L’avancée du processus allemand au regard d’un certain piétinement du synode sur la synodalité inquiète en certains milieux d’Eglise.
(Cet article a été repris dans la lettre Notre pain quotidien, du p. Jean-Pierre Roche que je remercie vivement pour ce nouveau partage)
Dans un communiqué du Bureau de presse du Saint Siège, non signé, en date du 21 juillet, le Vatican revient à la charge contre le Synode Allemand dont les orientations constitueraient une menace pour l’unité de l’Eglise. Accusation réfutée quelques jours plus tard par les responsables du Chemin synodal allemand. Ils soulignent que les orientations votées n’ont pas valeur décisionnelle et que c’est donc là leur faire un mauvais procès. Analyse confirmée par un observateur français qui souligne de son côté, sur le site de Promesses d’Eglise, que la plupart des textes votés consistent « en une demande adressée à la conférence des Evêques allemands de porter la question au niveau de l’Eglise universelle. » Ce qui, à ce stade, est parfaitement conforme à l’esprit même de la synodalité telle que définie par le Code de droit canonique. Pourquoi donc cette nouvelle charge et à ce moment précis du processus synodal engagé par ailleurs par le pape François ?
Le texte romain ne fait pas dans la dentelle. « Afin de protéger la liberté du peuple de Dieu et l’exercice du ministère épiscopal, il semble nécessaire de préciser que le »Chemin synodal » en Allemagne n’a pas la faculté d’obliger les évêques et les fidèles à assumer de nouveaux modes de gouvernance et de nouvelles approches de la doctrine et de la morale. Il ne serait pas licite d’initier dans les diocèses, avant un accord convenu au niveau de l’Église universelle, de nouvelles structures officielles ou doctrines, qui représenteraient une blessure portée à la communion ecclésiale et une menace pour l’unité de l’Église.»
La presse catholique invitée à se faire l’écho du non possumus romain
L’information a aussitôt été reprise et commentée par la presse et les médias, notamment catholiques. C’était bien le but de la manœuvre. Sous le titre « Pourquoi Rome met un coup d’arrêt au Chemin synodal allemand » on peut lire dans la Vie : « Entre les lignes, Rome répond par un « nein » catégorique aux revendications exprimées par la majorité des 230 membres, à parité entre consacrés et laïcs, de cette assemblée, qui doit achever ses travaux en octobre prochain : ordination des femmes à la prêtrise, mariage des prêtres, et bénédictions des couples de même sexe. » Or, les choses paraissent plus complexes. Car si, de fait, une majorité des participants au Chemin synodal allemand, aussi bien évêques que prêtres, religieux ou laïcs, a voté de telles résolutions à une large majorité qualifiée supérieure aux deux tiers, ce n’est pas pour leur donner valeur décisionnelle.
Il n’y aura pas « de voie allemande spéciale »
C’est d’ailleurs ce qu’ont tenu à signifier, dès le 21 juillet au soir, dans un communiqué les responsables du Chemin synodal allemand : Irme Stetter-Karp, la présidente du Comité central des catholiques allemands, et Mgr Georg Bätzing, président de la conférence épiscopale. Les signataires précisent que « les résolutions de l’Assemblée synodale n’ont pas d’effet juridique en elles-mêmes ». Rappelant que le processus synodal allemand a été engagé dès 2019 (il devrait s’achever en 2023), en réponse à l’appel du pape François consécutif aux scandales sexuels dans l’Eglise, ils écrivent : « Nous ne nous lassons pas de souligner que l’Église en Allemagne ne suivra pas une “voie allemande spéciale”. Cependant, nous considérons qu’il est de notre devoir d’indiquer clairement où nous pensons que des changements sont nécessaires. (…) Nous avons déjà le sentiment que les problèmes et les questions que nous avons identifiés sont similaires dans le monde entier.»
Le témoignage également nuancé d’un observateur français
Cette approche est confirmée par Jérôme Vignon (1) officiellement agréé par le Chemin synodal allemand comme l’un des deux observateurs français ( l’autre étant Mgr Didier Berthet , évêque de Saint-Dié) dans une synthèse de la troisième session qui s’est tenue les 3, 4 et 5 février 2022, publiée sur le site de Promesses d’Eglise. (2) Jérôme Vignon y rend compte, dans le détail, des décisions adoptées lors de cette session. Ce qu’il évoque, concernant par exemple la question de l’accès des femmes à des ministères ordonnés, question sensible au même titre que l’obligation du célibat ecclésiastique ou la question homosexuelle, dit bien l’esprit qui est celui du Chemin synodal et qui ne correspond pas vraiment aux accusations romaines. Il écrit :
« Le texte fondamental devant servir de base aux propositions de réformes sur la place des femmes dans les fonctions et ministères de l’Eglise venait lui aussi en seconde lecture. Son adoption acquise elle aussi à une forte majorité, y compris le collège des évêques, a donné lieu à la plus longue salve d’applaudissements jamais enregistrée depuis les débuts du chemin synodal. (…) Le texte fondamental ne se prononce pas directement sur l’accès des femmes aux responsabilités et aux ministères. Il a pour objet de fonder les débats sur cet accès, y compris les ministères ordonnés, sur la prise en compte du principe d’une égalité en dignité des hommes et des femmes au regard de l’annonce de l’évangile. (…) Ce texte fondamental ne se prononce pas pour l’accès des femmes à tel ou tel ministère. Cette discussion est laissée aux textes d’application qui devront tenir compte de l’état général des convictions et pratiques de l’Eglise universelle. (…) Ainsi le texte sur les femmes et les ministères ordonnés consiste-t-il en une demande adressée à la Conférence des Evêques allemands de porter la question au niveau de l’Eglise universelle. » Ce qui est très exactement l’esprit et la lettre de la démarche synodale engagée par le pape François.
Mettre le document préparatoire du Synode à l’abri des « pressions » allemandes
Comment expliquer, dans ce contexte, la déclaration Vaticane qui bien évidemment n’est pas fortuite ? Difficile de lire dans le marc de café curial mais on peut au moins se risquer à quelque hypothèse. Le synode sur la synodalité voulu par le pape François pour l’Eglise universelle a connu, au cours de l’année écoulée, sa première phase au niveau des diocèses et des Eglises particulières à travers le monde. J’en ai rendu compte, pour la France, dans un billet récent. Il n’est pas exclu que les remontées aient été en deçà des attentes romaines. On déplore notamment, ici et là, le peu d’engagement des jeunes générations catholiques. Ce qui a eu pour effet de renforcer le poids relatif des « boomers » (entendez la génération conciliaire) très – trop ? – présente dans les structures d’Eglise. Ce qui n’est pas un péché en soi mais ne permet pas, de fait, de refléter la sensibilité perçue parfois comme plus traditionnelle de leurs cadets.
L’été sera sans doute consacré, à Rome, à la finalisation du document « Instrumentum laboris » qui servira de base à la seconde phase du synode, par continent, à partir de l’automne, avant la tenue de l’Assemblée conclusive des évêques au mois d’octobre 2023. Il n’est pas interdit de penser qu’à Rome tout le monde ne se réjouit pas de voir le Chemin synodal allemand, qui a pris une longueur d’avance de par la qualité de son travail, puisse laisser entendre que les questions abordées par lui se retrouvent en réalité dans la plupart des Eglises, et donc suggérer que ses propres réponses pourraient avoir valeur universelle.
La peur permanente de voir la diversité compromettre l’unité
On connaît le souhait exprimé par le pape François depuis son élection en 2013, de parvenir à donner une forme de plus grande autonomie aux Eglises particulières et aux Conférences épiscopales pour mieux adapter leur pastorale – voire même une certaine doctrine – aux réalités culturelles qui leurs sont spécifiques. Or, note encore Jérôme Vignon dans son compte rendu : « Le texte sur le diaconat féminin charge la Conférence des évêques de négocier à Rome un “indult“ (une exception) autorisant pour l’Eglise catholique en Allemagne l’ordination diaconale pour les femmes. » Positions qui semble aujourd’hui soutenue par le cardinal Marx lui-même, un temps réservé. Nous sommes là totalement dans l’esprit des évolutions souhaitées pour l’Eglise universelle par le pape François mais pour lesquelles il a besoin d’un accord formel du synode des évêques qui se réunira à l’automne 2023. (3) Mais nous sommes là, tout autant, dans le type même de propositions jugées mortifères par une partie de la curie – et des milieux catholiques conservateurs – qui y voient un risque d’éclatement de l’unité de l’Eglise et de remise en cause de la doctrine. Pour eux, il est donc essentiel que ce type « d’ouverture » ne figure d’aucune manière dans le document de travail de septembre. Déconsidérer publiquement le Chemin synodal allemand en l’accusant de vouloir mettre unilatéralement ses recommandations en œuvre pourrait y contribuer. On retrouve là le même détournement pervers que dans l’article du Figaro du 15 juin dernier titré « Les évêques de France prêts à un big bang de l’Eglise » à propos d’un document qui ne prétendait être autre autre que la simple synthèse – honnête – des remontées des diocèses dans le cadre de la consultation synodale voulue par le pape François. Pas un plan d’action.
Percer la pensée du pape François…
Redisons-le : le communiqué du Vatican du 21 juillet ne porte aucune signature. Pour qui connaît les procédures romaines et le « poids des mots », en fonction de leur origine, cet anonymat invite à la plus grande prudence. Reste la question que chacun a en tête : cette publication s’est-elle faite avec l’aval du pape François ? La réponse, comme toujours le concernant, n’est pas simple ! Le 15 juin, la revue italienne Civita cattolica rendait public un entretien accordé par lui le 19 mai précédent aux responsables des principales revues culturelles jésuites. Interrogé sur le Chemin synodal allemand il avait répondu : « J’ai dit au président de la Conférence épiscopale allemande, Mgr Bätzing : « Il y a une très bonne Église évangélique en Allemagne. Nous n’en voulons pas deux ». Le problème se pose lorsque la voie synodale vient des élites intellectuelles, théologiques, et est très influencée par des pressions extérieures. Il y a des diocèses où le chemin synodal se fait avec les fidèles, avec les gens, lentement. »
Nul doute que cette réponse corresponde à sa pensée profonde. Mais il déclarait tout autant en août 2013 aux évêques du Brésil, à l’occasion des JMJ : « Peut-être l’Eglise avait-elle des réponses pour l’enfance de l’homme mais non pour son âge adulte. » Que cinq siècles après une première confrontation du catholicisme avec la modernité de la Renaissance qui s’est traduite par l’émergence du protestantisme (et de la contre-réforme catholique), une même urgence à inculturer le christianisme dans la post-modernité conduise aux propositions qui se font jour de manière convergente ici et là doit interroger. Cela traduit moins une séduction de certains catholiques pour la Réforme qu’un désir renouvelé de fidélité à l’Evangile dans un contexte de crise profonde. Il serait risqué de se tromper de diagnostic.
A ce jour, il semble que les artisans du Chemin synodal allemand, mettant un peu d’eau dans leur vin, aient compris qu’il leur fallait chercher une possible convergence avec le synode en cours au niveau de l’Eglise universelle et tenter d’y faire entendre leur voix : une parmi d’autres. Si ce plaidoyer pour une certaine autonomie des Eglises continentales – voulue par le pape François comme réponse à la crise – n’était finalement pas pris en considération par l’Assemblée synodale de 2023… au motif que c’est là une idée d’intellectuels qui ne rencontrerait pas l’assentiment des simples fidèles partout à travers le monde, alors, mais alors seulement, il y aurait une réelle inquiétude à avoir pour l’unité de l’Eglise. Pas aujourd’hui !
- Jérôme Vignon est notamment ancien Président des Semaines sociales de France.
- Promesses d’Eglise regroupe une cinquantaine d’associations et mouvements d’Eglise parmi les plus représentatifs. Deux évêques ont été désignés par leurs pairs pour être leurs représentants auprès de cette instance : Mgr François Fonlupt archevêque d’Avignon et Mgr Dominque Blanchet, évêque de Créteil, vice-président de la Cef.
- Dans le même esprit, l’épiscopat d’Amazonie pourrait solliciter un indult comparable visant à ordonner des hommes mariés, comme le principe en avait été adopté lors du Synode de 2019.
J’ai lu récemment « Cent ans de gouvernement de l’Eglise de France », compte-rendu d’un colloque qui montre comment l’Eglise a organisé sa gouvernance nationale, depuis l’Assemblée des sardinaux et archevêques des années 20 jusqu’à la CEF d’aujourd’hui. Ce que le Vatican craint depuis cent ans prend forme aujourd’hui : voir une conférence épiscopale entière prendre l’initiative d’une démarche synodale pouvant émettre des propositions pas du tout dans la ligne vaticane. Déja le synode amazonien s’etait risqué à de timides propositions, et la CEF a transmis les propositions émanant des diocèses sans les censurer. Une première ! Songeons que l’ACA des années 20 devait soumettre l’odre du jour (bien timide) de ses rencontres à Rome. Ce n’est pas gagné, mais l’évolution est considérable
A Bruno
Pour être précis la CEF a transmis les propositions émanant des diocèses en refusant de prendre position . Une manière de signifier au vatican que les évêques s’en lavent les mains .
Sans doute suis naïf , mais je m’étonne que l’on puise considérer comme un grand progrès que dans le cadre d’une consultation des fidèles on transmettre les résultats sans les censurer . Cela en dit long sur la culture écclésiale .
Sauf erreur de ma part , c’est un principe de gouvernance inscrit dans la tradition de l’église , quand bien même le magistère s’assoit dessus de puis longtemps :
» quod omnes tangit, ab omnibus tractari et approbari débet »
Je suis sans doute trop traditionaliste pour l’église telle qu’elle est aujourd’hui .
Une fois de plus je vous trouve « systématiquement » négatif. Bien sûr que faire remonter des propositions à Rome sans les censurer (on dit pudiquement opérer un discernement) est un réel progrès. J’ai raconté dans Catholique en liberté comment lors du Synode diocésain de Créteil une proposition émanant de la base, demandant à notre éveque – à l’époque Michel Santier – de se faire le porte parole des fidèles auprès des instances Cef et vaticanes pour que soit examinée l’opportunité du diaconat féminin n’a même pas été mise au vote ni à plus forte taison transmise à Rome puisque cela contrevenait à une directive du dicastère des évêques stipulant une interdiction totale de laisser débattre et de faire remonter au Vatican des préconisations concernant des dispositions dépendant du seul magistère… Pardonnez-moi mais lorsqu’on a vécu ça, ce qui est mon cas, on apprécie le bond en avant !
A René .Lorsque l’on a vécu ça comme vous dites qu’elle confiance peut on encore accorder aux évêques et a l’institution ?
Contrairement à beaucoup j’ai eu une excellente expérience de l’eglise qui n’a rien a voir avec ce que l’on découvre aujourd’hui de sa réalité (aucun aumonier pedocriminel ou ayant des comportements inappropriés aucune rumeur d’aucun ordre .Un évêque toujours honoré d’être convie à la table familale et assez transparent sur sa gouvernance
) Alors non , je ne peux pas considérer comme réjouissant que le mensonge et la forfaiture ne soient plus de modes normaux de gouvernance dans l’église . Dans quel monde vivez vous .? Moi qui ait connu l’Etat et parfois la raison d’Etat je peux affirmer que ce monde là qui peut tout sacrifier à la paix civile est moins hypocrite et beaucoup plus sain moralement que cette église dont le comportement passé et parfois présent ne vous scandalise même plus .
Mon cher René,
Comme souvent, je me retrouve bien dans ton commentaire sur le relations entre l’Eglise qui est en Allemagne et « le Vatican ».
Mais je ne peux pas te laisser dire – sans réagir – que « Promesses d’Eglise regroupe, sous l’autorité de la Cef, une cinquantaine d’associations et mouvements », car cela n’est pas juste. Ce regroupement n’est pas « sous l’autorité de la Cef ». Les évêques ont délégués deux des leurs pour suivre leurs travaux, c’est tout. Il se trouve que l’un des deux est notre évêque, Dominique Blanchet, évêque de Créteil, et je peux te dire qu’il est extrêmement soucieux de respecter l’autonomie des mouvements, que ce soit dans son diocèse ou au plan national.
Je suis sûr que Promesses d’Eglise pourra te le confirmer.
Avec toute mon a:mitié, Jean-Pierre
Merci cher Jean-Pierre de ce rectificatif que je vais intégrer sans problème à mon billet. Ou plus exactement dans la note en bas de page… Mais je vois que tien ne t’échappe. Et à nouveau merci – ici publiquement – des reprises de nombre de mes billets dans ta lettre Notre pain quotidien.
A Jean Pierre
Promesse d’eglise ne réunit que les mouvements estampillés « mouvements d’église » c’est à dire inféodés aux évêques . Il n’a donc pas besoin d’être placé sous l’autorité de la CEF , il y est de facto déjà puisque toutes ses composantes le sont .
Peut on vous conseiller de relire « le chien et le loup « de la Fontaine ?
Je trouve cette réaction du vatican , à ce moment précis de la démarche synodale extrêmement intéressante . Au delà de son objet précis elle révèle la conception du dialogue , du rôle du peuple de baptisés et en fin de compte de la conception de l’église qui est celle du magistère .
Sur les faits , les évêques allemands ont scrupuleusement respecté la feuille de route de la démarche synodale et sont donc à ce moment de la démarche totalement irréprochables , ils ont rendu compte de ce qui est ressorti de la consultation du peuple fidèle . Contrairement à leurs homologues français ils ont fait leur les propositions des fidèles . ce qui est plus courageux et moins hypocrite .
Alors que leur reproche t on : d’être à l’écoute des fidèles ?
En réalité cette réaction du Vatican est une réaction instinctive de peur révélatrice de l’état d’esprit de gens qui se sentent menacés et pour lesquels l’altérité légitime n’existe pas . Comment en effet expliquer cette diatribe contre un épiscopat qui prétendrait à imposer à l’église toute entière ses propres vues ?
– Alors que q’une part l’épiscopat allemand ne revendique rien à ce stade; il dresse un état des lieux . — -D’autre part les conférences nationales épiscopales n’ont en droit canon aucune autorité juridique . l’église ne connait que l’évêque et l’évêque seul . Il n’y a donc aucune raison de se sentir menacé par une conférence épiscopale qui n’a aucune compétence en droit .
Comme je l’ai dit dès le début de cette démarche synodale , c’est pour le vatican un exercice purement cosmétique devant permettre de relégitimer les positions du magistère en donnant aux fidèles l’occasion de dire ce qu’ils ont sur le coeur sachant que l’on en tiendra bien évidemment aucun compte . La seule finalité d’un synode c’est « cause toujours »
Ce que le vatican reproche aux évêques allemands c’est d’avoir refusé tout ce trompe l’oeil et d’avoir vraiment joué le jeu du synode . Selon le vatican ,il fallait comprendre : on fait semblant de vous consulter , vous faites semblant de répondre sachant que votre réponse doit être conforme à nos attentes . Ces « mauvais » évêques allemands ont refusée jeu de rôle traditionnel .
C’est tout à leur honneur . On comprend que cela inquiète et agace au Vatican d’autant plus que cela vient d’une église riche . Ces propositions seraient venues de la conférence épiscopale togolaise ou sénégalaise , le vatican ne serait même pas donné la peine de les mentionner .
@ Guy
Sur ce coup là, Guy j’espère que vous vous trompez.
Même si je crains que les réformes, me paraissant nécessaires, ne viennent que très lentement, au compte-goutte. Je garde tout de même espoir (je n’ose dire espérance) que des graines soient semées et finissent par pousser à termes… Ce que je crains le plus, c’est le découragement, à commencer par le mien. Tant de catholiques sont déjà partis sur la pointe des pieds (sans refaire le débat autour du livre de DHL).
Mais des divines surprises sont toujours possibles (comme l’ont été Jean XXIII et Vatican II en leurs temps). François lui-même a été pour moi une bonne surprise, surtout après JP II et B XVI. Espérons que tout cela se sera pas qu’un feu de pailles et que la bonne direction sera prise malgré les déceptions comme sur le synode sur l’Amazonie.
A Dominique
J’aimerais tant me tromper .
-Jean XXIII et le concile sont me semble t il beaucoup plus redevables à l’air du temps des années 60 qu’à une véritable volonté de l’église elle même de se reformer .L’ambiguïté des textes du concile montre que la résistance a été féroce et a conduit à la remise en cause de toutes les avancées du Concile ces dernières années .
Quant à François , en dépit de tout son engagement pour faire évoluer l’eglise , on a pu constater qu’il n’a aucune marge de manoeuvre sans risquer le schisme : échec du synode sur l’Amazonie , palinodies de l’actuel synode sur la synodalite .vœux pieux sur le clericalisme et les abus sexuels et spirituels ..
Je cherche en vain un signe positif .Mais je dois mal voir puisque d’aucuns en voient partout.
On ne tripatouille olus les résultat du synode , quel progrès! On n’en écrit plus les conclusions à l’avance , quelle révolution !
Les évêques français refusent de s’engager sur les résultats du synode , quelle sagesse !
Désolé je ne mange pas de ce pain là qui a un fort goût d’alienation à l’institution ecclesiale .
J’avais eu quelques espoirs à l’époque ou François avait dit « ne pas avoir peur d’un schisme », mais je crois que ce n’étaient que des paroles en l’air.
Je m’aperçoit qu’il n’en est rien, il me semble tétanisé par sa propre audace synodale, il ne parvient pas a « mettre au pas » les membres de la curie qui font obstruction par principe à tout changement.
J’en viens à penser que seul un schisme pourrait (peut-être) sauver l’Eglise, lui permettre de se reconstruire, et peut-être de réellement s’inculturer dans les différents pays.
Comme Guy Legrand l’a parfaitement décrit sur FB : « Les évêques allemands ont selon Rome le grand tort d’avoir pris la démarche synodale au sérieux. Pour Rome, le synode c’est un jeu d’enfant : on ferait semblant de vous demander votre avis, vous feriez semblant de le donner. Mais chacun de nous sait bien que ce n’est qu’un faux semblant et la règle du jeu non écrite est que vous disiez à Rome ce qu’il souhaite entendre. Des petits garçons ce quarteron de cardinaux romains malheureusement pas encore en retraite. Ils jouent avec le feu . »
Juste une remarque sur le fait que le communiqué du vatican ne soit pas signé .
Dans un état de droit moderne , toute personne a le droit de savoir quel est l’auteur d’un courrier émanant des services de l’Etat afin de pouvoir soit lui demander des explications , soit pouvoir contester le contenu de ce courrier , soit encore introduire une action devant une juridiction . parce que dans un état de droit , la personne humaine est considérée comme ayant aussi des droits . ce qui n’est pas le cas dans l’église y compris lorsque le vatican s’adresse à ses évêques .
Ne pas signer ce communiquer est révélateur d’un système qui érige l’irresponsabilité en règle de conduite et qui veut gouverner par la peur en laissant croire que ses décisions proviennent d’une nébuleuse anonyme et donc potentiellement menaçante . En régime soviétique on appelait cela « les organes » . La même logique totalitaire .
Je tiens à remercier René pour la qualité de son analyse du dilemme qui oppose aujourd’hui le « Vatican », en ce compris le Pape François lui-même et la démarche du Chemin synodal allemand . Celle-ci dès l’origine , initiée par la Conférence allemande des évêques , puis approuvée par les laïcs, ne prétendait pas être un synode au sens canonique , mais un processus original lié à la spécificité des difficultés rencontrées par l’Eglise allemande en raison de sa forte intégration à la société suite aux abus sexuels . Les effets des orientations ou décisions prises dans le cadre de cette démarche singulière étaient donc strictement ordonnés à la subsidiarité canonique au sein de l’Eglise universelle . En cela le titre du billet de René est parfaitement pertinent.
L’éclairage sur la position du Pape François ne l’est pas moins et , pour ce qui me concerne , m’aide à répondre à mes propres interrogations . Vu du Pape , les structures de l’église en Allemagne seraient élitistes … et donc peu apte à lutter vraiment contre le cléricalisme . En conscience , je ne puis partager ce soupçon au vu de ma perception de la simplicité foncière des membres du chemin synodal , de leurs origines sociales très diverses et de leur souci des milieux populaires où ils sont baignés de par l’importance des fonctions diaconales exercées par l’église allemande . S’il y a dans la société allemande une césure , ce n’est pas celle de nos » gilets jaunes » , mais plutôt celle qui sépare encore les Allemands de l’Ouest et ceux issus de l’ancienne RDA , coupure qui en politique se traduit par l’émergence de l’AFD . Cet écosystème social est très loin de celui des pays d’Amérique latine et il est possible que le Pape ne le perçoive pas ainsi .
Si les décisions votées par le CS allemand ( qui ont vocation à se traduire en actions concrètes sous réserve de l’application du principe de subsidiarité) inquiètent par leur avance au regard de l’état du synode universel , on ne parle pas assez des textes d’orientation ( Grundtexte) proprement dits . Or ceux-ci comportent une réelle créativité théologique , fruit d’un travail synodal exceptionnellement fouillé et loyal en terme de respect des diversités . Cela vaut pour l’articulation des « signes des temps » avec les autres lieux théologiques par exemple . Ce sont des avancées qui ne seraient pas indignes d’un concile ni d’un synode universel. J’espère que les responsables du CS auront la sagesse que leur prète René et sauront , en mettant de « l’eau dans leur vin » , porter au coeur du synode universel ce type de contribution . Au demeurant , la prochaine assemblée plénière du CS allemand se tient les 7,8 et 9 septembre . Rien n’indique pour l’instant qu’elle ait été remise en cause et une structure de coordination entre le secrétariat du Synode mondial et le CS existe depuis l’an dernier qui devrait jouer son rôle .
Mettre de l’eau dans son vin de la part du chemin synodal allemand serait effectivement une attitude responsable pour se donner une chance de faire quand même bouger les choses . Des propositions considérées comme extrémistes pourraient apparaître comme une provocation et donc aboutir à un rejet de principe .
Tout cela serait entendable si l’on était dans le cadre d’une négociation, ou l’on cherche par la confrontation de point de vue différents a créer un consensus
Mais jusqu’à preuve du contraire , la posture du Vatican n’est pas celle d’une ouverture à une logique de negociation avec les épiscopats nationaux .
Dans un tel contexte , mettre de l’eau dans son vin, s’apparente à une reddition en rase campagne .
La encore je souhaiterais me tromper mais le ton et la forme du communiqué du Vatican ne m’incitent pas à l’optimisme .
Je partage largement l’analyse – le constat ? – de Guy Legrand quant au fonctionnement de l’Eglise concernant ce synode (et en général d’ailleurs)… Je précise que je m’y intéresse beaucoup, mais que sauf erreur de ma part je ne crois pas avoir entendu une seule fois mention de ce synode sur la synodalité à la messe. Jamais entendu un prêtre inviter les fidèles à participer et donner le mode d’emploi.
Je ne dis pas que ça ne se fait pas ailleurs, mais je vais tous les dimanches ou presque à la messe, et bien que j’aie des enfants en bas âge, je m’efforce d’écouter : rien entendu sur le sujet.
Pour commencer la démarche souffre d’un fort déficit de communication. Ce ne sont pourtant pas les moyens qui manquent ! Il faut lire la presse, chrétienne ou non, pour avoir de vagues infos, naturellement souvent orientées en fonction du point de vue de l’auteur et de la ligne éditoriale du support de presse (mais bon, ça c’est normal).
Il faut également et surtout lire ce qu’on peut trouver sur les sites des diocèses, les remontées de la CEF, etc.
En Allemagne, ce que font remonter les évêques est honnête de leur part, ils ne cherchent pas du tout à édulcorer ce qu’on leur a fait remonter et qu’on leur demande de faire remonter plus haut. Les attentes sont nombreuses, très diverses, et souvent pour pour les pays de l’Europe de l’Ouest, les mêmes demandes reviennent.
À ce stade, on peut quand même se demander, si l’on veut jouer le jeu honnêtement, quelle mouche pique les rédacteurs de ce « recadrage » ?
Si on nous invite à nous exprimer en prétendant nous écouter, on ne commence pas à renvoyer dans les cordes ses interlocuteurs (dont l’épiscopat allemand quand même !) en leur disant que de toute façon il n’y aura pas de discussion sur ces sujet-là (« qui fâchent ») le magistère ayant déjà décidé que… (lire de Catéchisme de l’Eglise Catholique, il y a la réponse, pas de nuances, plus qu’à appliquer. Point barre, fermez la ban.)
Partant de là, c’est donc un jeu de dupes ? Qu’espère t-on ? Des évolutions à la marge ? Et encore, uniquement sur ce que ces messieurs de la Curie voudront bien faire lentement et très peu évoluer, sans surtout se pencher le mode de fonctionnement de l’Eglise, monarchie absolue de doit divin, structure hiérarchique rigide et pyramidale, où la démocratie est un gros mot et où l’apport des sciences naturelles, humaines et sociales est l’œuvre de Satan.
Un système à la fois juge et partie, hypocrite entre son si magnifique message et un certain nombre de ses pratiques, où le plus petit est écrasé sans états d’âme si jugé nécessaire, où le peuple n’a qu’à se taire, obéir, et n’a pas le droit d’interpréter la Parole autrement que comme on l’a dit plus haut. Surtout, interdiction de penser : c’est déjà désobéir et ouvrir une porte au Diable. Alors exprimer sa pensée, là c’est carrément faire preuve de péché de désobéissance !
On pense pour vous, ne vous en faites, pas, ayez la foi, ayez confiance et surtout obéissez.
Bref, l’Eglise a surtout une peur maladive de la Liberté en général, de la Liberté de penser en particulier ; d’avoir une lecture de Foi – un peu -différente et surtout de souhaiter des applications pratiques dans le mode de gouvernance différentes de celles qui correspondent à un système monarchique moyenâgeux…
Si vous en doutez, regardez les réactions épidermiques du haut-clergé dès qu’on suggère que faire autrement que ce qu’on a décidé de faire entre grosso modo 1500 et 1950, pourrait correspondre mieux à l’Eglise du XXIème siècle.
Il y a une inadéquation de logiciel de pensée et de langage entre l’Eglise et les Hommes du monde actuel.
C’est bien triste : l’Eglise a apporté tant à la société Européenne et Occidentale, et ainsi au Monde, dans l’Histoire, et aujourd’hui elle est démunie parce qu’elle n’a même pas compris ce qu’elle pouvait gagner à faire siennes les avancées de la société en matière de protection de l’individu, juridiquement notamment, en matière de droit du travail, de justice, d’enquête, de respect du principe contradictoire, en matière de résolution des conflits humains et de modes de gouvernance sain(t)s !
Non que la société soit parfaite, loin de là… Mais l’Eglise n’a même pas les outils pour gérer au mieux les problèmes (abus de toutes sortes, cléricalisme…), quand la société civile les a adoptés depuis longtemps !!
…Non, la démocratie n’est pas un gros mot, et si elle n’est pas parfaite, elle est quand même moins pire que la monarchie absolue, et un « synode sur la synodalité », ça vise justement à introduire une mesure de démocratie dans le système (Ben oui, arrêtons la langue de bois et cessons dire à la fois tout et son contraire !).
Sinon, ça ne sert effectivement à rien ou pas grand-chose, et alors pourquoi chercher à changer – ou du moins faire évoluer – un truc de toute façon verrouillé ?
A Louis
Il existe dans l’eglise un vieil adage : »Roma locuta, causa finita »
Le Vatican , dans ce communiqué de presse adressé à l’episcopat allemand a sifflé la fin de la récréation synodale .
Oui je sais , je suis « structurellement négatif. » .Bonne chance à ceux qui vont continuer à jouer pendant que tout le monde se met en rang dans la cour..C’est le problème avec ces êtres immatures que sont les fidèles laics , ils ne comprennent pas les subtilités du langage des clercs . Il faut toujours leur lettre les points sur les « i »
Relire le texte publié en mai 2022 « Le Catholicisme Français au bord de l’implosion ». L’analyse est très juste. Relire notamment :
» Sortir réellement de cette impasse, poursuivent les auteurs, exigerait d’engager des réformes qui ne viendront sans doute pas parce quelles représenteraient une remise en cause radicale du système. « Tant que le pouvoir sacramentel et celui de décider en matière théologique, liturgique et juridique, demeurent strictement dans la main des clercs ordonnés, mâles et célibataires, rien ne peut vraiment bouger. » Autant dire qu’ils ne croient guère aux vertus du Synode en préparation pour 2023 dont les avancées possibles seraient, selon eux, aussitôt contestées par la Curie et une partie de l’institution restée figée sur la ligne des papes Jean-Paul II et Benoît XVI. »
…Le « recadrage » du chemin synodal allemand n’est ici qu’une des illustrations de la vérification de cette thèse. C’est un exemple, il y en a eu d’autres, il y en aura d’autres.
Dès qu’on veut toucher à quelque chose, la réaction du clergé est une crispation. De réforme il n’y aura qu’au risque d’un schisme.
« Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes », comme qui dirait.
Quant à l’avenir, bien malin qui saura prédire le futur, et si des réformes structurelles de l’Eglise, dont elle a besoin, auront lieu. Ce qui est sûr c’est qu’aujourd’hui, ça n’a pas l’air bien parti pour !
Bonsoir,
Je ne suis pas retourné à la messe une seule fois depuis le coronavirus, pas plus qu’au théâtre ou au cinéma, et je prends les transports en commun le moins possible. Donc je ne peux plus me considérer comme un catholique pratiquant.
Cependant, je continue de suivre un peu l’actualité religieuse, et de m’informer notamment grâce à ce blogue très intéressant de René Poujol.
Ce synode ne m’a pas beaucoup intéressé. J’ai parcouru le document préparatoire, et la phrase « quant aux processus et aux événements synodaux, s’ils ne sont pas animés par un style adéquat, ils apparaissent comme des formalités vides » m’a paru être d’une grande lucidité, d’une grande parrhésie, comme dirait le pape François. Je n’ai pas été convaincu que ce synode plus qu’un autre devait être autre chose qu’une formalité vide, et je ne m’y suis pas intéressé plus que cela.
D’après les informations ci-dessus, il semblerait qu’au moins en Allemagne, la chose soit moins vide que pressenti.
Ce ne serait pas la première fois que l’Église d’Allemagne se poserait en avant-garde entraînant l’Église universelle en dehors des rails tout tracés de la curie romaine : je pense au discours du cardinal Frings à la séance d’ouverture du concile Vatican II, le 13 octobre 1962.
Voici plusieurs extraits (traduits par moi, sauf le renvoi) de documents publiés sur le site du synode allemand ( synodalerweg.de ). En complément de cet article. Voir aussi « Le chemin synodal allemand, Jérôme Vignon, site Promesses d’Eglise ».
Règlement du chemin synodal article 11 Résolution finale :
« Les résolutions de l’assemblée synodale n’entraînent aucun effet de droit. Le pouvoir intégral de la conférence des évêques et des évêques des diocèses reste intouché, tant pour ce qui est de leur responsabilité en matière de décréter des normes de droit que d’exercer leur magistère. »
Discours d’ouverture du Président du Comité central des catholiques allemands (ZDK), le Prof. Thomas Sternberg, le 31 mai 2020, à Francfort. :
« Les résolutions finales relèvent de trois catégories : d’abord celles qui peuvent être mises en application en Allemagne. En second, celles qui relèvent du niveau romain et qui seront présentées au pape. Enfin celles qui sont à adresser à un concile. »
Lettre du 14 avril 2022, de l’évêque Georg Bätzing, coprésident de l’assemblée synodale, en réponse à la lettre de l’archevêque de Denver, USA, Samuel J. Aquila et consorts :
« Le chemin synodal est notre tentative, en Allemagne, de prendre en compte les causes systémiques des abus et de leur dissimulation, qui a causé une douleur indicible à tant de personnes dans l’Eglise et par l’Eglise. En même temps cela a assombri le témoignage de l’Eglise. Pour cela, le chemin synodal est notre tentative de rendre de nouveau possible une proclamation crédible de la bonne nouvelle. Ce lien et cette occasion nous tiennent à coeur, mais cela n’est malheureusement pas du tout évoqué dans votre écrit. Je m’étonnerais assurément beaucoup, si vous et les signataires de la lettre ouverte ne voyaient pas la nécessité en tant qu’Eglise, de se poser la question des abus et d’en tirer les conséquences pour elle et pour ses structures. Dans ce contexte il faut malheureusement aussi parler ouvertement du pouvoir et de l’abus de pouvoir dans l’Eglise ; là des euphémismes atténuateurs, auxquels vous vous essayez dans votre lettre, n’aident pas à avancer… Une participation de fidèles aux décisions dans tous les domaines de l’agir ecclésial (c’est ce que nous entendons quand nous parlons de partage du pouvoir) n’endommagera en rien l’autorité hiérarchique ; elle apportera une acceptance fondée auprès du peuple de Dieu, j’en suis convaincu.
Je ne veux pas non plus cacher que les reproches faits aux catholiques en Allemagne, qui sont pointés dans la lettre, nous posent question. Ceci vaut particulièrement parce qu’il s’y trouve des affirmations, au sujet desquelles, eu égard à votre importance, on attendrait des justifications. De celles-ci vous nous restez malheureusement redevable. »
Extrait de l’interview donné par le Prof. Thomas Sternberg à la radio diocésaine de Cologne (domradio.de) le 22 juillet 2022 :
« Je pense qu’il y a vraiment une certaine nervosité à Rome, du fait du succès de ce chemin synodal, ce qui n’était pas prévu. Il est important de faire la différence, le chemin pris par le synode allemand ne met pas au centre la question synodale initiée par le pape. Il n’est pas non plus un chemin en vue d’une réforme globale de l’Eglise universelle. Sa base tient uniquement dans la prise en compte des abus sexuels causés par des clercs. Ce point de départ différent est particulièrement important et induit des thèmes différents. Essentiellement le premier, « Pouvoir et séparation des pouvoirs dans l’Eglise (1) »… Il apparaît de plus en plus dans le processus synodal, un, qu’on peut faire des synodes et autrement que selon la curieuse préconisations ecclésiale ; et sur des sujets qui touchent les chrétiens universellement et que des catholiques, hommes et femmes manifestement partagent avec nous. »
(1) Ce thème est développé ainsi en vue des débats : « Le forum s’interroge sur la manière dont le pouvoir est traité dans l’Église. Que faut-il faire pour réduire le pouvoir et le répartir ? Pour cela, un examen interne critique sur les conditions de l’abus de pouvoir est indispensable. En outre, les approches, les processus et les structures d’un renouveau durable seront discutés, ce qui inclut également la mise en place de tribunaux administratifs. Les questions centrales du forum seront les suivantes : Comment faut-il comprendre et exercer le pouvoir dans l’Église, comment l’organiser, le limiter et le contrôler ? Comment le justifier théologiquement ? Quelles sont les conditions-cadres et les structures qui favorisent les abus de pouvoir, quelles sont celles qui sont nécessaires pour lutter contre les abus de pouvoir ? »
Mes remarques :
– le processus synodal français est moins transparent ; il regroupe moins de composantes du peuple de Dieu (beaucoup d’absents parmi les plus pertinents des laïcs) ; le groupe de projet, le collationnement et la synthèse sont faites d’une manière plus ou moins opaque dans maints diocèses ( c’est le cas le mien) ; moins achevé, car rares sont les préconisations clarifiées ; soutenu par la conférence épiscopale du bout des doigts.
– de ce qui a été synthétisé, sans véritable classement par ordre d’importance, le rend à ce stade inefficace pour une réforme structurelle pour une meilleure gouvernance. Le synode allemand, lui, a pointé dès le départ, le point névralgique : le mode d’exécution du pouvoir.
– une élaboration théologique des propositions est quasi inexistante. Ah, j’oubliais, elle n’est pas du ressort du tiers état, qui doit s’en tenir au cahier des doléances.
– le pape fait une remarque sur l’élitisme du synode allemand, à tort : la représentativité de toutes les composantes, les communautés nouvelles, des jeunes engagés (même si la base a aussi été absente) a été mieux assurée.
– la partie conservatrice de l’Eglise a sorti son artillerie parce qu’elle n’aime pas les processus démocratiques : ni au niveau de l’initiative originelle, ni dans un règlement permettant l’expression de toutes les composantes et des débats d’égal à égal (la conversation, que proposait Paul VI entre catholiques et autres chrétiens). Il en est de même pour les procédures de prise de parole, de vote : un membre = 1 voix, quel que soit le statut ecclésial ! En particulier l’épiscopat conservateur américain ne lésine pas sur les munitions, même quand il s’agit de demi-vérités, dans la ligne de l’ex Président T.. On frôle « la fin justifie les moyens ».
C’est comme dans ma paroisse. Depuis quinze ans mon épouse et moi participons à la vie paroissiale. Nous avons fait des observations, des propositions ou engagé des mini-actions ; aucune n’a été entendue, ou soutenue, ou mise en oeuvre sans amendement ; que ce soit par le curé ou les responsables paroissiaux du premier cercle. Tout ce qui ne vient pas d’abord d’en haut ( ah le fameux appel à vocation ou à service ) ne mérite pas d’être pris en considération. Le Saint-Esprit souffle toujours du haut vers le bas… Tout mode d’expression un peu intellectuelle est incompris ou perçu comme menaçante.
Un grand merci pour ce témoigange et pour les citations nombreuses qui viennent bien confirmer l’analyse de mon billet.
Plusieurs commentateurs souhaitent un schisme plutôt que de renoncer à voir leurs idées triompher… cela en dit long sur l’idéologie qui sous-tend leur combat.
Périsse l’Eglise plutôt que vivre la communion ecclésiale !
Comme si « l’ordination des femmes à la prêtrise, le mariage des prêtres, et les bénédictions des couples de même sexe » étaient les seules ou principales urgences de l’heure !
Etaient-ce là la Bonne Nouvelle de Jésus Christ ?
Tout cela est bien triste, petit, petit, petit…
Si quelqu’un sait où sont les urgences de l’heure… qu’il le dise ! Il n’y aura pas de sursaut sans confiance recouvrée. Or, à mon sens, cette confiance passe aussi par la capacité de l’Eglise à s’incarner réellement dans le monde tel qu’il est, à s’inculturer pour reprendre une formule dont j’abuse peut-être. Or je tiens, pour ma part que sur la question des « femmes » dans l’Eglise, et sur la question homosexuelle, l’Eglise devra revoir un jour ou l’autre sa copie. Parce que nombre de fidèles ne voient plus le lien entre son enseignement et les écigneces de l’Evangile. Quant au mariage des prêtres, ce n’est pas vraiment la question… La vraie question étant celle de l’obligation du célibat qui peut très bien convenir aux uns et pas aux autres. Donc encore une fois, on peut, chacun avec sa sensibilté, penser à d’autres urgences, mais s’il s’agissait par exeple de l’annonce de l’Evangile… on le fera avec qui si on ne règle pas AUSSI ces questions là ? De grâce ne me ramenez pas les St Pierre et les St Martin… comme contre-argument !
L’annonce de l’Evangile, ce n’est pas une si mauvaise idée !
S’incarner, « s’inculturer », oui, bien sûr, et on peut parler de la place des femmes dans l’Eglise, de la situation des homosexuels, de la question du célibat, etc…
Mais quand on arrive à souhaiter un schisme dans l’Eglise pour voir ses idées triompher, c’était mon propos, désolé, mais je dis non et je n’exclus pas que cette préoccupation soit précisément celle de François.
Je ne crois pas qu’il y ait de « souhait » de schisme. Mais chacun peut observer qu’il y arrive un moment – des moments – où la situation devient de fait schismatique lorsque chacun est convaincu d’être – et lui seul – dans la fidélité à l’Evangile : soit en restant figé sur un modèle, soit en désirant des réformes. Mais ce n’est pas nouveau. Simplement on a longtemps balayé le problème en qualifiant d’apostats ceux qui, en réalité, étaient de fait, déjà des schismatiques. C’est tragique mais c’est ainsi ! Aujourd’hui on dénonce l’Eglise d’Allemagne. Mais essayez donc de discuter du Concile avec un tradi…
René, je faisais référence à des commentaires précis, notamment celui d’Emmanuel 27 juillet 2022 at 11 h 21 min :
« J’en viens à penser que seul un schisme pourrait (peut-être) sauver l’Eglise, lui permettre de se reconstruire, et peut-être de réellement s’inculturer dans les différents pays. »
La réalité pour être fidèle à l’Evangile n’est peut-être pas aussi binaire que « soit en restant figé sur un modèle, soit en désirant des réformes ».
On peut souhaiter des réformes bien sûr, notamment du droit canon si j’en crois ce que j’ai lu sur un autre fil, mais pas forcément enfourcher les modes du moment.
a René
Il s’agit moins d’être convaincu d’être les seuls fidèles à l’Evangile – ce qui est pour le moins téméraire et présomptueux , que de dire ce qui manifestement ne l’est pas . Jusqu’à preuve du contraire les abus des clercs et le fait de les couvrir sont difficilement compatibles avec l’Evangile et même difficilement compatible avec « l’honneur de l’église « qui semble être l’alpha et l’omega de tout comportement épiscopal .
Mais Michel , le schisme est déjà consomme que nous le voulions ou pas .
Il était latent et la mise en évidence des abus des clercs n’a fait que le rendre public et tangible .
C’est certes regrettable et nul ne peut se réjouir de cette situation .Mais la ligne de fracture est entre ceux qui persistent dans le deni au nom de l’a priori de sainteté et de divinité de l’Eglise etendu à son institution et ceux qui regardent la realite en face et soulèvent la question de l’adéquation et de la cohérence entre la mission de l’Eglise (temoigner de l’Evangile )et le fonctionnement archaïque de son institution qui engendre des derives dommageable qui de plus disqualifient la parole de l’institution
Le théologien allemand E Bises avait prévu ce schisme vertical entre l’institution et le peuple des baptisés. Les clercs n’ont pas voulu l’entendre pour prévenir ce schisme et aujourd’hui il est là .Il se traduit par la fuite des catholiques qui rse disent néanmoins toujours catholiques
Alors qu’est ce qu’on fait ?
On fuit dans une spiritualité de pacotille comme le préconise entre autres « Famille Chrétienne : il n’y a pas de problème dans l’eglise , juste un manque de foi et de confiance des fidèles
Ou on traite les problèmes de gouvernance dont le modèle médiéval ne permet plus de traiter les problèmes d’aujourd’hui ?
A ce jour , en dépit de l’avertissement des contributions du synode l’institution choisit encore et toujours la fuite dans la « spiritualisation » de toutes les questions concrètes . Pour paraphraser une célèbre phrase de Churchill : les évêques choisissent le deni pour sauvegarder l’unité, ils auront le deni et le schisme .
Guy, désolé encore une fois, je ne peux adhérer à une vision aussi binaire de l’Eglise : « On fuit dans une spiritualité de pacotille (…) Ou on traite les problèmes de gouvernance ».
a Michel,
Vous caricaturez ma position . Je parlai exclusivement de l’attitude à adopter par rapport au risque avéré de schisme . Hier encore dans Famille Chrétienne , excellent journal en dépit de sa ligne éditoriale , on pouvait lire qu’il suffisait de s’en remettre au Saint Esprit . c’est quand même un peu court . De plus selon la saine théologie catholique ,il me semble que l’Esprit agit à travers tous les baptisés . Alors s’en remettre à je ne sais qu’elle intervention extérieure de type magique , en effet j’appelle cela de la spiritualité de pacotille ; . Une fuite un déni pour ne surtout pas entendre. les questions qui se posent à notre église .
Guy, je ne faisais que vous citer !
Mais je pense qu’il faut tenir les deux bouts, réformer la gouvernance de l’Eglise et faire confiance à l’Esprit Saint !
@Michel : Dans mon commentaire, je me résigne au schisme plus que je ne le souhaite. Un peu comme un combattant peut se résigner à la guerre (et en espérer une victoire) plutôt que continuer à chercher une paix de court terme (qui mènera au désastre).
Inversement, je comprend mal votre position : avez vous donc peur qu’un schisme signe la mort de l’Eglise ? L’Eglise à connu des multiples formes à travers les siècles, on peut difficilement imaginer que la forme qu’elle à aujourd’hui persiste à l’identique dans les 500 prochaines années (sauf à vouloir la mort de l’Eglise, ce qui n’est certainement pas votre cas).
Ne vous en déplaise, la place de 50% des enfants de Dieu (les femmes) dans l’Eglise, la sacralisation excessive du clergé (qui découle notamment du célibat ecclésial) dénaturent le message des évangiles et trahissent le message du Christ. Ce sont des urgences.
Sauf a considérer bien sur que l’urgence des urgences est que surtout rien ne bouge.
Femmes et LGBT + : « L’Église ne peut oppresser d’une main et accueillir de l’autre » : « Pour Alix Bayle, cofondatrice de Toutes Apôtres !, l’Église doit revoir sa doctrine sur l’homosexualité, ce qui ne peut se faire sans une remise en cause de l’idée de « complémentarité homme-femme ». Selon l’autrice, cette dernière « cadenasse toute évolution vers une réelle égalité dans notre Église. …
En excluant que le Synode sur la synodalité puisse aboutir sur une réforme de la doctrine catholique sur l’homosexualité, c’est donc aussi la condition des femmes que l’Église verrouille. » (Alix Bayle, La Croix, 6/9/2022, voir ci-dessous)
https://www.la-croix.com/Debats/Femmes-LGBT-LEglise-peut-oppresser-dune-main-accueillir-lautre-2022-09-06-1201231937
Vous écrivez : « l’Église doit revoir sa doctrine sur l’homosexualité, ce qui ne peut se faire sans une remise en cause de l’idée de « complémentarité homme-femme ». Je ne partage pas cette analyse. Je ne vois pas comment l’Eglise pourrait contester la complémentarité homme/femme (ne serait-ce qu’au plan biologique) qui n’oblige à aucune inégalité entre eux.
Je crois que la réflexion doit plutôt porter sur la notion d’altérité. Si la femme est évidemment « autre » par rapport à l’homme, tout être différent de moi, fut-il du même sexe, est également « autre » puisque « unique » nous enseigne justement la doctrine catholique. Le second chantier à ouvrir étant celui de la fécondité trop étroitement perçu dans sa seule acception reproductive et charnelle là où il peut y avoir fécondité spirituelle, culturelle, sociale… (les tenants du célibat sacerdotal obligatoire auront du mal à plaider le contraire).
Ce qui est clair, et là je m’accorde avec vous, est que la doctrine catholique sur la sexualité est de fait, à réinterroger.
A l’aide d’un joli vocable (« altérité »), votre analyse tente d’esquiver les problèmes fondamentaux d’inégalités qui subsistent entre humains dans une Eglise qui persiste à refuser toute évolution (cf. inégalités entre hommes et femmes et inégalités entre hétérosexuels et homosexuels).
« Altérité » pour alter.ite missa est ?
Qu’en est-il du blog Cath’lib comme « lieu d’échange libre » ? (cf. ci-dessous)
https://www.renepoujol.fr/apres-le-suicide-dun-ami-pretre/comment-page-3/#comment-122988
Je n’esquive rien du tout. Et je ne comprends pas davantage votre ultime question. Cath’lib ne serait donc pas un lieu d’échange libre simplement parce que j’aurais le toupet de dire mon désaccord avec votre analyse ? En quoi la complémentarité interdit-elle l’égalité ? A ma connaissance male et femelle sont complémentaires pour donner la vie (jusqu’à ce jour en tout cas) et le récit biblique dit AUSSI qu’Eve a été créée pour elle-même, à égalité de statut avec Adam, puisque créés homme ET femme. Et je ne vois pas en quoi nier la complémentarité homme/femme au sens où je l’entends, pour lui préférer une notion d’égalité règlerait plus la question de l’homosexualité que la notion d’altérité que je mets en avant. Vous me cherchez une mauvaise querelle !
Ne s’appuyant nullement sur l’histoire biblique à laquelle vous faites référence, Joseph Moingt s’exprime ouvertement sur la condition féminine – qui n’a pas (encore) évolué dans l’Eglise – dans sa préface du livre LE DENI:
« La collusion du mythe ancestral et du mythe révélé fait système, bloquant la foi, la pensée et la vie de l’Église sur son fonctionnement institutionnel et le pouvoir hiérarchique, au sommet duquel trône la papauté, héritière de Pierre, en chaire de vérité à laquelle appartient le droit d’interpréter en tant que Parole de Dieu tout ce qui est contenu dans les Écritures et véhiculé par la tradition. Ainsi toute vérité relève du pouvoir monarchique à qui est confié le service de l’enseigner, et le pouvoir se conforte en lui-même, confinant la vérité à son passé institutionnel, si étranger qu’il soit à la vérité historique et à la simplicité doctrinale des Évangiles. Voilà le type de fonctionnement autoritaire qui a empêché le christianisme, à l’aube des Temps modernes, de comprendre le cours nouveau de la pensée et de la société occidentales, de s’y insérer et d’en être compris, notamment en ce qui concerne l’évolution de la condition féminine, du statut du couple, et aussi de celui du sacerdoce » (Joseph Moingt s.j., extrait de la préface du livre « LE DÉNI – ENQUÊTE SUR L’ÉGLISE ET L’ÉGALITÉ DES SEXES » de Maud Amandier et Alice Chablis aux Éditions Bayard, 2014, p. 11-12)
Complémentarité , égalité , altérité
– Il me semble que pour pouvoir parler de complémentarité entre les sexes , cela n’est audible que si au préalable on assure l’égalité entre eux . L’église catholique invoque trop souvent la complémentarité pour justifier l’inégalité . La complémentarité réelle ne peut se concevoir qu’entre des personnes égales .
En deux mots la complémentarité ne peut pas être invoquée pour justifier l’inégalité et la complémentarité repose sur le constat de l’altérité qui ne peut lui non pus servir à justifier l’inégalité ;
je suis autre que toi , nous sommes complémentaires condition que nous soyonsà égalité de droit s et de devoirs .
Guy,
Où avez-vous vu que l’Eglise catholique invoquait la complémentarité des sexes pour justifier une inégalité entre eux ! ?
Cessons les procès d’intention hâtifs, même si bien sûr on peut interroger l’Eglise sur la place des femmes et plus généralement sur le sacerdoce des baptisés (hommes ou femmes).
Il y a tout une réflexion à mener en effet, mais pas seulement dans l’Eglise, sur l’articulation entre identité ou universalisme et altérité ou complémentarité.
Michel,
Pour répondre à la question que vous vous posez concernant la complémentarité et l’inégalité :
« La complémentarité entre les hommes et les femmes (ou comment faire persister le sexisme) » : voir ci-dessous
https://jesuisfeministe.com/2018/03/05/la-complementarite-entre-les-hommes-et-les-femmes-ou-comment-faire-persister-le-sexisme/
Or le sexisme implique l’inégalité.
CQFD
Michel,
Si je puis me permettre, je ne vois pas la différence; l’Esprit saint agissant à travers les « bonnes « actions des hommes et les inspirant.
L’Incarnation a bien eu besoin de la Vierge Marie, sinon on aurait eu affaire à de la magie.
Marie-Christine,
Je ne comprends pas bien votre commentaire ni à quoi il répond ?
Je suis en accord avec ce que vous dites ici !
Michel,
Je voulais dire, à moins que j’ai mal compris votre message, qu’il se pourrait que l’Esprit saint inspire le changement de la réforme de la gouvernance de l’Eglise,
Souhaitons-le en effet ! « Nous et l’Esprit Saint avons décidé »…
effectivement…mais il n’y a pas que l’Esprit Saint pour inspirer les hommes…
« Passe derrière moi Satan tes,idées ne sont pas celle de Dieu mais celle des hommes » mais il est vrai qu’il n’est pas dans l’air du temps de rappeler ce genre de choses…
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Michel,
Ne soyons pas naïfs. Jean Paul II en exaltant le « génie féminin » et en assignant aux femmes le modèle ( vrai ou supposé ) de Marie comme mère allant dans le service jusqu’au don ultime de soi, a bien enfermé les femmes dans un rôle sublime certes, du point de vue des idees, mais qui légitime en fait bien des inégalités de pouvoir. C’est en effet le propre d’un raisonnement idéologique que de légitimer un etat de fait par des idées grandioses. Ainsi exalter les soit disant « qualités « féminines a pour conséquences dans la réalité de reléguer les femmes à une place qu’elles ne peuvent quitter.
Et les hommes n’auraient pas non plus à servir dans le don ultime de soi ?
Ce raisonnement m’est incompréhensible.
« il n’est pire sourd que celui (ou celle) qui ne veut pas entendre » et je vous invite à écouter sur le site de France-Inter l’interview de ‘Élisabeth Badinter qu’on ne saurait accuse d’antiféminisme,du moins me semble-t-il
Ah, merci Marie-Christine !
Chaque fois qu’on me parle dans l’Eglise du rôle de la femme, de la richesse qu’est la féminité (pas la masculinité ?), de la Vierge Marie comme modèle absolu, j’ai envie de regarder par-dessus mon épaule pour voir à qui le discours s’adresse.
Outre que je ne m’y reconnais pas du tout, dans les faits j’ai bien constaté que cette histoire de complémentarité était invoquée pour justifier le « toi, femme, sers, prie et ferme-la, c’est pour ça que tu es faite » qui, s’il n’est pas formulé ainsi (encore que…) fonctionne toujours, malgré tout ce qu’on raconte. Seulement il est « enveloppé », « sublimé » par des mots, comme d’habitude.
Anne, je crains que nos réflexions ne tournent en rond du fait de la confusion permanente entre deux réalités : l’une qui tient à la différenciation des sexes (on continue de naître mâle ou femelle), l’autre qui tient à la question du genre. Que la notion de complémentarité serve d’alibi à l’Eglise catholique pour justifier des inégalités de genre (le sacerdoce pour les hommes, le fleurissement de l’autel pour les femmes, pour caricaturer un peu…) est une évidence. Et il n’y a as que dans l’Eglise catholique que l’accès au pouvoir est « genré ». Mais cette évidence ne permet pas de conclure que la légitime revendication à l’égalité homme-femme supposerait, en amont, la négation de toute différenciation ou compélémentarité des sexes. C’est du moins mon point de vue.
Là où cela devient « coton » si je puis dire, c’est lorsque la revendication à l’égalité des droits porte par exemple sur les droits dits reproductifs, et que l’on voit des hommes revendiquer celui d’être « mères », aujourd’hui symboliques, mais demain nous dit la science possiblement biologiques. Ce qui signifierait un « dépassement » de la notion de différenciation/complémentarité sexuelle et sexuée, au bénéfice d’une forme d’indifférenciation « genrée ». Je vais vous faire un aveu : je ne regrette pas la perspective d’avoir dégagé le terrain lorsque nos sociétés en seront à devoir affronter ces problématiques.
René, je comprends mais je ne suis pas du tout allée jusqu’aux droits reproductifs, je n’y pensais même pas. Effectivement, là on est en terrain miné.
Non, ce qui me choque dans l’Eglise est que, comme dans d’autres domaines, et avec encore plus de retard et réticences que dans ces autres domaines, l’inégalité homme-femme non seulement persiste mais surtout est justifiée par un discours qui paraît exalter les femmes tout en les enfermant. C’est tout ce que je voulais dire.
Je partage tout à fait ce point de vue. Et surtout il faut ne jamais perdre de vue que tout combat égalitaire n’aura de sens légitime que s’il s’agit de favoriser une égalité des droits des personnes qui sont dans des situations comparables (ex: un enfant n’a pas les mêmes droits qu’un adulte. Mais il a des droits élémentaires. Un aveugle n’a pas un droit à passer les concours pour être pilote de ligne. Pourtant les moyens techniques actuels lui permettraient de piloter un avion en sécurité. Une personne sous traitement psychiatrique n’a pas un droit à être habilité à porter une arme. etc. )… Sinon, on risque fort de tomber dans le travers de la vision « de gauche » version marxiste : on veut l’égalité de tout le monde pour tous, à tous points de vue (y compris de gens qui ne sont pas du tout dans le même cas de figure).
C’est alors soit de l’anarchie, soit de la dictature (voire les deux !), c’est nier les différences, les complémentarités, et nier la primauté de la liberté des individus… (Ce qui ne veut pas dire que la liberté est absolue… On tombe alors dans le travers de la vision « de droite »…Anarchique car sans règles ici aussi.)
Après, il faut naturellement favoriser cette égalité des droits des personnes, et bien des choses peuvent se discuter dans l’Église, y compris la place des femmes, leurs rôles, leur exclusion jusqu’à présent du sacerdoce des prêtres, la place des laïcs… Mais attention aux débordements et à la généralisation d’un relativisme pour tout : c’est là une notion très piège, parce que l’égalité concrète des personnes, ça n’existe pas, et ce n’est pas non plus souhaitable !
Enfin, s’agissant de l’Église fondée par Jésus-Christ, notre boulot sur cette Terre, celui de tous les baptisés et de toutes les personnes de bonne volonté, c’est de témoigner concrètement de son Amour pour le Monde.
À part ça, un article intéressant sur la souffrance des prêtres : https://www.la-croix.com/Debats/Souffrance-pretres-Nous-devons-abandonner-presuppose-lordination-rend-omniscient-2022-09-20-1201234095
Louis,
Je me demande si vous ne confondez pas égalité qui ne nie absolument pas les différences naturelles ( de sexe, d’âge, de forces physiques, de santé etc… ) ou acquises ( de culture, de milieu social) avec l’identité qui justement les nie et fait comme si tous les humains étaient semblables; ce qui n’est bien évidemment pas le cas.
Comme très souvent, les hommes qui ont perdu leur mère prématurément dans leur enfance, Jean-Paul II avait une grande dévotion mariale.
De là à lui faire le procès d’intention que vous lui faites, je vous en laisse, Marie-Christine, la responsabilité.
Voila un point dont je n’avais pas connaissance. Sa mère est effectivement morte alors qu’il avait 9 ans.
De fait, la vision de « la femme » dans l’Eglise ressemble encore bien trop souvent à celle que peut avoir mon tout jeune fils pour sa mère : une sorte de divinité capable de distribuer tous les bienfaits, douce, juste et pure (évidement ! Il n’a pour l’instant pas la moindre idée de comment il a été conçu).
Et peut-être effectivement si je m’étais arrêté à cet âge, j’aurais pu ne pas savoir que ma mère, mon épouse, mes filles et les femmes en général peuvent tout autant être revêches ou plaisantes, agressives ou douces, pures ou coquines, clémentes ou revanchardes, réfléchies ou sottes – à l’identique des hommes quand bien même ces qualités s’expriment parfois différemment.
Bref, très franchement, tant que l’on laissera les rennes de l’Eglise à des hommes qui ne connaissent pas vraiment la moitié de l’humanité, on n’avancera pas vers le royaume des cieux.
Emmanuel,
Exact. Meme les adultes ont du mal, du point de vue de l’inconscient à admettre comment leur mère les a conçus. Et certains restent, de ce point de vue, immatures toute leur vie. Ce qui peut induire chez eux une vision bien déformée de LA femme.
Michel,
Ce n’est pas un procès d’intention. Au contraire je pense que, de son point de vue, son intention était très bonne. Mais, en réfléchissant sur sa pensée avec du recul,c’est la conclusion logique, à mon sens, qu’il faut tirer de son encyclique sur les femmes.
A Marie Christine
Oui , jean Paul II a utilisé la vieille recette de l’idéologie patriarcale : exalter les « qualités » des femmes pour mieux les enfermer dans un rôle assigné par les hommes . Ce faisant il consacre une inégalité de fait .
A cela je veux opposer cette phrase de Delphine Horvilleur à propos de Simone Veil : » Elle disait aux filles de demain , que dorénavant aucune d’entre elles n’aurait présenter d’excuses pour devenir ce qu’elle voulait être . Cette promesse d’émancipation que nous avions reçu en cadeau faisait de nous des femmes libres de choisir les temps de leur vie par delà les assignations biologiques ou les injonctions à la maternité » (vivre avec nos morts p 89)
On ne peut pas évoquer la complémentarité, l’altérité , et tout ce qui effectivement différencie les hommes et les femmes sans que l’égalité entre eux ait été d’abord concrètement établie .
Guy,
Effectivement, la complémentarité des hommes et des femmes ne peut être légitimement invoquée qu’en posant au préalable leur égalité. Et il y a méprise, et ce, de tout côté, si on confond égalité et identité absolue.
Sinon, cette complémentarité peut servir ( et elle l’a fait très souvent et le fait encore ) pour justifier des inégalités de fait.
Marie-Christine,
En effet, « Ne soyons pas naïfs » … car les pièges qui nous menacent – déni de réalité et autres dérives sectaires – ne manquent pas.
(concernant le déni de réalité, voir Le déni de réalité : double peine imposée aux victimes de dérives sectaires – L’envers du décor (lenversdudecor.org) )
Marie-Christine,
En effet, « Ne soyons pas naïfs » … car les pièges qui nous menacent – déni de réalité et autres dérives sectaires – ne manquent pas.
(concernant le déni de réalité, voir https://www.lenversdudecor.org/Le-deni-de-realite-double-peine-imposee-aux-victimes-de.html )
Sur foi et religion, question souvent débattue sur ce blog, une intéressante contribution à contre-courant du jésuite Paul Valadier : « Toute vraie spiritualité suppose des règles de prudence »
[Entretien] Dans son essai passionnant, « Éloge de la religion » (Salvator), à contre-courant de bien des idées reçues, le jésuite Paul Valadier appelle à ne pas se dispenser de la religion, le risque étant de sombrer dans un subjectivisme dangereux.
https://www.lavie.fr/ma-vie/spiritualite/paul-valadier-toute-vraie-spiritualite-suppose-des-regles-de-prudence-84205.php