sans compter les massacres commis en son nom ? Merci, et bonne et heureuse année 2021 (pour ma part, je laisse tomber « sainte », on sait trop désormais dans quelles fanges elle nous mène) !
Je sais que pour vous, puisque vous l’avez écrit publiquement, « Catholique en liberté », titre à la fois de mon livre et de ce blog est un oxymore, c’est-à-dire une association de mots contradictoires. Ou l’on est catholique et donc sous la sujétion de croyances et d’une institution tyrannique ennemie des libertés : l’Eglise ; soit on est en liberté et alors ce ne peut être qu’au travers de l’apostasie. Voilà pour éclairer les lecteurs de ce blog qui ne vous connaissent pas !
J’ignore ce qui, dans votre histoire personnelle, vous a conduit à développer une telle haine pour l’Eglise. Et du coup à accabler de vos sarcasmes ceux qui, comme moi, continuent de se dire catholique. C’est également votre liberté et je la respecte.
Pour ce qui me concerne je continue d’affirmer, quoi qu’en puisse penser Michel Onfray, que la personne du Nazaréen est une rencontre qui continue de donner sens à ma vie. Je peux ne pas être d’accord avec le fonctionnement de l’institution ecclésiale, je peux interroger ses dogmes et ses croyances, je peux, comme d’autres, avec d’autres, me scandaliser qu’elle ait tant de fois fermé les yeux pour mieux se protéger. Mais enfin, j’ai des griefs identiques à l’égard de la République française et n’imagine pas pour autant rendre mon passeport.
Je sais que ces réponses sont bien incapables de vous satisfaire. Je les ai pourtant formulées, par respect et courtoisie, après avoir rendu public votre commentaire que je pouvais tout simplement ne pas valider. Mais sachant qu’entre nous le débat est de toute manière impossible puisqu’il nous manque le minimum de proximité nécessaire au dialogue, j’en resterai là et ne puis ici prendre l’engagement de valider d’autres contributions, de votre part, si elles restaient sur cette tonalité accusatoire sans appel.
J’ai la haine du mensonge, pas vous ? Il ne suffit pas de le dénoncer (enfin !) Il faut s’en extirper… enfin ! Je ne sais pas non plus qu’elle est votre histoire, pour continuer à « aimer » une église qui aura maltraité durant des siècles ses pauvres fidèles… De fait, vous ne répondez pas à mes objections. Par contre, si vous avez le n° de Gsm du nazaréen dont vous vous revendiquez avec tant d’assurance, je suis preneur. J’ai toujours préféré l’instigateur à ses sbires qui parlent pour lui. Après 21 s. où votre église parle en son nom, vous finirez peut-être par comprendre ma légitime défiance, ma légitime requête … Après tout, on est entre adultes raisonnables, non… ? Ce n’est pas une question de courtoisie, seulement de lucidité. Et s’il faut être censuré pour si peu, alors que dire ? Certes, vous n’êtes pas Charlie. Rassurez-moi, vous n’êtes pas non plus pour l’autodafé, selon d’illustres méthodes de votre église ?
« Voici ce que je vous commande : c’est de vous aimer les uns les autres.
Si le monde a de la haine contre vous, sachez qu’il en a eu d’abord contre moi.
Si vous apparteniez au monde, le monde aimerait ce qui est à lui. Mais vous n’appartenez pas au monde, puisque je vous ai choisis en vous prenant dans le monde ; voilà pourquoi le monde a de la haine contre vous.
Rappelez-vous la parole que je vous ai dite : un serviteur n’est pas plus grand que son maître. Si l’on m’a persécuté, on vous persécutera, vous aussi. Si l’on a gardé ma parole, on gardera aussi la vôtre.
Les gens vous traiteront ainsi à cause de mon nom, parce qu’ils ne connaissent pas Celui qui m’a envoyé.
Si je n’étais pas venu, si je ne leur avais pas parlé, ils n’auraient pas de péché ; mais à présent ils sont sans excuse pour leur péché.
Celui qui a de la haine contre moi a de la haine aussi contre mon Père.
Si je n’avais pas fait parmi eux ces œuvres que personne d’autre n’a faites, ils n’auraient pas de péché. Mais à présent, ils ont vu, et ils sont remplis de haine contre moi et contre mon Père.
Ainsi s’est accomplie cette parole écrite dans leur Loi : Ils m’ont haï sans raison.
Quand viendra le Défenseur, que je vous enverrai d’auprès du Père, lui, l’Esprit de vérité qui procède du Père, il rendra témoignage en ma faveur.
Et vous aussi, vous allez rendre témoignage, car vous êtes avec moi depuis le commencement. »
(Jean 15, 17-27)
Vous vous cachez derrière des versets pour botter en touche. Ca en dit long sur votre incapacité à répondre simplement, en vérité, à un questionnement légitime, que je ne suis pas le seul à poser, depuis la nuit des temps que votre croyance – une parmi des milliers d’autres, le voyez-vous seulement ? – se prend pour ce qu’elle n’a jamais été. Etes-vous prêt à échanger, en vidéo ?
Je trouve que ce serait bien de contextualiser, de donner le ou les sens possibles de quelques notions fondamentales dont celle de « monde », d’avoir un aperçu sur le ou les auteurs de cet Évangile, leurs intentions etc…
Sinon, de telles citations bibliques peuvent résonner différemment selon contexte et interlocuteurs et peuvent donner l’impression que l’on instrumentalise la Parole ( de Dieu ), et, le pire, sans même s’en rendre compte…
Cette tendance ( ou tentation) spontanée et inconsciente est si fréquente chez beaucoup de croyants qu’elle est devenue une sorte de réflexe, en face de tout problème ou interrogation. Alors que, si l’on y réfléchit, il y a là une sorte de violence symbolique ou psychologique faite à autrui ou à soi même assez incroyable qui peut aussi justifier de multiples manipulations au lieu d’ouvrir un espace de liberté intérieure.
Ceci dit, grand merci pour ce blogue de libre échange !
Et bonne année à tous !
Non, Pascal Hubert je ne me cache pas derrière les versets d’Evangile pour botter en touche !
Curieux regard suspicieux que le vôtre…
Non, Marie-Christine, je n’instrumentalise pas la Parole de Dieu parce que je la cite sans contextualiser !
J’ai cité au contraire cette péricope sans commentaire pour que chacun puisse la méditer.
J’ai donné les références, chacun aura pu aller à la source, et vous verrez qu’il s’agit du dernier discours de Jésus à ses disciples lors de la Cène (chapitres 13 à 17 en Jean), qui est en quelque sorte son testament.
Vous m’avez fait reproche de ne pas avoir répondu aux objections formulées dans votre premier commentaire. Parce que je n’aime pas, d’une manière générale, être « sommé ». Mais la tonalité de vos interventions étant devenues plus courtoises par rapport à ce que j’ai pu connaître dans un passé récent, notamment lors de la sortie de mon livre, je veux bien prolonger ici, avec vous, le dialogue que je tente de tenir avec les uns et les autres sur ce blog, sans imposer mon omniprésence et sans prétendre avoir réponse à tout. Je ne suis ici le représentant et le défenseur d’aucune institution. Je reste un chercheur de vérité.
Le « catho en liberté » acceptera-t-il la contradiction en 2021 ? Pas moins qu’en 2020 ! La seule contradiction qui m’intéresse est celle qui aide à grandir, à progresser, à nouer le dialogue, pas celle qui prétendant être elle-même détentrice d’une vérité qu’elle me conteste se donne pour unique objectif de me déniaiser définitivement d’un sentiment religieux qui ne pourrait être qu’obscurantisme. Si la seule liberté prétendument raisonnable que vous opposez à celle que je proclame en tant que « catholique en liberté » est la liberté d’abjurer ma foi et de ne pas croire à ces sornettes, alors ce n’est pas la liberté. La liberté suppose l’alternative, la possibilité d’un choix. M’imposer l’athéisme comme ultime liberté est la négation même de la liberté !
De l’inventaire dressé par vous des crimes imputables à l’Eglise catholique au cours de son histoire, je n’ai pas vraiment envie de débattre. Non par lâcheté mais parce que cette réalité est aujourd’hui d’une telle évidence qu’il ne sert en rien de s’en repaître. Et l’on n’explique pas vingt-siècles d’une histoire du monde, qui, de toute manière fut partout violente parce que la violence fait partie de la nature humaine, en quelques échanges sur un blog. Mais encore une fois, sans nier les souffrances endurées au nom de la religion, ni le bilan de l’Inquisition que les meilleurs spécialistes chiffrent à quelques dizaines de milliers de victimes, je n’ai pas gardé des cent millions de victimes d’Hitler, Staline, Mao et Pol Pot réunis, le sentiment que l’athéisme d’Etat ait réellement servi l’émancipation de l’homme.
Alors oui, je reste un chercheur de vérité. J’ai souvent écrit, notamment dans mon livre, que pour moi l’Eglise catholique n’était pas La Vérité (qui pour moi est le Christ, c’est le choix de ma liberté), ne détenait pas La Vérité mais était détentrice d’une part de la Vérité. Part que je reconnais aujourd’hui dans d’autres traditions religieuses et spirituelles comme d’ailleurs m’y invite le Concile Vatican II. Et j’aime la parole de Mgr Pierre Claverie disant qu’il « a besoin de la vérité des autres ». Moi aussi. J’ai tenté, il y a presque deux ans aujourd’hui, de comprendre entre Bénarès et Kathmandou, sur les pas du Bouddha, d’où pouvait venir l’attrait de nos contemporains, en Occident, pour le Bouddhisme cet athéisme paradoxalement devenu religion. Je crois avoir trouvé une esquisse de réponse : sans doute est-ce qu’en renvoyant à la liberté intérieure, à la conscience de chacun, le bouddhisme rejoint la pensée et l’individualisme contemporains. Sauf qu’à bien y réfléchir je trouve la même invitation dans le christianisme. Même si l’Eglise, au cours des siècles, s’est crue tenue de « baliser » (à l’excès) nos croyances à coup de proclamations dogmatiques destinées à éviter ce qu’elle pensait être des dérapages bien plus dangereux. Mais enfin personne dans l’Eglise catholique ne me contraint en conscience.
Je pense avoir la chance de vivre en un temps où, grâce au pouvoir civil qui a su à certains moments de notre histoire nous protéger contre les totalitarismes religieux, chacun est libre de chercher avec d’autres sa vérité. Une vérité qui peut aussi avoir sa dimension religieuse à faire prévaloir sur le même pouvoir civil lorsqu’il est tenté, se prenant lui-même pour un pouvoir absolu, d’encadrer et limiter nos libertés.
Je ne sais si j’ai répondu à vos objections. Mais je ne vois pas en quoi je serait tenu d’apporter des réponses à vos propres questionnements qui tiennent à la singularité de votre propre histoire.
La seule chose qui m’importe est de redire que l’espace ouvert par ce blog, même si de fait les débats s’organisent le plus souvent à partir de mes billets qui procèdent de mon seul choix, se veut ouvert et respectueux de chacun. Il n’est un outil de combat contre personne ni contre aucune institution. Et c’est bien, je crois, ainsi que le valident ses continuateurs les plus fidèles.
Le mot « apostasie » que vous utilisez (à la quatrième ligne de votre premier commentaire : « soit on est en liberté et alors ce ne peut être qu’au travers de l’apostasie ») est un mot clérical chargé d’histoire. Est-ce que le troisième homme décrit par (le jésuite) François Roustang en 1966 était un apostat ? Il y a des mots qui font entrer dans une forme de raisonnement obligé, c’est une méthode du « pouvoir » clérical que je récuse. Ainsi, parler d’une « apostasie de masse » comme on le dit à Rome ou dans certains cercles disqualifie toute forme de dissidence ou même de réflexion non autorisée. L’institution cléricale utilise aujourd’hui systématiquement ce terme qui vise aussi une forme de stigmatisation et de menace en se servant de la crainte archaïque que le sacré peut encore inspirer parfois chez les hommes (L. de Kérimel l’a encore souligné dernièrement dans son livre contre le « cléricalisme »). Certes, on pourrait relever la simple étymologie du mot signifiant en grec l’éloignement, mais aussi la révolte ou la rébellion. On comprend bien que Saint-François d’Assise soit une référence rhétorique de l’institution, mais c’est le droit canonique historique et actuel (le dernier code date de 1983) qui dit crument son idéal de gouvernement et la réalité du pouvoir clérical tel qu’elle entend l’exercer. Formellement il n’y a pas de liberté dans l’Eglise cléricale (l’usage des châtiments corporels fut méthodique dans l’Eglise et sa violence « symbolique » est toujours actuelle) : je fais donc partie des « apostats » qui ont quitté la vieille citadelle. Il est tout à fait normal au terme de mon itinéraire de ressentir la violence épistémique qui est une réalité encore aujourd’hui dans votre Eglise. D’une certaine manière mon propos est injuste à votre égard et je pense que c’est aussi la ruse de « l’institution ».
PS : vous parlez du « boudhisme » : le livre de Daniel Dubuisson : L’invention des religions, CNRS éditions 2020 signale la fonction « normative » du christianisme à l’égard des autres formes de croyance et la question de son pouvoir depuis le XVIe siècle dans ce que certains universitaires américains appellent l’impérialisme cognitif… ça s’appelle chez d’autres aussi l’intersectionnalité.
Je ne sais pas si je me suis bien fait comprendre. J’ai moi-même, notamment dans Catholique en liberté, dénoncé l’usage abusif fait par l’institution du terme d’apostasie pour disqualifier toute dissidence au sein de l’Eglise et nier l’existence d’un « schisme silencieux ». Pardon de me citer : « Et si ce schisme silencieux qui, en quelques décennies, a conduit des millions d’hommes et de femmes, élevés dans la religion catholique, à prendre leurs distances avec l’Église était également une forme, plus radicale encore, de « docilité à l’Esprit » ? Scandaleux, penseront certains ! Comment imaginer qu’une telle apostasie puisse être inspirée par l’Esprit saint ? Mais qui a parlé d’apostasie sinon le Vatican, comme pour mieux justifier son immobilisme, son incapacité à prendre en considération les interrogations d’une partie de ses fidèles? Par refus de toute remise en question! » (p.198)
Si je parle d’apostasie dans le commentaire auquel vous faites référence, c’est parce que Pascal Hubert considère que si je prétends être réellement un être « en liberté » je devrais être conséquent avec moi-même : abjurer ma foi et me faire débaptiser ! Ce que je conteste, estimant qu’il y a place pour une forme de liberté et une quète de vérité à l’intérieur même du catholicisme et de l’adhésion à la personne du Christ. Ce que chacun est libre d’apprécier à sa manière !
Oui je me souviens maintenant de votre propos dans votre livre. Le nœud gordien si je puis dire reste « l’institution », cette incarnation juridique inévitable, j’ai bien noté que votre liberté est revendiquée à l’intérieur du « catholicisme et de l’adhésion au Christ ». Si « l’institution » exige de vous l’abandon de votre « forme » de liberté, au nom de la fidélité qu’elle réclame de vous et qu’elle seule définit en Vérité, que diriez vous ? Hypothèse d’école me direz-vous. Mais d »autres que nous ont du, dans le passé, se déterminer au péril de leur vie.
Dieu merci l »Inquisition ne me semble guère d’actualité – hormis sur les réseaux sociaux ! Lol ! – Les risques pour moi ne sont donc pas bien grands. Mais par tempérament je ne me sens guère porté à l’obéissance contre mes convictions profondes.
Oui,
Il est paradoxal, au nom de la liberté, d’exiger de l’autre, qu’il renonce à sa propre liberté, au nom du respect des droits humains, de ne pas respecter les convictions d’autrui, au nom d’une intolérance passée et présente, de manifester la même intolérance, au nom de son propre cheminement de ne pas respecter le cheminement d’autrui.
En tout cas, merci René de nous apporter votre vision de l actualité , une vision positive et vivifiante que je qualifierai de moderne pour l’Eglise du Christ , qui survivra à la crise dont vous decrivez pourtant ci avant les si graves conséquences . Le Christ est notre esperance, notre lumière, notre force et notre salut. C’est pourquoi , malgré toutes nos difficultés, malgré l’horizon encore bien combre qui se profile, sachons faire preuve d’un optimisme mesuré .
Je vous souhaite donc à vous et à tous les votres une bonne et sainte annee.
Merci beaucoup de continuer ce blog, source d’ouverture, de réflexion et de prise de conscience.
Une vigie. Et aussi un veilleur.
Merci pour toutes ces réflexions qui alimentent aussi mes échanges avec les divers réseaux auxquels je participe… Prêtre engagé dans les mouvements ruraux, beaucoup plus à l’aise dans l’accompagnement des mouvements que dans la conduite d’une paroisse, je milite pour que les chrétiens aient de plus en plus la responsabilité (liée à leur baptême) de la vie des communautés locales et autres églises domestiques. Je me sens partie prenante de ce que le concile Vatican II a mis en avant quand il parlait du sacerdoce commun des baptisés. J’espère que l’année nouvelle nous permettra d’avancer encore davantage vers une Église des baptisés
Un petit tour d’horizon intéressant qui a dû vous prendre du temps
Bonne année, une année vraiment différente de celle de 2020 où nous puissions retrouver un peu de liberté sanitaire.
Peut-être à Toulouse après notre rendez-vous annulé en 2020?
Merci René, pour ce blog qui porte une vraie respiration. Merci pour tout le temps que vous nous consacrez pour que vive cet échange. Catholique et Liberté ne sont pas des mots qui doivent être opposés. On oublie trop souvent cette parole tirée de Jean15, 15 « Vous êtes mes amis » Il y a encore beaucoup de choses à vivre ensemble, chrétiens ou non chrétiens si on fait de cette parole un nouveau modèle pour demain. Pour cela il faudra reprendre beaucoup de choses à la racine.
Certes Mure, encore faut-il préciser de qui parle Jésus et donc se référer au verset entier et même au chapitre dont la tonalité confirme la citation faite par Michel de Guibert. Pour moi, exclure ainsi, car c’est bien de cela qu’il s’agit (il y a mes amis et les autres) est indigne de Jésus et utiliser ce texte pour « rassembler » est un contresens manifeste. Il semble que « la communauté Johannique » a été persécutée vers la fin du 1er siècle (les autres seraient « les juifs » traditionnels »).
Il est vrai que je ne suis pas Jean,ce que personne ne peu prétendre savoir d’autant que « l’auteur » est très probablement une communauté.
Merci René pour ce blog et tous ces articles et d’avoir crée ce lieu d’échange entre chrétiens …..pas toujours orthodoxes . En ce qui me concerne c’est le seul lieu où je peux échanger sur des questions religieuses et constater que mes opinions ne divergent pas tellement de mes contemporains chrétiens .
Mon curé: c’est bonjour et comment cela va donc trés limité , des conférences elles sont des monologues sans échange si ce n’est qu’avec d’éminents biblistes ou théologiens , mon évêque m’a personnellement remercié pour le denier du culte j’en ai profité pour lui faire part de la disparition du sacrement de pénitence dans une grande partie de son diocèse aucune réaction réponse.
Encore merci continuez en 2021, les sujets ne manquerons pas et bonne et sainte année 2021 pour vous et votre famille
Michel Jaumotte
ESPERANCE
Durant ces périodes de pandémie, nos paroles ne sont pas toujours porteuses d’espoir. Elles nous offrent souvent une multitude d’opinions dans un déluge de mots irresponsables et anxiogènes qui ne donne pas vraiment une idée d des réalités. En outre, une interprétation fondamentaliste des fins dernières tirée d’une lecture de l’Apocalypse, participe à un détournement de la vérité telle qu’on doit la comprendre. Bien sûr notre humanité a besoin de réconfort, d’explications émanant de milieux scientifiques et politiques, mais ce dont elle a le plus besoin c’est d’Espérance, terme qui se distingue nettement du mot : « Espoir ». On peut se trouver en manque d’espoir lorsque les choses se compliquent, mais dans tous les cas c’est l’Espérance qui nous guide. Elle fait appel à notre discernement et à notre responsabilité. Elle interpelle les croyants d’une manière particulière dans leur rapport à Dieu et à la création tout entière afin de se questionner en particulier au sujet de la souffrance humaine.
Ce que n’est pas l’Espérance :
Une vision du monde selon laquelle la Covid-19 serait considérée comme un châtiment divin ! Dieu aurait pu choisir un autre plan mais selon cette opinion franchement irrationnelle, il aurait consenti à laisser souffrir sa création afin qu’elle expie une faute collective, celle qui se trouve à la base de toutes les violences, de toutes les haines, de tous les désordres moraux et matériels. Nous sommes là aux antipodes du message de Noël qui annonce la douceur, l’humilité et le dépouillement d’un Dieu qui s’est incarné et qui est passé par le supplice de la croix. Il s’agit de raisonner dans une logique d’accomplissement et non dans une logique d’asservissement. La situation que nous traversons appelle à plus de sagesse et de méfiance dans les propos que nous tenons face aux épreuves multiples que nous déplorons. Tout comme le firent les écrivains à l’origine du Nouveau Testament, nous devons prendre de la distance avant de nous pencher sur l’essentiel. Nous devons nous placer non dans le cadre de ce que nous croyons connaitre réellement des choses de la vie mais dans une attitude transdisciplinaire, celle qui ne cesse sans relâche de faire le tour du mystère. Nous n’entrons pas vides dans la lecture des textes sacrés car notre esprit est rempli d’une foule d’inéluctables a priori qui fait que notre compréhension des choses demeurera toujours subjectives. Il ne s’agit pas de vouloir maitriser parfaitement une ou plusieurs disciplines. « Dieu n’est jamais l’objet de la connaissance que nous avons de lui » Ceci ne nous empêche pas de comprendre un Dieu qui ne cesse d’affirmer la dignité de l’homme quelles que soient sa situation physique et morale, sa religion et son origine géographique.
A propos de l’Espérance, le théologien allemand réformé Jürgen Moltmann « écrivait :
« L’espérance chrétienne vient de la proclamation par Jésus du Royaume de Dieu qui s’approche. Il prêchait aux pauvres, aux malades et aux désespérés qu’ils ont une espérance. Le second point d’ancrage est la résurrection des morts pour la vie éternelle. Nous ressuscitons aussitôt après la mort, pas seulement à la fin des jours sur nos tombes ». Pour lui le christianisme est tout entier eschatologique. A ses yeux la sous-estimation de cette réalité a encouragé une récupération et une instrumentalisation de l’Espérance. On la confond d’abord avec l’espoir d’un lendemain meilleur. Puis avec la promesse d’un bonheur ultime. Cette vision fondamentaliste déresponsabilise et vide cette réalité chrétienne de son sens véritable à tel point que l’on ne sait plus très bien de quoi l’on parle : c’est la petite vertu théologale. Lorsque j’avais associé la Foi et la Charité respectivement aux Eléments respectifs l’Air et le Feu, mon idée fut d’associer l’Espérance à l’Eau. On sait que l’eau c’est la Vie donc sur le plan évangélique il s’agit bien du Royaume.
Dans les chapitres 24 et 25 de l’évangile de Matthieu, Jésus appelle ses auditeurs à veiller, à attendre et à prévenir, laissant entendre que le signe véritable n’est pas celui auquel ils s’attendent. Il déconstruit pour ainsi dire leur motivation et leur vision première. Son objet est d’expliquer le comment veiller et de prévenir une pathologie de l’attente réduite à une expectative négative. Il fait appel à une vigilance responsable qui doit s’exercer dans les gestes de l’amour envers autrui. C’est ni plus ni moins que le tiers caché, cette réalité qui ne s’enferme pas dans nos habitudes marquées de logique binaire.
Aux disciples avides d’acquérir un savoir dans le cadre de l’Espace-Temps, Jésus prend soin de briser les sécurités acquises : « Si l’on vous dit que je suis là, c’est que je n’y suis pas ! »
Jésus déconstruit toute logique habituelle, avec lui, on passe dans le ternaire. En outre Jésus se montre par contre solidaire de ses frères humains.
« Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits, qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait ! » (Matthieu 25, 40 – 45)
Jésus se trouve donc là dans la souffrance de celles et de ceux qui ont faim d’être accueillis dans leur spécificité, dans ce qui les rend uniques,
L’Espérance biblique ne se limite pas à l’eschatologie. Le sabbat biblique entre dans le cadre d’une sagesse millénaire de libération, de reconnaissance de la dignité de l’humain.
Le septième jour le Décalogue appelle à ne faire aucun ouvrage, à honorer le repos de chacun et à commémorer la libération de l’esclavage (Deutéronome 5, 15) Les évangiles reprennent cette préoccupation divine d’apaiser l’être humain. Là également se situe l’Espérance qui se fonde sur la valeur et la dignité humaine. Là également on se retrouve plongé dans le ternaire. Les disciples de Jésus eurent faim et se mirent, un jour de sabbat, à arracher des épis dans un champ de blé et à les manger. Voyant cela les pharisiens lui dirent : « Vois tes disciples qui font ce qui n’est pas permis de faire pendant le sabbat ». Il leur répondit : « N’avez-vous pas lu ce que fit David, lorsqu’il eut faim, lui et ses compagnons, comment il est entré dans la maison de Dieu, et comment ils ont mangé les pains de l’offrande, que ni lui, ni ses compagnons n’avaient le droit de manger, mais seulement les prêtres ? » (Matthieu 12, 1-4)
Les futurs assassins du Christ ne supportent pas un tel visage divin et cette révolution qu’il opère au sein des règles sociales et religieuses. En fait c’est Jésus qui soulage et qui guérit et non la loi fixée par les hommes : un retournement de situation, là est aussi l’Espérance qui n’est pas fondée sur des œuvres humaines mais sur la Sagesse divine, là de nouveau se trouve le tiers caché. La religion, la foi, tout engagement aussi important, aussi nécessaire et fondamental qu’il soit, est appelé à composer avec cette radicale adaptation qui fait que la miséricorde passe en priorité avant le sacrifice et que notre liberté passe avant tout esclavage des idéologies les plus radicales. Reconnaissons que cette liberté qui nous est offerte est puissamment liée à une certaine complexité des choses : « Là où le péché abonde, la grâce surabonde ! » déclara Saint Paul
En somme une vision ouverte du christianisme ne peut conduire qu’à l’épanouissement de la personne humaine car celle-ci n’est pas isolée dans sa bulle terrestre. Notre cerveau contient non seulement le cosmos mais un quelque chose de plus grand encore. On sait que de la complexité nait des phénomènes d’émergence.
Un grand merci de plus à toi René.
Sans faire trop long : Au moins, en tant que chrétien (christien), attachons-nous au Christ. L’Évangile nous rapporte bien qu’Il ne restait pas centré sur le culte (dans temple ou synagogues) mais était très ouvert à ce que doit être une vie sociale (= communautaire). Il échangeait avec tout le monde, dans la rue et sur la montagne (n’était-ce pas une forme de laïcité ?). Il enseignait ce que doit être notre vie, qui peut se résumer en un seul mot : FRATERNITÉ (= amour, partage, respect …), une vie faite d’actes gérés par notre esprit, lui-même « envouté » par l’Esprit. Tellement simple à comprendre, et même si pas facile à vivre, faisons-en au moins notre idéal (= notre foi).
Il nous dit aussi comment voir Dieu : Un PÈRE – Le Sien – Le Nôtre (à développer)
Je trouve passionnante cette discussion sur la liberté et je vous remercie, René, de nous donner ici la possibilité d’échanger sans être obligés de rester consensuels, tout en essayant de ne pas trop heurter les sensibilités, ce qui est tellement inutile.
Etre catholique – pour moi je dirais plutôt « chrétienne » – en liberté m’apparait comme une gageure. Je n’ai pour ma part pas trouvé dans l’institution la liberté promise par le Christ, malgré tous mes efforts et ma bonne volonté. Pourtant, je n’ai pas de raisons de mettre en doute la parole de ceux qui disent l’y avoir trouvée. Problème de tempérament, d’éducation, de circonstances, que sais-je ?
Je ne renonce pourtant pas à la transcendance, je ne le peux tout simplement pas. Pour moi, la recherche de « Dieu » – et probablement du Christ comme visage de Dieu – , passe à présent par la quête urgente de ma liberté intérieure, sans que j’y voie de l’individualisme, bien au contraire, puisqu’il s’agit aussi d’une quête de fraternité et que la liberté de l’un n’a de sens que si elle entraîne celle de tous. Vaste et exigeant programme sans doute, mais il m’est impossible de m’y soustraire, sans me trahir moi-même.
Bonne année à tous !
Je devrais affiner mon propos : lorsque je dis que je vis en liberté dans mon Eglise, je ne prétends pas pour autant que, pour reprendre votre propre expression que « j’ai trouvé dans l’institution la liberté promise par le Christ ». D’abord je ne dirais pas que je fais partie de l’institution qui pour moi s’identifie à la structure hiérarchique et cléricale. En revanche j’appartiens toujours à l’Eglise comme « corps mystique du Christ » comme on dit dans le catéchisme. Et je considère qu’au sein de l’Eglise je puis jouir d’une certaine liberté personnelle sans que cette liberté soit « désapprouvée » ni « assumée » par l’institution. Soit dit autrement : dans ce blog, je m’exprime librement en chrétien. Dans le même temps, il m’arrive de regretter que l’institution hiérarchique dont je ne dépends pas et à laquelle je ne demande aucun nihil obstat, ne reconnaisse pas d’une manière ou d’une autre qu’il y a là une forme d’engagement légitime, en tant que laïc, au sein de mon Eglise. Mais peut-être est-ce trop demander !
A propos de mon appartenance à l’Eglise une anecdote me revient en mémoire. Un journaliste demandait un jour à Jacques Chaban Delmas pourquoi il restait membre du RPR, que venait de créer Jacques Chirac, et dont on pouvait penser – c’était en tout cas l’opinion de certains – qu’il n’avait plus grand chose de gaulliste ! Le maire de Bordeaux avait répondu « Je suis au RPR parce que malgré tout c’est encore là qu’il y a le plus de gaullistes ». Si je reste membre de l’Eglise catholique peut-être est-ce parce que c’est encore là qu’il y a le plus de chrétiens.
Votre propos est « signifiant ». La sociologie de la pratique (1930-1970) est dépassée. Car de l’Eglise, on retient ad extra aujourd’hui une visibilité institutionnelle encore forte, mais en même temps ad intra une prise de distance/un délitement de l’adhésion individuelle rapatriée dans une notion théologique assez plastique et accueillante moins « doctrinale » /moins doctrinaire. Par rapport au catéchisme classique qui norme l’attitude croyante voulue par l’institution l’écart est de plus en plus grand.
A Michel de Guibert
Je suis désolée d’avoir mal compris vos bonnes intentions.
Cependant, pour pouvoir « méditer » sur un texte, il me faut d’abord le comprendre avec mon intelligence ( même chose: qui l’a écrit ? Dans quel but ?) étant donné qu’un texte religieux est susceptible de multiples interprétations et « méditations » en fonction des réponses ( ou hypothèses de réponses ) à ces questions qui m’apparaissent essentielles. Et que l’Evangile de Jean est une élaboration théologique de la « figure « de Jesus qui demande à être comprise.
De plus, j’ai trop le souvenir de paroles bibliques effectivement instrumentalisées , et encore très récemment, pour servir d’excuses face à des révoltes et interrogations moralement légitimes venant du « monde «. Par exemple; « le serviteur n’est pas au-dessus de son maître. Si l’on m’a persécuté, on vous persécutera vous aussi etc… »
Je suis désolée donc car, même si je ne suis pas chrétienne ni même catholique, je ne peux abandonner ni mon sens moral ni mon intelligence pour le devenir.
Cela ne m’empêche pas de vous présenter mes meilleurs vœux.
Marie-Christine , pour devenir chrétienne et même catholique, personne ne vous demande de renoncer ni à vote intelligence ni à votre sens moral, loin de là;et quelle haute opinion avez-vous alors de ceux qui partagent la foi chrétienne…
A Marie-Christine,
Oui, il est toujours bon d’aller plus loin, avec son intelligence y comprise, mais il est bon d’abord de se laisser questionner, de se laisser « interpeler », de se laisser provoquer par un texte brut, avec son intelligence aussi, oui, mais pas seulement, avec son cœur aussi.
La Parole de Dieu, surtout en St Jean, est d’une richesse au-delà de notre intelligence !
Je ne vous demande pas d’abandonner votre intelligence, et encore moins votre « sens moral », je place moi-même la conscience très haut.
Permettez-moi de citer à nouveau à ce sujet le Cardinal John Henry Newman :
« La conscience est une loi de notre esprit, mais qui dépasse notre esprit, qui nous fait des injonctions, qui signifie responsabilité et devoir, crainte et espérance … Elle est la messagère de Celui qui, dans le monde de la nature comme dans celui de la grâce, nous parle à travers le voile, nous instruit et nous gouverne. La conscience est le premier de tous les vicaires du Christ. »
(Newman, lettre au Duc de Norfolk)
Avec mes meilleurs vœux et mes remerciements pour les vôtres.
Il serait bon Michel, de ne pas abuser les autres en mettant en avant votre cœur. Je veux dire par là que vous êtes, à votre insu sans doute, dans l’abus spirituel, en cherchant à imposer vos « vues » par des citations adroites puis en éludant les questions. L’évangile dit « selon St Jean » pose de graves problèmes que vous ne pouvez pas ignorer même si vous avez opté pour la légende transmise par St Irénée (Jean de Zébédée, Marie, Ephèse), peut-être ignorez-vous le mal qu’ont fait et font encore les représentations de Jean la tête d’enfants reposant sur le torse de Jésus, ah, l’amour d’amitié! La haute spiritualité du 4ème évangile est aussi indéniable que son historicité est des plus approximative. Je note que le « raisonnement » qui conduit Irénée à affirmer qu’il ne peut y avoir que 4 évangiles (4 vents, 4 points cardinaux, …) est aussi oiseux que celui qui vous conduit à donner tant d’autorité à « selon Jean » au point de prétendre qu’il pourrait nous rapporter les paroles de Jésus. Or c’est ce genre de prétention spirituelle qui conduit aux abus spirituels et psychologiques qui, bien plus que les abus sexuels, compromettent l’avenir de l’institution car il est probable que le pire soit à venir.
Je signale aux curieux la conférence de la Dr I. Chartier-Siben (fondatrice en 2002 de l’association « C’est à dire ») à la CORREF: regard d’une clinicienne sur les abus spirituels (La Croix 16/12/2019) et son audition par la Ciase du 28/02/2020 sur les abus sexuels.
Vous avez hélas raison Jean-Pierre. Je ne doute pas que Michel soit sincère car nous sommes tous éblouis par l’Evangile de Jean et par l’Ecriture en général. On y puise en toute bonne foi soi-même et on se la laisse décrypter par de plus « avancés » que nous, qui ont une autorité spirituelle pour le faire.
Mais j’ai expérimenté, nous avons été nombreux dans ce cas, combien la Parole peut être détournée, retournée, pervertie. Et c’est excessivement compliqué de s’en apercevoir, peut-ètre d’abord parce que c’est de l’ordre de l’impensable. C’est l’une des questions que l’on vous pose lorsque vous témoignez à la Ciase : « quelles sont les paroles de l’Ecriture dont on s’est servi pour vous abuser, sexuellement, spirituellement ou les deux ? » Ce sont d’ailleurs souvent les plus belles, celles qui vous ont touché « au coeur » justement.
L’audition d’Isabelle Siben est aussi passionnante et instructive que terrifiante. Nous n’en avons pas fini d’essayer de comprendre, de s’expliquer et d’expliquer ce qui a bien pu se passer pour que les choses tournent parfois si mal.
Merci, Anne, de m’accorder le bénéfice de la sincérité !
Mais s’il est interdit maintenant de citer l’Evangile, sans même avoir prétendu le décrypter, s’il est interdit de se laisser toucher le cœur par l’Evangile, cela va finir par devenir un peu compliqué sur ce blog de René…
En l’occurrence, je ne suis le directeur spirituel de personne, ni sur ce blog, ni ailleurs !
Jean-Pierre, votre regard suspicieux en dit une fois de plus davantage sur vous que sur votre interlocuteur.
Voilà que nous m’accusez d’abus spirituel (« à mon insu sans doute », vous êtes trop aimable !) et de mettre en avant mon cœur parce que j’ai simplement dit que l’on pouvait lire la Parole de Dieu avec le cœur autant qu’avec l’intelligence !
Je n’ai rien dit sur le St Jean auteur du 4ème Evangile ni sur « le disciple que Jésus aimait ».
Nous sommes d’accord sur le fait qu’il porte une haute spiritualité.
Je suis en revanche en désaccord avec vous et avec votre affirmation selon laquelle son historicité serait approximative.
Jean Carmignac avait au contraire démontré qu’il était bien plus précis que les synoptiques au point de vue historique et archéologique.
Quant à dire qu’il ne rapporterait pas les paroles de Jésus, je vous en laisse l’entière responsabilité.
Michel, vous n’étiez pas en cause dans ce que j’ai voulu dire. J’ai bien compris que vous ne vous posiez pas en père spirituel mais citiez un Evangile qui vous touche. Il s’agissait d’une extrapolation de ma part, d’une réflexion générale, j’aurais dû mieux le préciser.
Merci Anne pour cette mise au point et merci à vous et à d’autres d’alerter sur les risques potentiels d’instrumentalisation de la Parole de Dieu.
Mais ne nous interdisons pas de la citer et de nous en nourrir !
Michel,
Grand merci pour votre réponse.
Mais, désolée si je n’y peux rien, devant un texte religieux susceptible de multiples interpretations, j’ai besoin de comprendre avec mon intelligence les hypothèses de sens possibles, avant de donner mon adhésion par le cœur.
Et, si je ne m’abuse, c’est aussi le pré requis en « bonne » théologie et dans le cheminement de la « lectio divina »…
D’autre part, j’ai très longtemps pensé et réagi par rapport aux autres et à moi même comme vous jusqu’à ce que je prenne conscience de l’instrumentalisation que l’on pouvait faire de la Parole de Dieu pour parvenir à des fins en fait non respectueuses de la liberté et de la dignité des « enfants de Dieu ». J’insiste fortement sur ce dernier point car cela permet de comprendre comment, en toute bonne foi, on peut faire violence à autrui ou s’excuser à bon compte.
Merci, Marie-Christine.
Je comprends très bien votre souci et vous en remercie.
En l’occurrence, j’ai simplement cité une péricope qui m’est venue immédiatement à l’esprit en lisant un commentaire assez agressif plus haut… ni plus ni moins !
Aucun problème, Michel.
Je sais très bien que vous êtes sincère et de bonne foi.
Mais je pense que chacun réagit avec son histoire personnelle : ce qui inévitablement peut blesser d’autres et explique certaines réactions incompréhensibles pour qui n’a pas le même vécu.
Merci, Marie-Christine, de m’accorder le bénéfice de la sincérité et de la bonne foi !
Je comprends qu’un vécu autre puisse faire craindre une instrumentalisation de la Parole de Dieu, mais ne nous interdisons pas pour autant de la citer et de nous en nourrir !
Marie-Christine,je crois que vis à vis du catholicisme vous avez déclaré implicitement « Fontaine, je ne boirai pas de ton eau » Je pense donc que vous n’êtes pas seulement dans l’interrogation mais dans le rejet pur et simple.Dès lors à quoi pourrait-il servir de prolonger cette discussion laquelle me fait terriblement songé aux échanges que j’ai tenté d’avoir avec des intégristes purs et durs
Pour fréquenter ici et ailleurs et depuis longtemps les commentaires de Michel de Guibert , je peux attester qu’il ne s’est jamais posé en directeur spirituel de qui que ce soit La critique qui consiste à le traiter d’abuseur n’est ni sérieuse ni argumentée .
J’ai suffisamment moi même discuté , critiqué ses positions fondées sur des convictions réelles , assumées et toujours argumentées pour exclure ce genre de tentation dans ses prises de positions .
PS :je sais que Michel n’a pas besoin de mon aide , mais je n’ai pas pu résister à la tentation d’une BA en ce début d’année .
Merci Guy, vous commencez bien l’année 🙂
Bien sûr, répétons-le : personne n’a émis ces critiques ou soupçons contre Michel je pense. Me concernant, il s’est agi d’une idée qui en a entraîné une autre, avec assez de force pour éprouver le besoin de la partager, et je suis vraiment désolée, Michel, que cela ait pu paraître une attaque contre vous. Sincèrement.
je suis entièrement d’accort avec ce que dit Pascal Hubert ,pourtant comme René je suis toujours au sein de cette église que j’aime tant et je voudrais qu’elle change, mais je ne pense pas qu’on la fera changer en la quittant, c’est à dire de l’extérieur et je vois quand mème un changement qui s’amorce dans les discours de certains prélats ,donc pour moi c’est un signe d’espérance.Il ne faut pas oublier que l’on est qu’au début du changement,cela ne va pas se faire du jour au lendemain,faisons confiance à L’Esprit- Saint
« je voudrais qu’elle change, mais je ne pense pas qu’on la fera changer en la quittant »
…
« Faisons confiance à L’Esprit- Saint » écrivez-vous.
Conseiller de faire ainsi confiance à un Joker me semble être une solution de facilité, la solution bien connue de l’assistanat.
C’est bien vrai, Robert : faire confiance à l’Esprit Saint???
Non mais çà va pas!!!
Dominique,
Que votre oui soit oui, et votre non non.
Tout le reste n’est que gesticulation et ponctuation redondante.