Débriefing…

Du 19 au 22 février dernier, 10 jeunes inscrits aux prochaines JMJ de Madrid se sont formés, à Paris, pour être mieux à même de répondre aux médias, avant, pendant, après l’événement.

A la demande de la Conférence des évêques de France et sous la responsabilité de sœur Nathalie Becquart, j’ai donc animé quatre jours de media-training. Le programme était complet : présentation de l’univers des médias, règles de la communication, « éthique » de la communication dans l’Eglise mais également travail avec des comédiens sur le corps et la voix, exercices d’expression, travail sur l’élaboration d’un message… puis interviews en régie télé (avec l’aide amicale de Laurent Grzybowski) et studio de radio, avec au passage, la visite des rédactions de La Vie, du Jour du Seigneur, de La Croix et de Pèlerin. Bref un superbe programme.

Pourquoi m’attarder, aujourd’hui, sur cette expérience, dans ce blog ? Parce qu’elle me semble riche d’enseignement. La Croix et Pèlerin ont consacré chacun un article à cette formation. Et dans la foulée du papier de La Croix, Michel Grossiord s’en est fait l’écho dans sa revue de presse quotidienne sur Europe 1. Une évocation sympathique mais où deux expressions m’ont fait « tilter » : « prise en main par l’épiscopat » et « formatage »… entendez : des esprits. Ainsi reproche-t-on souvent à l’Eglise de ne pas savoir communiquer (je ne m’en suis pas privé, moi même, dans ce blog). Mais lorsqu’elle prend une initiative heureuse en ce sens, on la soupçonne… de manipulation. J’ai fait part de ces réflexion à Michel Grossiord qui m’a répondu, amicalement  : « Et si on entendait aussi, dans les médias, des jeunes cathos avec leur spontanéité, leurs mots à eux ? »

Excellent réflexe, cher confrère, sauf qu’au cours de ces quatre jours j’ai pu vérifier – plus que découvrir – que précisément, lorsqu’on fait parler ces jeunes cathos « avec leur spontanéité », ce ne sont pas leurs mots « à eux » qu’ils utilisent… mais ceux de la tribu, c’est-à-dire un jargon incompréhensible pour les non initiés. S’ils vont aux JMJ de Madrid, c’est, expliquent-ils, pour « témoigner de leur foi au Christ »,  « vivre une expérience de partage »,  « écouter des enseignements », « prier avec le Saint Père », ou « méditer sur leur vocation »…  Spontanément leur langage n’est pas celui « de la communication » mais « du témoignage ». Loin d’avoir été un « formatage » ces quatre jours de média training ont consisté, à l’inverse et volontairement, à les déprogrammer de ce jargon, pour les amener à parler, effectivement, avec des mots compréhensibles par tous, ceux de la communication. Ce qui n’interdit pas de parler avec son cœur ou ses tripes. Car le formatage était déjà là : résultant de leur appartenance à un milieu catho où l’on parle catho.

Le dernier jour de leur formation, partageant à midi un « plateau repas » avec une dizaine de journalistes appartenat à différents titres de Bayard, leur échange s’est transformé en véritable conférence de presse improvisée. Et ces dix jeunes « porte parole » nous ont surpris… (se sont eux-même surpris) à parler comme tout le monde, tout en énonçant des convictions personnelles profondes. Bref, le message était passé, la formation avait été efficace. D’autant plus efficace qu’arrivés avec quelques certitudes… ils sont repartis avec une claire conscience de devoir approfondir leurs connaissances sur le dogme et la réflexion éthique de l’Eglise.

Moralité de l’histoire : il y a bien d’autres lieux dans l’Eglise catholique où l’on serait bien inspiré de se former ainsi à la communication. Celle qui intègre le langage, la culture et les questions de l’autre, pour le rejoindre et lui parler vraiment. Ce que les Evangélistes avaient compris.